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Fourier

Fourier

Titel: Fourier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jonathan Beecher
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développer leurs talents dans de
multiples activités sans être jamais attachés ou identifiés à un seul rôle. De
façon plus générale, l’on peut dire que les premiers écrits de Marx et Engels
font montre d’un optimisme directement rattaché à Fourier sur le moyen de
s’accomplir individuellement et d’affirmer sa liberté par le travail au sein de
la société communiste.
    Dans leurs écrits plus tardifs, les deux socialistes semblent en
revanche avoir adopté une vision assez différente du travail et du rôle qu’il
aurait à jouer dans une société future 39 .
On en trouve des indices dans le Grundrisse (1857-1858) de Marx, où tout en
combattant la « définition négative » d’Adam Smith qui fait du travail un
sacrifice, l’auteur s’en prend également à Fourier qui aurait abordé le
problème de façon frivole en prétendant « que le travail pouvait être
transformé en une simple blague, un divertissement ». Voilà qui aux yeux de
Marx était traiter un problème sérieux en « termes de vendeuse 40 ». Dans le Capital, le rejet est plus
clair encore : soulignant la différence entre le travail libre et celui que
déterminent le besoin ou des contingences extérieures, Marx promet qu’un jour
le second sera moins éprouvant. Toutes les améliorations technologiques et
sociales du monde ne changeront cependant rien au fait que beaucoup de tâches
indispensables au bon fonctionnement de la société socialiste seront toujours fastidieuses
et frustrantes. Marx reporte donc ses espoirs sur le jour où « les progrès des
machines et de l’automatisme donneront tellement de temps libre aux hommes »
qu’ils pourront consacrer leurs heures de loisir à la culture de leurs talents
latents.
    En fait, le royaume de la liberté commence seulement là
où l’on cesse de travailler par nécessité et opportunité imposée de l’extérieur
; il se situe donc, par nature, au-delà de la sphère de production matérielle
proprement dite... [qui] constituera toujours le royaume de la nécessité. C’est
au-delà que commence le développement des forces humaines comme fin en soi, le
véritable royaume de la liberté qui ne peut s’épanouir qu’en se fondant sur
l’autre royaume, sur l’autre base, celle de la nécessité. La condition
essentielle de cet épanouissement est la réduction de la journée de travail 41 .
    Il est clair que de tels passages n’ont plus rien de commun avec
la vision fouriériste.
    Pour Marx, la théorie du travail attrayant n’est pas seulement
frivole, elle est malhonnête : Fourier garantit à tous le droit de ne pas
travailler tout en dressant des emplois du temps qui requièrent de chacun
jusqu’à quinze heures de travail quotidien. Il assure que tous seront libres de
décider de leurs activités, mais ne doute pas de toujours trouver des
volontaires enthousiastes pour les travaux les plus désagréables. Pour Marx,
Fourier refuse tout simplement de prendre sérieusement en considération la
nature répugnante de bien des travaux indispensables. Alors que certaines
tâches resteront à jamais éprouvantes, Fourier, lui, n’accepte pas même l’idée
d’empire de la nécessité. S’il l’avait pu, Fourier aurait sûrement rétorqué que
tout son système - la théorie des passions, le mécanisme des séries, le système
éducatif fondé sur la vocation - tendait à démontrer que le travail et la
recherche du plaisir, malgré les incompatibilités d’apparence, pouvaient très
bien être réconciliés ; qu’il n’existe pas d’aversion naturelle pour le travail
; que tout travail est fait pour procurer du plaisir et libérer l’homme, et que
la tâche du théoricien social consiste à définir les conditions précises d’une
adéquation du travail à sa véritable définition.
    L’optimisme radical de Fourier sur le travail vient de ce qu’il
refuse de voir entre l’homme et la nature un antagonisme irrémédiable. Il ne
partage pas la vision prométhéenne qu’a Marx d’un homme toujours obligé
d’arracher sa pitance à un environnement hostile. Bien que sous certains
aspects ses idées se rattachent au courant romantique du XIXe siècle, sa
conception de l’homme dans la nature prend racine dans le classicisme du XVIIIe
siècle. La nature est pour lui fondamentalement bénigne ; s’il s’attend à ce
que les Harmoniens travaillent dur, il croit fermement qu’il est possible pour
l’homme de prêter grâce et raffinement à toute

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