Furia Azteca
pour que vous puissiez vous construire une ville. Une ville dans un pays agréable et prospère, regorgeant de nourriture autre que le
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poisson et vous aurez même des esclaves pour vous servir. "
II restait inflexible. " Le dieu ne le permettra jamais. On ne peut pas vendre la pourpre. " Puis, il ajouta : " On ne mange pas que du poisson, Oil Jaune. "
II me montra en souriant les quatre prêtres assis autour d'un feu. Deux cuisses d'hommes embrochées sur ma lance étaient en train de rôtir. On ne voyait aucun autre signe de la dépouille du pêcheur. Je me maîtrisai pour ne pas trahir mon trouble et je pris dans mon pagne le paquet de poudre d'or que je laissai tomber à terre entre le chef des prêtres et moi.
" Ouvrez-le avec précaution, lui dis-je, pour que le vent ne la fasse pas s'envoler. " Tandis qu'il s'agenouillait pour déplier le tissu, je poursuivis : " Si je pouvais remplir ma pirogue avec votre pourpre, je reviendrais avec un chargement d'or presque égal. Je vous propose tout cet or-là en échange du nombre de flacons que je pourrais emporter dans mes deux bras. "
II avait défait le paquet et le tas de poudre scintillait à la lueur des étoiles. Ses quatre compères s'approchèrent pour venir reluquer l'or pardessus son épaule. Il fit couler un peu de poudre entre ses doigts, puis prenant le paquet à deux mains, il le soupesa avec précaution. Soudain, il me dit sans me regarder : " Si vous nous donnez cet or pour la pourpre, combien nous donnerez-vous en échange de la fille ?
- quelle fille ? demandai-je, en sentant mon cour chavirer.
- Là, derrière vous. "
Je jetai un rapide coup d'oeil en arrière. Zyanya était là, l'air consterné
et à quelques pas derrière elle, je vis six ou sept autres Zy˘ qui allongeaient le cou pour essayer d'apercevoir la poudre d'or. Le prêtre était toujours à genoux, le paquet entre les mains. Je me retournai en balançant mon macquauitl. Le paquet et les mains qui le tenaient tombèrent sur le sol et le prêtre vacilla à peine, semblant hypnotisé par le sang qui jaillissait de ses poignets coupés.
Tout le monde se précipita vers lui - était-ce pour s'emparer de la poudre ou pour venir à son secours, je
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ne sais - et au même moment, je pivotai sur moi-même et, saisissant la main de Zyanya, je fendis le cercle des hommes et l'entraînai dans une course éperdue sur le rebord de la falaise, du côté est.
Nous e˚mes tôt fait d'échapper à la vue des Zy˘ et alors je bifurquai brusquement sur la gauche pour me glisser avec Zyanya parmi des blocs plus hauts que nous. Les Zy˘ allaient partir à notre poursuite et ils penseraient que nous nous dirigerions vers la pirogue. Mais je savais que même si nous avions pu l'atteindre et la mettre à flot, je serais incapable de la manouvrer et que nos poursuivants nous rattraperaient simplement en courant après nous dans l'eau.
Nous en vîmes plusieurs passer en courant et en criant devant notre cachette, en direction de la plage, comme je l'avais escompté. " Et maintenant, là-haut ! " murmurai-je à Zyanya. Elle ne perdit pas de temps à
me demander pourquoi et elle me suivit. Le promontoire était constitué en grande partie de roches dénudées et il nous fallait avancer prudemment entre les fissures et les crevasses pour ne pas être vus de ceux qui étaient en bas. Au sommet de la montagne, poussaient des arbres et des buissons dans lesquels nous pourrions nous dissimuler. Mais ce vert refuge était encore loin et je craignais que les oiseaux ne signalent notre position. A chaque pas, nous faisions fuir des bandes entières de pélicans, de mouettes et de cormorans.
Soudain, je m'aperçus que les oiseaux ne s'envolaient pas seulement autour de nous, mais aussi de toutes parts sur la falaise et qu'il y avait également des espèces terrestres : perroquets, pigeons, roitelets qui pépiaient et voletaient en tous sens. Et pas seulement des oiseaux, mais des animaux craintifs ou nocturnes faisaient eux aussi leur apparition : iguanes, tatous, serpents de rocher, un ocelot, même, fila devant nous sans nous regarder. Comme nous, toutes les bêtes fuyaient vers le sommet de la colline. Et puis, bien qu'il ne fît pas encore nuit, on entendit l'appel funèbre du coyote venant des hauteurs et, pas très loin au-dessus de nos têtes, une crevasse vomit un vol sinueux de chauves-souris. Alors, je 510
compris ce qui se préparait : une de ces secousses si fréquentes dans cette
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