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Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Titel: Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sara Poole
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jaillissement du sang qui s’en était suivi… Un je-ne-sais-quoi qui me procurait un sentiment de puissance et, étrangement, une paix que je n’avais jamais connue jusqu’alors. Si j’avais pu dormir à cet instant, j’eus tout à coup la certitude que le cauchemar ne serait pas venu.
    Cette pensée m’entraîna jusqu’à la bassine qui se trouvait sur la petite table, à côté du lit. L’eau qu’elle contenait avait depuis longtemps refroidi, mais c’est à peine si je le remarquai en frottant le sang sur ma main pour l’enlever ; je m’arrêtai seulement lorsque ma peau fut à vif. C’était sans importance. Les doigts qui s’étaient refermés sur le couteau avec un tel empressement ne seraient plus jamais véritablement propres. Et ni l’absolution ni la prière, peu importait combien de fois je m’y astreignais, ne réussirait à effacer ce que j’envisageais de faire en toute liberté et en connaissance de cause.
    « Les dés sont jetés », avait déclaré le Cardinal.
    Je craignais qu’il n’en aille de même de mon âme dans la fosse des damnés.
    C’est une chose curieuse que de se savoir condamnée. La peur s’estompe, le doute s’évapore. On ressent un sentiment étrange et grisant de libération. À l’aube d’un jour nouveau, je décidai de sortir dans le matin rouge sang qui se levait sur Rome.

10
    S ofia était en train de bander une plaie purulente à la jambe d’un vieil homme à mon arrivée. Rien ne semblait avoir changé depuis la veille – toujours autant de malades et de mourants faisant la queue pour demander de l’aide, toujours autant de cadavres s’entassant dehors.
    Elle leva les yeux et, me voyant, désigna d’un geste la porte à l’arrière de l’échoppe.
    — Attendez-moi devant, je vous prie, dis-je à Vittoro car je savais que Sofia ne parlerait pas en sa présence. Il hocha la tête, me décocha un regard que j’interprétai comme un appel à la prudence, et alla prendre son poste.
    Non sans m’avoir auparavant mis dans les bras les diverses choses que Sofia nous avait demandées. Je les portai à l’arrière, et trouvai une petite place sur la table encombrée où poser le tout. Je pris ensuite le temps d’observer les lieux plus attentivement que je n’avais eu l’occasion de le faire lors de mes précédentes visites.
    Malgré sa situation désespérée, je constatai que Sofia avait réussi à maintenir un certain sens de l’ordre et de la propreté. Tout était soigneusement étiqueté : baumes, onguents, pommades sur une étagère, pilules et suppositoires sur une autre, ingrédients sur plusieurs autres encore. Elle disposait des instruments chirurgicaux de base (scalpels, tenailles, cautères et autres), ainsi que d’une balance à plateaux plus que correcte. Globalement, j’étais surprise de voir une simple échoppe d’apothicaire si bien équipée.
    J’étais en train de songer à cela lorsque la porte de derrière s’ouvrit, et que Benjamin passa la tête.
    — Signorina, dit-il en me faisant signe, un sourire aux lèvres. Vieni prego .
    — Qu’y a-t-il, Benjamin ?
    Mais il était déjà en train de partir, me faisant toujours signe de le suivre. Je le suivis mais non sans une certaine exaspération, en me demandant ce qu’il voulait et ce qui lui faisait croire que j’avais le loisir de l’accompagner justement à ce moment-là. Tout de même, il était suffisamment grand pour comprendre que je n’avais pas de temps à perdre en enfantillages ?
    A priori il le savait parfaitement, car à peine eus-je mis un pied dans la ruelle que quelqu’un m’empoigna par derrière. On me mit une cagoule sur la tête, ce qui me plongea instantanément dans le noir. Le souvenir de mon agression était encore bien trop vivace : je me débattis comme une forcenée et tentai de crier, mais en vain. Avant d’avoir pu reprendre mon souffle, je fus jetée sommairement dans un espace étroit, une sorte de lourde trappe en bois fut violemment rabattue au-dessus de moi et je sentis que je commençais à rouler.
    Pendant plusieurs minutes je n’eus de cesse de tenter de me stabiliser contre les parois de ce que je devinai rapidement comme étant un grand baril de cornichons. Il avait été vidé au préalable, mais le bois était littéralement saturé de l’odeur de saumure. J’arrivais à peine à respirer, même par la bouche, et je devais rassembler toutes mes forces pour éviter d’être projetée violemment de côté à

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