Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Frontenac_T1

Frontenac_T1

Titel: Frontenac_T1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Micheline Bail
Vom Netzwerk:
intérieure, tantôt amplifiés tantôt étouffés par le tumulte environnant.
    Sa plume d’oie était fatiguée et laissait de vilains pâtés sur le papier. Callières appliqua un buvard en maugréant et relut tout haut, pour s’assurer de n’avoir rien oublié, le long passage narrant le saccage de Schenectady :
    Nos hommes marchèrent pendant des jours et des jours dans un mélange de neige fondue, de glace et de boue, dans lequel ils enfonçaient jusqu’aux genoux, traînant péniblement leurs provisions sur des toboggans, pour atteindre leur objectif onze jours plus tard, peu avant minuit, dans un froid si intense qu’ils ne purent différer l’attaque sans risquer de geler sur place. À demi morts de fatigue, de froid et de faim, et incapables de faire du feu sans risquer d’alerter l’ennemi, ils durent avancer ou périr.
    Au grand étonnement de nos hommes, il n’y avait pas de sentinelles devant la forteresse et les deux portes étaient restées grandes ouvertes, ce qui leur permit de pénétrer par les deux côtés et d’encercler facilement l’ennemi. Au signal donné, hache et casse-tête en main, ils se jetèrent sur les habitants endormis qu’ils défirent presque sans opposition. Vingt-sept hommes furent faits prisonniers et une cinquantaine de chevaux furent ramenés, alors qu’on laissa indemnes soixante femmes et enfants. Nos hommes épargnèrent aussi, à votre demande expresse, le nommé Alexander Glen , avec sa famille, parce qu’il avait sauvé la vie de plusieurs prisonniers français tombés aux mains des Agniers.
    Les sieurs d’Iberville et de Manthet commandèrent les troupes avec beaucoup de savoir-faire, et la victoire leur est en grande partie imputable. Monsieur d’Iberville fit des miracles pour calmer nos alliés indiens et les empêcher de torturer les prisonniers ou d’abattre ceux qui ne pouvaient pas avancer assez vite. Cette bataille ne nous coûta que deux vies, et cela aurait été un succès complet si la trentaine d’Agniers présents à Schenectady et libérés selon vos ordres n’avaient couru à Albany chercher du renfort. Avec une cinquantaine de jeunes Anglais, ils se jetèrent à la poursuite des nôtres, qu’ils rejoignirent tout près de Montréal. Ils tuèrent ou firent prisonniers quinze hommes, d’après le décompte sommaire que m’en firent mes éclaireurs.
    Il s’agit tout de même d’une glorieuse victoire qui remontera certainement le moral de nos troupes.
    Callières parapha puis cacheta, satisfait à l’idée de pouvoir confondre Frontenac. Il comptait sur le temps pour lui ouvrir les yeux, tout en se chargeant de lui souligner à chaque occasion les dangers de sa politique de pacification iroquoise. Mais la victoire de Schenectady n’en était pas moins manifeste et Callières se réjouissait de voir les colonies anglaises confrontées à leur tour à la guerre à l’indienne. Il n’eut aucune difficulté à imaginer la désolation et la terreur qui avaient dû s’emparer des populations de l’État de la Nouvelle-York et des environs, au lendemain du pillage.
    Dès son retour en poste, Callières avait fait entreprendre l’érection d’une nouvelle palissade autour de Montréal, des travaux dont il avait surveillé quotidiennement l’évolution. Les corvées avaient été distribuées et quiconque tentait de s’y dérober risquait gros. L’heure n’était plus aux tergiversations. Il entendait faire comprendre aux civils comme aux militaires que la situation nécessitait des mesures extraordinaires et que chacun devait faire sa part pour assurer sa sécurité et celle des autres. Pour mettre en sûreté les habitations les plus dispersées, il avait fait construire dans chaque seigneurie des redoutes et des réduits faits de pieux de treize à quatorze pieds de long, afin de permettre aux soldats et aux habitants de s’y réfugier. Et chaque fortin avait reçu un canon pour avertir les voisins en cas d’alerte. Les gens devaient y dormir chaque nuit, jusqu’à nouvel ordre. Quant aux fameuses patrouilles volantes de Frontenac, elles servaient à repousser les attaques et à mener des incursions

Weitere Kostenlose Bücher