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Gisors et l'énigme des Templiers

Gisors et l'énigme des Templiers

Titel: Gisors et l'énigme des Templiers Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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qui ne supportent pas la représentation
de Dieu dans leurs sanctuaires. Et que dire des différents « objets de piété » ?
Assurément, pour qui ignore la doctrine chrétienne, il y a, dans les cérémonies
de l’Église catholique romaine, bien des éléments idolâtres. D’ailleurs, pour
être juste, il convient de rappeler que les cérémonies catholiques ont beaucoup
emprunté aux cultes religieux dits païens de l’Antiquité et du haut Moyen Âge.
C’est dire qu’il convient d’examiner avec beaucoup de prudence les accusations
lancées par les sbires de Philippe le Bel au sujet des pratiques idolâtres des
Templiers.
    Il faut d’abord se référer aux divers témoignages recueillis
durant les interrogatoires du procès. Voici ce que déclare, sans avoir été
torturé, Hugues de Pairaud, le second personnage du Temple : « Cette
tête humaine, je l’ai vue, tenue et palpée à Montpellier, lors d’un chapitre,
et je l’adorai ainsi que tous les autres frères présents, mais c’était de la bouche
et par feinte, non pas du cœur. » Voilà un aveu étrange. À moins que les
paroles d’Hugues de Pairaud ne soient une feinte destinée à entraîner les Inquisiteurs sur une fausse piste.
    Il s’agit d’une tête, ou plutôt de la représentation d’une
tête que l’on détenait dans chaque commanderie, disait-on, et que l’on sortait
parfois lors de la réunion des chapitres en un endroit secret et clos. Alors,
les assistants devaient rendre un culte à cette tête. Quant à savoir ce qu’elle
représentait réellement, c’est un autre problème : les avis diffèrent
largement. D’après le frère Raynier de Larchant, il s’agit d’une tête avec une
barbe. Il reconnaît l’avoir vue une douzaine de fois, et précise que tous les
frères présents « l’adorent, la baisent et l’appellent leur
Sauveur ». Si cela est vrai, les Templiers étaient effectivement des
idolâtres.
    Mais ce n’est pas tout. Voici le témoignage de Guillaume
d’Herblay, aumônier du roi : « Quant à la tête, je l’ai vue lors des
deux chapitres que tint le frère Hugues de Pairaud, visiteur de France. J’ai vu
les frères l’adorer, mais jamais de cœur. Je crois qu’elle est en bois,
argentée et dorée à l’extérieur… Il me semble qu’elle a une barbe ou une espèce
de barbe. » Pour un autre frère, Hugues de Bure, « ce n’était pas du
bois, mais de l’argent peut-être, ou bien de l’or ou du cuivre. Cela
ressemblait à une tête humaine, avec une figure et une longue barbe ».
Mais, pour le frère Barthélémy Boucher, « cela ressemblait à une tête de
Templier, avec un bonnet, une barbe blanche et longue », tandis que pour
Hugues de Pairaud, dans une autre déclaration, « cette tête avait quatre
pieds, deux par devant et deux par derrière ». On a plutôt l’impression
que le Grand Visiteur de France se payait la tête de ceux qui l’interrogeaient.
Toujours selon Guillaume d’Herblay, cette tête prend une allure
fantastique : « J’ai entendu dire que c’était là la tête d’une des
onze Mille Vierges [47] .
Mais je crois maintenant que c’était une idole. Elle avait deux visages, d’un
aspect terrible. Sa barbe était d’argent. » L’aspect terrifiant est
accentué par le frère Raoul de Gisy, receveur de Champagne : « Cette
tête, je l’ai vue lors de sept chapitres… On la présente, et tout le monde se
prosterne à terre, enlève son capuce et l’adore… Sa figure est terrible, il me
semblait que c’était la figure d’un démon, d’un maufé [48] .
Chaque fois que je la regardais, une si grande terreur m’envahissait que je
pouvais à peine la regarder, en tremblant de tous mes membres. » On fit
alors observer au frère que c’était une très vilaine action que d’adorer une
idole. Il répondit : « On avait bien fait pis en reniant Jésus, on
pouvait bien adorer la tête à présent. » Visiblement, les frères templiers
ne comprennent pas grand-chose au rituel auquel on les oblige d’assister. Il se
passe donc quelque chose dans ces fameux chapitres secrets, mais aucun des
assistants n’est capable d’expliquer exactement de quoi il s’agit.
    Il figure beaucoup d’autres descriptions de ce genre dans
les dépositions. Retenons encore celle du frère Bartholomée Rocherii, le
19 avril 1311 : « Je fus reçu dans la grande chapelle du
Temple de Paris. Après mon adoubement, on me fit entrer dans une

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