Furia Azteca
m'efforçai donc de ravaler ma bile, d'oublier le passé en pensant à un avenir o˘ il n'y aurait plus de sang versé, plus de chagrins, plus de rancunes et plus de dangers. Avec Zya-nya, je consacrai toute mon énergie à la construction de notre maison.
Le terrain que nous avions choisi nous avait été offert par l'Orateur Vénéré comme cadeairde mariage. J'avais accepté alors ce présent et j'aurais été bien maladroit de le refuser après le différend qui nous avait opposés, mais en réalité, je n'avais pas besoin qu'on me fasse des cadeaux.
Les anciens pochteca avaient tiré un si habile parti des marchandises que j'avais rapportées de ma première expédition, que même après en avoir partagé les bénéfices avec Cozcatl et Gourmand de Sang, je me trouvai assez riche pour pouvoir mener une existence confortable, sans avoir à m'engager dans de nouvelles affaires et j'aurais très bien pu vivre de mes rentes.
Mon second voyage avait aussi augmenté ma fortune d'une manière prodigieuse. Si les cristaux avaient connu un remarquable succès commercial, les objets sculptés par maître Tuxtem avaient produit une véritable sensation et provoqué de folles surenchères dans la noblesse. Les prix atteints par ces articles auraient pu nous permettre, à Cozcatl comme à moi, de ne plus rien faire jusqu'à la fin de nos jours et de devenir aussi bouffis, satisfaits et sédentaires que nos aînés de la Maison des Pochteca.
J'avais choisi avec Zyanya un emplacement à Ixa-cu‚lco, le quartier le plus résidentiel de l'île, mais le terrain était déjà occupé par une vilaine maison en adobe. J'engageai un architecte pour la démolir et construire à
la place un solide édifice de calcaire qui ferait à la fois une maison confortable pour nous et un spectacle agréable pour les passants, sans pour cela être ostentatoire. …tant donné que le terrain était exigu, comme tous ceux de l'île, je lui dis de construire en hauteur pour gagner de la place.
Je voulais un jardin en terrasse, des cabinets de toilette intérieurs avec un système d'évacuation par eau et, dans une pièce, une fausse cloison derrière laquelle on aménagerait une cachette spacieuse.
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Pendant ce temps, sans faire appel à moi, Ahuizotl se mit en marche vers l'Huaxyacac. Il n'avait pas pris la tête d'une armée nombreuse, mais il avait constitué une troupe d'élite d'à peine cinq cents hommes choisis parmi ses meilleurs guerriers. Il laissa son Femme-Serpent pour le remplacer pendant son absence et emmena pour le seconder un jeune homme dont le nom est familier aux oreilles des Espagnols. C'était Motecuzoma Xocoyotzin, ce qui veut dire le cadet. Il avait en fait une année de moins que moi. C'était le neveu d'Ahuizotl et le fils de l'ancien Uey tlatoani Axayacatl, et par conséquent le petit-fils du premier et du grand Motecuzoma. Jusqu'à présent il avait été grand prêtre du dieu de la guerre Huitzilopochtli et c'était sa première campagne. Il devait en faire beaucoup d'autres par la suite, car il abandonna la prêtrise pour la carrière des armes, avec, bien s˚r, un très haut grade de commandement.
Un mois environ après le départ des troupes, les messagers d'Ahuizotl commencèrent à arriver régulièrement et le Femme-Serpent fit connaître publiquement les nouvelles qu'ils apportaient. D'après les premières informations, je me rendis compte que l'Orateur Vénéré avait suivi mon conseil. Il avait fait prévenir le bishôsu du Huaxyacac de son arrivée prochaine et, comme je l'avais prévu, celui-ci lui avait fait très bon accueil et lui avait fourni un nombre égal de soldats. Les forces conjuguées des Zapoteca et des Mexica avaient envahi la côte désolée peuplée par les …trangers et ils eurent tôt fait d'en terminer avec eux, après en avoir massacré un assez grand nombre pour que ceux qui restaient se rendent et consentent à livrer la teinture pourpre si jalousement gardée.
Malheureusement, les messagers suivants apportèrent des nouvelles moins réjouissantes. Les Mexica victorieux étaient stationnés à Tehuantepec, tandis qu'Ahuizotl et son homologue Kosi Yuela discutaient dans cette même ville sur des affaires d'…tat. Les soldats, habitués depuis toujours à
piller les pays vaincus, furent déçus et indignés quand ils apprirent que leur propre chef avait cédé le seul butin visible - la précieuse teinture -
au chef de cette même nation. Ils eurent l'impression de
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