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Frontenac_T1

Frontenac_T1

Titel: Frontenac_T1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Micheline Bail
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remarque enflammée de son fougueux officier, Frontenac répliqua :
    â€” Je ne vous ferai pas tant attendre, monsieur. Dites à votre général que je ne connais point le roi Guillaume, et que le prince d’Orange est un usurpateur qui a violé les droits les plus sacrés du sang en détrônant son beau-père. Que je ne sais en Angleterre d’autre roi que le roi Jacques. Que votre général n’a pas à se surprendre, puisque c’est sous les ordres de Louis XIV, qui a pris sous son aile le roi d’Angleterre pour le replacer sur son trône, que j’ai porté la guerre en vos contrées.
    Puis, montrant de la main tous les officiers qui se pressaient autour de lui, il continua, en éclatant d’un large rire provocateur :
    â€” Votre général croit-il, quand il m’offrirait des conditions plus douces, que je sois d’humeur à les accepter, que les braves gens qui m’entourent y consentiraient et me conseilleraient de me fier à un homme qui a renié la parole donnée à Port-Royal? À un rebelle qui manque à la fidélité qu’il doit à son roi légitime, et oublie les bienfaits reçus pour suivre le parti d’un prince qui se présente comme le libérateur et le défenseur de la foi, alors qu’il détruit les lois et les privilèges du royaume et renverse la religion catholique? La justice divine réclamée avec tant de zèle par votre général foudroiera sévèrement un jour cet usurpateur!
    Doutant de pouvoir rendre un compte exact des paroles de Frontenac, Savage supplia l’interprète de les mettre par écrit.
    Quand Frontenac comprit la requête, il répliqua, d’une voix de stentor :
    â€” Non, monsieur! Je n’ai point de réponse à faire à votre général que par la bouche de mes canons et à coups de fusil! Qu’il apprenne que ce n’est pas de la sorte qu’on envoie sommer un homme comme moi. Qu’il fasse du mieux qu’il peut de son côté, comme je ferai du mien.
    * * *
    â€” Comment donc, major Savage? Si les choses se sont passées comme vous le dites, c’est que nos prisonniers ou nos informateurs nous ont trompés, et que notre stratégie d’attaque conjointe aurait lamentablement échoué.
    L’amiral Phips tombait des nues. Les informations que son émissaire lui rapportait sur l’état de Québec – du moins ce qu’il en avait supputé, bien qu’il eût les yeux bandés – et sur la réponse arrogante de Frontenac le sidéraient. Il fronçait ses épais sourcils et fouillait le major de ses petits yeux sceptiques. La situation s’avérait plutôt fâcheuse. Rien ne s’était déroulé comme prévu. La stratégie élaborée avec l’État de New York était pourtant imparable : le général Winthrop devait assiéger Montréal au moment où l’on savait que Frontenac et le gros de ses forces s’y trouvaient, ce qui aurait laissé la voie libre à Phips pour soumettre Québec. Abandonnée et sans défense, la capitale se serait rendue sur-le-champ, tandis que maintenant...
    L’amiral était perplexe. Si la prise de Port-Royal et de l’Acadie s’étaient avérées une partie de plaisir, le siège de Québec se présentait plutôt mal. La chance semblait virer. La victoire serait déjà chose faite s’ils avaient franchi plus vite la distance séparant Tadoussac de Québec. Mais ils avaient été ralentis par la difficile navigation dans le Saint-Laurent, les hauts-fonds et les terribles vents contraires. Avec pour résultat qu’ils se retrouvaient devant une citadelle fortifiée et gonflée d’effectifs fanatisés, commandée par ce satané Frontenac, ce fauteur de terreur et de désolation sur toutes leurs frontières.
    Le général durcit son regard.
    Â«De combien d’hommes ce diable de Frontenac dispose-t-il? Cinq cents, mille, deux mille? Et leurs féroces Indiens vont-ils joindre leurs forces aux siennes? » s’inquiétait-il, anxieux.
    Quelques membres de son conseil de guerre se pressaient autour de lui : le lieutenant général John Walley, les majors Quincy et Phillips. Des chaloupes faisaient déjà la navette pour amener à bord le vice-amiral Carter, le

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