Furia Azteca
n'était pas un secret extraordinaire, mais je n'ai pas dit que c'était un travail facile à faire ou facile à imiter. Par exemple, il faut que la roche soit toujours parfaitement centrée quand on la meule.
C'est mon arrière-grand-père Xibalb‚ qui m'a appris à le faire. "
Je sentis de la fierté dans sa voix. Il avait beau paraître indifférent au sujet des secrets de son art, j'étais certain qu'il ne les révélerait à
personne en dehors de sa descendance. C'était exactement ce que je souhaitais, que les Xibalb‚ soient les seuls à posséder cette science, que les cristaux restent inimitables et que je puisse en acheter une quantité
suffisante...
Je lui dis alors, en feignant d'hésiter : " Je pense... je crois... je pourrais peut-être les vendre comme curiosités à Tenochtitl‚n ou à
Texcoco... Je n'en suis pas s˚r, mais les scribes, pour exécuter leurs pictogrammes avec plus de précision... "
Les yeux du maître s'éclairèrent d'une lueur malicieuse pendant qu'on lui traduisait ma réponse. " Combien de cristaux voudriez-vous en gros ? "
Je cessai alors ma petite comédie et je lui déclarai en souriant : " Cela dépend de la quantité que vous pourrez me fournir et du prix que vous m'en demanderez.
- Vous voyez,là tout mon stock de pierres brutes. " II me montrait l'unique mur de son atelier complètement recouvert par des étagères du sol au plafond, o˘ s'alignaient, enrobés dans des boules de coton, les quartz bruts. Leur seul caractère distinctif était cette forme à six pans qu'ils ont quand on les découvre dans le sol.
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Ils étaient rangés par taille, depuis celle d'un ongle jusqu'à celle d'un petit épis de maÔs.
" Voici ce que j'ai payé pour tout ça ", poursuivit l'artisan en me tendant une feuille de papier d'écorce couverte de plusieurs colonnes de chiffres et de symboles. J'étais en train de faire le total dans ma tête, quand il me dit : " Avec cet assortiment, je peux faire six vingtaines de cristaux taillés de grosseur différente.
- Vous en aurez pour combien de temps ?
- Un mois.
- Vingt jours ? m'exclamai-je. Je croyais qu'il en fallait autant pour un seul cristal !
- Les Xibalb‚ ont des faisceaux d'années d'expérience derrière eux et j'ai sept fils qui sont mes apprentis et qui m'aident. J'ai également cinq filles, mais elles n'ont pas le droit de toucher aux pierres. Elles les abîmeraient, et ne sont que des femmes.
- Six vingtaines de cristaux, murmurai-je d'un air rêveur, en reprenant sa façon provinciale de compter. Et combien me prendrez-vous pour le tout ?
- C'est écrit là, me répondit-il en me montrant le papier.
- Ai-je bien compris ? demandai-je, suffoqué, à l'interprète. Il vient de dire que c'est ce qu'il a payé pour les pierres brutes ? " Ce dernier me fit signe que oui et je m'adressai à nouveau au cristallier par son intermédiaire.
" C'est insensé. Même un marchand qui vend ses tortillas dans la rue fait payer ses galettes plus cher que le prix du maÔs. " L'artisan et l'interprète me souriaient avec bonhomie en secouant la tête. " Maître Xibalb‚, insistai-je, je m'étais préparé à marchander, mais non à vous voler. Je dois vous dire honnêtement que je m'attendais à devoir payer huit fois ce prix, que j'aurais été satisfait si vous l'aviez multiplié par six et ravi si vous ne m'en aviez demandé que quatre fois plus.
- Et moi, je suis obligé de refuser.
- Au nom de vos dieux et des miens, pourquoi donc ?
- Parce que vous êtes l'ami des Macoboô, donc vous êtes aussi l'ami de tous les Chiapa et nous, les
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Xibalb‚, nous sommes des Chiapa de souche. Ne protestez pas. Profitez donc de votre séjour chez nous et revenez chercher vos cristaux dans un mois. "
" Notre fortune est faite ! " Gourmand de Sang exultait en jouant avec l'échantillon que m'avait donné l'artisan. " Pas la peine d'aller plus loin. Par le grand Huitzitli, vous allez pouvoir revendre ces pierres le prix que vous voudrez !
- C'est possible, dis-je, mais nous avons un mois devant nous et il nous reste des marchandises à négocier. De plus, j'ai des raisons personnelles de vouloir aller chez les Maya.
- Ces femmes Chiapa ont peut-être la peau noire, mais elles surpassent de loin toutes les Maya, grommelait-il.
- Vieux débauché, est-ce que vous ne pouvez pas penser à autre chose ? "
Cozcatl pour qui les femmes étaient le cadet des soucis suppliait : " Oh, oui, il faut continuer. Ce n'est pas la peine
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