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Galaad et le Roi Pêcheur

Galaad et le Roi Pêcheur

Titel: Galaad et le Roi Pêcheur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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verger, s’enfonça dans la forêt, bien décidé à poursuivre la quête et à repousser l’image de la dame qui bouleversait étrangement son cœur.
    Pendant ce temps, Brunissen, toujours en proie à d’atroces tourments, était revenue dans sa chambre et s’était allongée, mais l’amour la brûlait si fort qu’elle ne pouvait trouver de repos. Elle ne faisait rien d’autre que se tourner et se retourner, et sa pensée sans cesse la ramenait au chevalier qui s’était permis de dormir au verger. Oh ! comment pourrait-elle le retenir à ses côtés ? Elle se tortura de la sorte jusqu’à ce que la nuit eût cédé place au jour. Alors, sur la tour, le guetteur lança son appel. Aussitôt, les gens du manoir se réveillèrent et recommencèrent à se lamenter. Dans la forêt où il chevauchait au plus vite, Girflet entendit leurs cris et leurs lamentations, lesquels étaient si forts et si terrifiants qu’il galopa au petit bonheur, sans suivre chemin ni sentier, sans même se soucier, tant il se sentait éperdu, de savoir où il allait. Puis les cris cessèrent brusquement, et le soleil se mit à monter dans le ciel.
    Alors, Brunissen ne put se retenir d’entrer dans la salle où l’on retenait captif l’homme qui l’avait tant impressionnée. Elle en demanda des nouvelles à l’un des chevaliers. « Dame, répondit-il, sois certaine que tu ne le reverras plus vivant. – Comment cela ? s’écria-t-elle. – Dame, reprit l’homme, il a, cette nuit, lorsque nous nous lamentions, posé la question interdite à propos de notre coutume {23} . Aussi l’avons-nous frappé tant et plus, de sorte qu’il doit être mort à présent. » Brunissen sentit son cœur défaillir. Se précipitant vers le lit, elle en arracha les couvertures, pensant découvrir le cadavre de celui qu’elle aimait d’un amour insensé. Mais rien ni personne ne se trouvait là. Alors, elle se mit à hurler, ameutant tous ses gens qui ne manquèrent pas d’accourir et de l’entourer.
    « Barons félons ! s’écria-t-elle, vous m’avez trahie ! Où est allé ce chevalier ? Par Dieu, malheur à vous pour l’avoir laissé fuir ! Je ne plaisante pas : dussent cent mille diables l’avoir emporté en enfer, vous me le rendrez, ou je vous ferai tous pendre par la gorge ! Allez, allez vite, que chacun s’équipe et parte à sa recherche ! Je vous l’avais confié, il vous appartient de me le rendre par tous les moyens, car sans cela jamais je ne ferai ma paix avec vous ! » Et, sans ajouter un mot, Brunissen regagna sa chambre. Elle se jeta tout habillée sur son lit et se mit à pleurer avec autant de rage que d’amour, amèrement.
    Le jour brillait bien clair lorsque le fils de Dôn rencontra, sur sa route, un bouvier menant un char empli de victuailles et que tiraient quatre bœufs. L’homme le salua aimablement et lui dit : « Chevalier, tu sembles bien las et affamé. Si tu le souhaites, je te donnerai à manger, et tu te reposeras un instant en ma compagnie. – Bien volontiers, répondit Girflet, car voilà une éternité que je n’ai mangé. » Le bouvier lui tendit du pain et de la viande salée qu’il ne tarda guère à avaler. « Et où vas-tu ainsi, brave homme ? demanda Girflet. – Je vais au manoir de Monbrun, répondit le bouvier, afin d’y livrer ces vivres. Tel est mon rôle, et je m’y rends tous les deux jours, car il y a beaucoup de monde à Monbrun. Il faut donc y livrer force nourriture. – Monbrun… Monbrun…, dit Girflet, ainsi se nomme donc le manoir qui se trouve dans la forêt, au milieu d’un grand verger ? – Oui, seigneur chevalier, pas très loin d’ici. Tu as dû en apercevoir la grande tour en passant dans la forêt. » Girflet demeura un instant songeur, puis demanda : « Brave homme, sais-tu qui est le maître de ce domaine ? – Certes, répondit le bouvier. C’est une femme, une jeune fille d’une grande beauté que l’on appelle Brunissen. Elle a à son service de nombreux vassaux, chevaliers et barons de haute naissance, qui ne tarissent pas d’éloges sur elle. On dit que, lorsqu’on a vu une fois la belle Brunissen, on ne peut l’oublier de sa vie. – Mais, dis-moi, brave homme, que sais-tu des cris et des lamentations qu’on entend à Monbrun ? Quelle est donc la cause de ce chagrin et de cette affliction ? »
    À ces mots, le visage du bouvier devint rouge de colère. « Comment oses-tu poser cette question ? s’écria-t-il. Maudit

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