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Frontenac_T1

Frontenac_T1

Titel: Frontenac_T1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Micheline Bail
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les dires m’ont été confirmés par le baron de Saint-Castin. De grands préparatifs ont lieu à Boston depuis quelques mois. Nos charmants voisins sont en train de monter une expédition punitive contre le Canada, qui regrouperait quelque dix mille hommes, Anglais et Iroquois confondus, dont la moitié attaquerait Montréal, et l’autre, Québec. Le gouverneur de la Nouvelle-York, Benjamin Fletcher, se serait même rendu jusqu’au Conseil privé de Londres pour obtenir de l’aide. À la suite de quoi le roi d’Angleterre a donné l’ordre à ses colonies d’Amérique de s’unir, pour une fois, et de fournir des hommes et des munitions.
    â€” Ce maudit Fletcher... marmonna Louis, jamais en retard d’un coup bas et toujours en quête d’un moyen de nous bouter hors de ce pays. Si par malheur il réussit à convaincre les autres colonies du Nord de se joindre à la Nouvelle-York, ainsi qu’aux Cinq Nations, nous sommes perdus. Mais, d’un autre côté, monter une pareille coalition ne doit pas être chose si facile, sinon il y serait parvenu depuis belle lurette...
    Louis réfléchissait tout haut, selon son habitude.
    â€” Vous avez raison sur ce point, reprit le chevalier, car j’ai entendu dire que la situation devenait difficile pour la Nouvelle-York. Ils commencent à manquer de tout et leur commerce des fourrures périclite. Il n’y aurait d’ailleurs jamais eu beaucoup d’entraide entre des colonies qui se jalousent et se combattent mutuellement depuis toujours. C’est au point que d’aucuns auraient suggéré à Fletcher de pousser les Iroquois à ravager la Pennsylvanie et le Maryland, comme ils l’ont déjà fait à quelques reprises, pour ramener ces États récalcitrants à de meilleurs sentiments.
    â€” Fasse le ciel qu’ils n’arrivent jamais à s’entendre, ventredieu! Tout cela nous démontre qu’il est grand temps de mieux fortifier nos villes et en particulier Québec et Montréal, qui sont encore beaucoup trop exposées aux insultes de l’ennemi. Je vais encore une fois écrire au ministre pour réclamer avec plus d’insistance – Louis fit une grimace éloquente, l’air de dire qu’il y croyait de moins en moins – des hommes et des fonds pour mieux protéger le pays d’une menace qui se précise de jour en jour.
    â€” Sans compter que nos alliés abénaquis commencent à baisser la garde.
    Ce disant, d’O avait incliné la tête vers l’avant pour que Duchouquet lui rince les cheveux.
    â€” Comment cela? Vous dites que nos alliés abénaquis...
    Le chevalier releva la tête et s’épongea le visage. Il avait meilleure mine qu’à l’arrivée. Restait à lui faire la barbe et à le coiffer. Duchouquet, qui était aussi maître-barbier, s’y ingénia.
    â€” Oui. J’ai appris de Saint-Castin que la situation s’était envenimée en Acadie, où certaines tribus commerceraient ouvertement avec les autorités du Massachusetts. Il semble que ce serait à cause du sieur de Beaubassin, votre capitaine des gardes, qui, au lieu de distribuer les fusils et les présents que vous avez envoyés aux Abénaquis, les a réquisitionnés pour son profit personnel.
    â€” Que me dites-vous là! Ce misérable aurait détourné des provisions destinées à ravitailler nos alliés?
    Louis faillit s’étouffer d’indignation. Il donna un grand coup de tisonnier dans le mur de pierre de taille. Il aurait volontiers étranglé ce Beaubassin s’il s’était trouvé à sa portée.
    â€” Comment savoir ce qui se passe si loin, aussi? Je le relèverai de ses fonctions et le remplacerai par quelqu’un de moins cupide! Ce scélérat aura des comptes à me rendre!
    Le chevalier observa longuement le gouverneur. Le regard toujours rivé sur les flammes, il avait l’air dépité et sa bouche avait pris un pli amer. D’O se risqua pourtant à lui poser la question qui l’obsédait depuis des mois.
    â€” Monseigneur, saviez-vous dans quelle gueule de loup vous nous jetiez en nous expédiant à Onontagué?
    Louis tressaillit et releva les yeux sur d’O. Il s’attendait à cette question et avait mille fois imaginé le contexte dans

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