Gisors et l'énigme des Templiers
côté-là.
Ce Prieuré de Sion se serait ainsi étendu à partir de
Jérusalem, mais de façon occulte, jusqu’au moment où ses dirigeants auraient
compris qu’il leur fallait, pour agir valablement, une organisation officielle
intégrée dans la vie quotidienne. C’est ainsi qu’aurait été fondé – sur l’ordre
de mystérieux « supérieurs » – le premier groupe des « Pauvres
Chevaliers du Christ », autrement dit le primitif Ordre du Temple. Et l’on
ajoute que trois des fondateurs, Hugues de Payns, Bisol de Saint-Omer et Hugues
de Champagne, faisaient eux-mêmes partie du Prieuré de Sion… Le Temple,
création « exotérique » d’un ordre ésotérique, devenait en quelque
sorte une milice qu’on envoyait dans le siècle, mais qui était soumise en tous
points au vénérable Prieuré de Sion, celui-ci se réservant de prendre les
décisions qui s’imposeraient et de définir les buts exacts que l’on
poursuivrait. Tout cela fait penser à l’intrigue d’un bon roman d’espionnage.
Mais qu’on ne s’y trompe pas : il y a, dans ce scénario, une partie religieuse
et métaphysique puisée à bonne source, même si elle aussi peut sembler parfois
quelque peu suspecte.
Le patronage de Jean n’étant pas suffisant pour asseoir
l’authenticité de la filiation, on y a donc mêlé tout ce qui concernait le
mystérieux Ormus, avec la tradition gnostique et bien entendu le mazdéisme
primitif : les « Sages de la Lumière » sont nécessairement les
Fils de la Lumière, autrement dit les descendants des zélateurs du grand dieu
iranien Ahura-Mazda, symbole de la Lumière qui mène le combat perpétuel contre
les forces obscures représentées par Ahrimane, celui que les Chrétiens ont
récupéré sous le nom de Satan. Et Ahura-Mazda est généralement plus connu en
Occident sous son nom contracté, Ormuzd. Quelle surprise de retrouver le grand
dieu des Perses dans le personnage plutôt mythique d’Ormus ! Le
syncrétisme est toujours payant en matière de religion, encore plus s’il s’agit
de religions dites « à mystères ». Il n’y a pas loin entre ce
« lumineux » Ormus-Ormuzd et l’ orme de
Gisors, et n’oublions pas celui de Paris, devant l’église Saint-Gervais, lieu,
paraît-il, très fréquenté par les Francs-Maçons. Mais les arbres n’ont-ils pas
toujours eu une valeur symbolique ?
Quoi qu’il en soit, on nous assure que le Prieuré de Sion,
après avoir créé le Temple, se fondit de façon discrète dans le nouvel ordre.
On nous affirme également que les frères d’Ormus, lorsque fut définitivement
perdu le royaume de Jérusalem, s’installèrent au grand prieuré de Saint-Samson
d’Orléans, que d’autres s’intégrèrent franchement aux Templiers, que d’autres
enfin entrèrent au petit prieuré du Mont-de-Sion, à Saint-Jean-le-Blanc, près
d’Orléans. Et c’est pourquoi, à partir de cette date, l’Ordre de Sion s’appela
le « Prieuré de Sion ». C’est là du moins ce que rapportent les
fameux « dossiers secrets ».
Mais ce n’est pas tout. En 1188, l’ orme fut brisé à Gisors. Ce n’est pas à la suite d’une querelle entre Philippe
Auguste et Henry II Plantagenêt, comme le croit le vulgaire abusé par les
historiens, que fut abattu cet orme. C’est au cours d’une véritable cérémonie
de rupture que l’événement eut lieu : la rupture entre les chevaliers du
Temple et le Prieuré de Sion. On nous explique les raisons de cette rupture, et
elles sont logiques. On sait en effet que lors de la perte de Jérusalem,
l’attitude des Templiers en général, et du grand-maître de l’ordre Gérard de
Ridefort, avait été plus que suspecte. On a accusé Ridefort d’avoir trahi, et
même d’avoir renié le Christianisme pour sauver sa vie. Rien ne peut être
prouvé à ce sujet, et le personnage de Gérard de Ridefort demeure assez
mystérieux. C’est un fait. D’après les « dossiers secrets », les
supérieurs inconnus du Prieuré de Sion auraient rendu le Temple responsable de
l’échec des Chrétiens : les Templiers avaient démérité, trahi leur mission
et en quelque sorte renié le plan qui avait été celui de Godefroy de Bouillon.
Ils auraient alors décidé de se séparer du Temple, de laisser celui-ci
poursuivre sa destinée sans qu’il puisse y avoir intervention de leur part, et
de se constituer à nouveau en ordre indépendant et secret. Étrange rupture, en
vérité, mais qui explique
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