Gisors et l'énigme des Templiers
celle-ci. Ce dernier thème paraît bien
être d’inspiration templière et rappelle le sceau figurant les deux cavaliers
sur un même cheval. Nous y retrouvons le groupe ternaire et la symbolique
alchimique traditionnelle. Reste à savoir quel sens pouvaient lui donner les
artistes qui travaillaient pour les Templiers. On y a vu, bien sûr, une
représentation du Graal. Mais cela n’est guère convaincant : chaque fois
qu’on aperçoit un vase ou une coupe sur un monument prêtant à commentaire, on
l’assimile immanquablement au Graal sans trop savoir ce qu’est exactement cet
illustre « saint » Graal.
Certaines de ces chapelles contiennent des peintures dont il
nous reste quelques exemples. Les plus célèbres sont celles de la chapelle de
Cressac (Charente), qui représentent des cavaliers en armes luttant contre des
Sarrazins. Mais ces cavaliers ne sont pas des Templiers, ce sont des Croisés
ordinaires. On distingue cependant, en retrait, trois chevaliers du Temple
sortant d’une ville. Ces fresques sont sans doute dues à un généreux donateur
soucieux d’immortaliser ses prouesses. En revanche, les fresques de l’église
San Bevignate de Pérouse, en Italie, semblent nettement l’œuvre des Templiers.
Mais on ne peut pas dire que ces peintures, comme les nombreux fragments
retrouvés ailleurs, soient caractéristiques d’un art proprement templier.
Seule, la fréquence de certains motifs permet d’y voir une influence du Temple.
Le thème de l’Annonciation et celui des deux oiseaux ont été
déjà signalés. Mais à ce dernier, il faudrait ajouter celui des deux serpents.
On trouve également de nombreuses représentations du soleil et de la lune, ce
qui n’offre rien d’original. Le motif de la cordelière rappelle évidemment le
geste rituel dénoncé par les accusateurs du Temple : cette cordelière que
l’on passait au cou de la soi-disant idole avant de la donner au nouveau frère.
On voit aussi en abondance de petites roses, ou plutôt des fleurs d’églantine,
et le lys, qui semble connaître une grande faveur. Mais, d’une façon générale,
il n’y a, dans les chapelles qui peuvent être attribuées à l’Ordre, rien de
vraiment remarquable qui puisse faire croire à l’existence d’une symbolique
particulière. Comme pour l’architecture, les Templiers ont utilisé, pour
transmettre certains messages codés, les mêmes méthodes et les mêmes figures
symboliques que les autres ordres monastiques et les différentes sociétés
initiatiques de leur époque.
On a beaucoup commenté les célèbres graffiti de la Tour
du-Coudray, dans le château de Chinon, ainsi que ceux découverts dans une tour
de l’enceinte de Domme (Dordogne). Ces graffiti, qui n’ont jamais eu
l’intention d’être des œuvres d’art, sont des témoignages intéressants, car ils
ont été gravés par d’authentiques Templiers retenus prisonniers. À Chinon,
c’étaient même Jacques de Molay et les principaux dignitaires de l’Ordre, ainsi
que quelques frères servants. Il y a donc là matière à réflexion.
On trouve ces graffiti dans des embrasures de la Tour du
Coudray et l’on y remarque des inscriptions, des armoiries et différents motifs
dont la valeur symbolique est réelle bien que leur signification puisse prêter
à discussion. Les principaux motifs sont des croix surmontant un cercle pointé
ou non ; le sceau de Salomon ; des sortes de S en spirale qui sont
sans aucun doute ce qu’on appelle le sol invictus , le
« soleil invaincu », symbole de la lumière divine cyclique, qui meurt
apparemment et qui surgit ensuite des ténèbres ; une figuration double qui
ressemble au yin-yang oriental ; des mains ; les trois points
caractéristiques des anciennes confréries de bâtisseurs ; trois cercles
pointés au centre, mais entrelacés ; des étoiles à huit raies serties dans
des carrés ou des écus que l’on nomme « escarboucles » en
héraldique ; un signe formé de deux triangles qui se rejoignent par la
pointe ; des espèces de croissants renversés ; et surtout des cœurs
rayonnants ou surmontés de renflements qui peuvent aussi bien être des
représentations schématisées de fleurs ou de flammes. Ce sont surtout ces cœurs
qui ont attiré l’attention des spécialistes.
En effet, le cœur rayonnant est, dans la religion
catholique, l’emblème du Sacré-Cœur. Mais à l’époque des Templiers, ce culte
n’était pas encore instauré de façon
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