Furia Azteca
venir chez nous. Le départ de Chatouilleuse est un bien petit malheur, dieu merci, mais ça nous fait un prétexte. On va avoir besoin d'une autre femme dans la maison. Oh, Zaa, demandons-lui !
- C'est une bonne idée ", lui répondis-je. Je n'étais pas très enthousiaste à l'idée de recevoir l'acari‚tre Béu, surtout en de telles circonstances, mais j'aurais fait n'importe quoi pour faire plaisir à Zyanya. " Je vais lui envoyer une invitation tellement suppliante qu'elle ne pourra pas refuser ", lui dis-je.
Je la fis porter par les sept soldats qui m'avaient jadis accompagné dans le Sud, pour que Béu ait une escorte de protection au cas o˘ elle accepterait de venir à Tenochtitlan. Elle ne fit aucune difficulté, mais il lui fallut un certain temps pour régler avec ses serviteurs et ses esclaves les problèmes de la gestion de l'auberge. Pendant ce temps, j'avais organisé avec Zyanya une grandiose cérémonie de mariage pour Cozcatl et quequelmiqui et ils s'en allèrent vivre chez eux.
L'hiver était déjà bien avancé quand les sept soldats nous ramenèrent Béu.
J'étais aussi anxieux qu'heureux de constater l'état de Zyanya. Elle était devenue très forte - trop à mon avis - elle commençait à avoir des petites douleurs, à être irritable et à éprouver une certaine angoisse. Elle m'assurait maussadement que tout
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cela était parfaitement normal, mais je m'en inquiétais et ne cessais de tourner autour d'elle en essayant de me rendre utile, ce qui l'énervait encore davantage.
" Béu ! s'écria-t-elle. Comme je suis contente que tu sois venue et j'en remercie Uizye Tao et tous les autres dieux. " Elle se jeta dans ses bras comme on accueille une libératrice. " Tu m'as sauvé la vie ; ici on me dorlote à mort ! "
On avait porté les bagages de Béu dans la chambre d'hôte, mais elle passa la plus grande partie de la journée dans la nôtre dont je me trouvai, par conséquent, exclu et je traînais dans la maison avec le sentiment d'être inutile et mis à l'écart. Dans la soirée, Béu descendit seule et tandis que nous buvions du chocolat, elle me dit sur un ton de conspiratrice :
" Zyanya va arriver à un moment o˘ il va falloir que tu renonces à... tes prérogatives d'époux. qu'est-ce que tu vas faire pendant ce temps ? "
Je fus sur le point de lui répondre que cela ne la regardait pas, mais je me contentai de lui dire : " Je pense que j'arriverai à survivre.
- Il ne serait pas convenable que tu aies recours à une étrangère ", insista-t-elle.
Irrité, je me levai et lui répliquai sèchement : " Cette continence ne me réjouit pas, mais...
- Mais tu crains de ne pas trouver une remplaçante valable ? " Elle pencha la tête comme si elle attendait vraiment une réponse. " Parce que tu ne peux trouver une fille aussi belle qu'elle dans tout Tenochtitlan ? Alors tu m'as envoyée chercher à Tehuantepec ? " Elle sourit et s'approcha tout près de moi. " Je lui ressemble tant que tu as pensé que je pourrais faire un substitut acceptable, c'est bien ça ? " Elle jouait malicieusement avec l'agrafe de mon manteau, comme si elle avait voulu la défaire. " Tu sais, Zaa, bien que nous soyons sours et que nous nous ressemblions beaucoup, nous ne sommes pas tout à fait pareilles. Au lit, tu verras peut-être des différences. "
Je la repoussai d'une main ferme. " Je te souhaite un agréable séjour chez nous, Béu Ribé. Si tu ne peux vraiment pas dissimuler ton aversion à mon égard, épargne-619
moi, au moins, tes hypocrites coquetteries. On pourrait peut-être essayer de s'ignorer. "
Son visage s'embrasa, comme si je l'avais surprise en train de faire une chose indécente et elle se frotta la joue comme si je l'avais giflée.
Senor …vêque Zumarraga, c'est un grand honneur que vous me faites de revenir parmi nous. Votre Excellente arrive juste au moment o˘ j'allais annoncer - avec autant de fierté que je l'ai fait il y a tant d'années - la naissance de ma fille bien-aimée.
Toutes mes craintes s'étaient heureusement révélées sans fondement.
L'enfant fit preuve d'intelligence, avant même d'entrer dans la vie, car elle attendit prudemment que les jours néfastes soient passés pour sortir du ventre de sa mère ; elle naquit le jour Ce Malinali, ou Une Herbe, du premier mois de l'année Cinq Maison. J'avais alors trente et un ans, un ‚ge un peu avancé pour fonder une famille, mais je me rengorgeai et me pavanai autant que les hommes plus jeunes, comme si
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