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Francesca la Trahison des Borgia

Francesca la Trahison des Borgia

Titel: Francesca la Trahison des Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sara Poole
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petits-enfants, mais il avait eu la sagesse de reconnaître que j’étais maîtresse de moi-même, pour le meilleur ou pour le pire, et non une simple extension de sa volonté. Peut-être était-ce parce qu’il avait fait montre d’une telle considération à mon égard de son vivant que j’étais si déterminée à l’honorer dans la mort.
    — Dans ce cas, quelle différence cela vous fait-il, ce que lui pense ? en conclus-je.
    Borgia prit une autre gorgée de vin. Il reposa ensuite la coupe et sembla l’examiner attentivement, avant de me regarder dans les yeux. Brusquement, il m’interpella :
    — Va-t-il me trahir ? Dis-le-moi, l’empoisonneuse. Mon fils te confie-t-il ses envies de parricide sur l’oreiller ?
    J’étais consternée. Qu’il envisage la possibilité que son fils aîné soit un traître était déjà suffisamment fâcheux comme cela, mais qu’il me considère comme sa complice potentielle parce que je partageais sa couche était tout à fait impensable, pour ne pas dire plus si l’on considérait la chose strictement du point de vue de ma survie. En tant que fille unique d’un père qui m’adorait, je ne prétends pas connaître grand-chose aux mécanismes subtils des liens familiaux, mais même moi je savais qu’à cette question il ne pouvait y avoir qu’une réponse possible.
    — Avez-vous pris le temps de dormir, cette nuit ?
    Je cherchais à gagner du temps, bien sûr, suffisamment pour que mon esprit affolé ait le temps de formuler la réponse qu’il attendait de moi de la manière la plus crédible possible. Mais j’étais aussi vraiment inquiète pour lui, quelque part, Dieu m’en est témoin.
    — Giulia s’est-elle plainte ? rétorqua-t-il d’un air renfrogné.
    — Elle se soucie de vous. Comme nous tous. Si vous vous mettez à parler comme cela, les gens vont dire que vous avez l’esprit qui commence à s’embrouiller.
    Une bien dure façon d’admonester un pape, mais cela parut calmer Borgia. Il avait déjà dit par le passé apprécier mon audace, même si j’en avais toujours douté. J’étais plutôt d’avis qu’il me jaugeait en permanence, attendant le moment où je deviendrais davantage une source de problèmes qu’un bienfait. Mais en cet instant-là j’avais encore mon utilité, ne serait-ce que pour le garder en vie et, accessoirement, lui permettre de communiquer avec un fils par trop rétif.
    Il reprit d’un ton quelque peu adouci :
    — Je sais bien que je peux compter sur César, au bout du compte. Il est peut-être beaucoup de choses, mais certainement pas un coucou qui se serait glissé par erreur dans mon nid. Si c’était le cas, je serais obligé de l’en déloger, même si cela voudrait dire qu’il s’écraserait à terre.
    — Quelle chance dans ce cas qu’il soit aiglon, en digne fils de son père, lui rétorquai-je avec le plus grand sérieux.
    Borgia pouffa de rire ; il était aussi lunatique que son fils, d’humeur toujours changeante. Mais je ne fis jamais l’erreur de le croire capricieux – ceux qui le pensaient eurent tous amplement l’occasion de le regretter.
    — Vous vous faites du souci pour rien, continuai-je. Seriez-vous plus heureux si César était un incapable acceptant docilement tout ce que vous décidiez pour lui ? C’est un homme robuste, qui a du caractère. Réjouissez-vous de cela, mais sachez qu’au bout du compte il agira toujours selon vos souhaits.
    Borgia éructa discrètement derrière sa main chargée de bagues, puis émit un soupir.
    — Une bonne nuit de sommeil ne me ferait pas de mal.
    Sa manière bien à lui de s’excuser pour ses propos quelque peu extrêmes.
    — Je connais un bon apothicaire, si d’aventure vous recherchez un traitement plus efficace que le vin.
    Il prit un air faussement interloqué.
    — Vous êtes vraiment une femme surprenante, Francesca. En bon chrétien, on s’abstient normalement de donner l’occasion à autrui de pécher.
    Ce fut à mon tour de soupirer. Parfois je craignais réellement qu’il connaisse les moindres recoins de ma vie, même si je m’accrochais désespérément à l’espoir que Lux avait jusque-là échappé à sa surveillance.
    — Sofia Montefiore n’a aucune raison de vous faire du mal, Votre Sainteté.
    — J’espère que non, les juifs m’adorent. Ne leur ai-je pas tendu la main de la tolérance ?
    Main dans laquelle ils avaient déposé un colossal pot-de-vin, n’est-ce pas, même si je gardai cela

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