Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
George Sand et ses amis

George Sand et ses amis

Titel: George Sand et ses amis Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Albert le Roy
Vom Netzwerk:
style, un coloris brillant, digne des plus belles pages que l'auteur de Jacques a écrites depuis, a produit une impression impossible à décrire.»
    Michel (de Bourges) poursuit victorieusement. Il rappelle les procédés grossiers de M. Dudevant traitant Aurore de folle, radoteuse, bête, stupide. Cet homme n'avait pas le talent de la divination. Il n'était que cupide, «faisant à sa femme une modique pension, tandis qu'il jouissait, dans l'opulence et dans une vie licencieuse, sous le toit qui appartenait à sa femme, d'une fortune qui était à elle.» N'acceptait-il pas sa situation maritale, au point de mander à madame Dudevant, en décembre 1831 : «J'irai à Paris ; je ne descendrai pas chez toi, parce que je ne veux pas te gêner, pas plus que je ne veux que tu me gênes ?» Et l'avocat déduit avec force cette conclusion hardie : «Le pardon que vous offrez à votre femme est un outrage ; c'est vous qui l'avez offensée.» Il insiste sur la requête du 14 avril, véritable monument de démence judiciaire, où sont articulés «des faits atroces, des faits qu'aucune bouche humaine n'a osé répéter dans leur hideuse nudité, dans leur révoltante difformité.» Cette épouse qu'on a accusée d'être une Messaline, capable de dépraver son fils, on lui offre le retour au foyer domestique. On parle de pardonner, alors qu'on a besoin de pardon. «N'est-ce pas vous, dit Michel (de Bourges) dans un bel élan oratoire, vous qui l'avez forcée à quitter le domicile conjugal en l'abreuvant de dégoûts ? Vous n'êtes pas seulement l'auteur des causes de cette absence, vous en êtes l'instigateur et le complice.
    N'avez-vous pas livré votre femme, jeune et sans expérience, à elle-même ? Ne l'avez-vous pas abandonnée ? Vous ne pouvez plus dire aux magistrats : «Remettez dans mes mains les rênes du coursier,» quand vous-même les avez lâchées. Pour gouverner une femme, il faut une certaine puissance d'intelligence ; et qu'êtes-vous, que prétendez-vous être, à côté de celle que vous avez méconnue ? Quand une femme est près de succomber, il faut être capable de la relever ; quand elle est faible, il faut la soutenir, être capable de lui donner le bon exemple ; et quel exemple pouvez-vous lui donner ? Pouvez-vous réclamer une femme que vous avez délaissée pendant huit ans ? Etait-elle coupable, celle qui épanchait sa belle âme tout entière dans cette lettre que vous-même venez de livrer à la publicité des débats ? Ils étaient donc bien faibles ses torts, puisque vous êtes réduit à les chercher dans cette lettre qui la justifie ? Depuis, vous avez reçu votre femme, vous lui avez écrit, vous avez vécu intimement avec l'ami honnête et pur qui sut la respecter ; vous lui avez serré la main. Pourquoi donc avez-vous délaissé, une épouse qui ne méritait aucun reproche ?»
    Aucun reproche ? C'est aller un peu loin ; mais nous sommes à l'audience, et c'est un avocat qui parle. Il se lance dans les réminiscences historiques. Mirabeau, pour un moindre outrage, fut débouté, lorsqu'il redemandait sa femme au Parlement de Provence, «faisant à la face du ciel et des hommes amende honorable d'une jeunesse désordonnée et plus égarée que coupable.» Dans quelles conditions M. Dudevant se présente-t-il au sanctuaire de la justice ? Est-ce le coeur humilié et repentant, la tête courbée par la douleur et couverte d'un voile ? Non, c'est l'invective à la bouche.
    «Et  vous osez réclamer votre femme ! continue Michel (de Bourges). Et vous osez appeler une nécessité de la défense ces diffamations ! Vous la demandez, et vous lui fermez le chemin de la couche nuptiale ; vous la demandez, et pour arc-de-triomphe, dans cette maison toute pleine des souvenirs de vos fureurs, vous lui préparez un pilori où vous inscrivez son déshonneur en caractères indélébiles... Vous la réclamez d'une main, et de l'autre vous lui enfoncez un poignard dans le sein. Mais vous dites que vous la voulez ; non, vous ne la voulez pas ! Vous n'oseriez pas dire cela sérieusement en face de la Cour. La voulez-vous avec vous, voulez-vous cohabiter avec elle, la garder ? Dites-le, si vous l'osez !»
    Michel (de Bourges) couronne sa plaidoirie en réfutant les griefs d'indignité maternelle imputés à madame Dudevant : «Parce qu'une femme cède aux caprices de sa lyre, aux inspirations d'un esprit créateur, vous la croiriez incapable d'élever ses enfants ?» A ce

Weitere Kostenlose Bücher