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Grands Zhéros de L'Histoire de France

Grands Zhéros de L'Histoire de France

Titel: Grands Zhéros de L'Histoire de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Clémentine Portier-Kaltenbach
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où il est attendu de pied ferme car on l’y tient pour unique responsable de la honteuse journée de Rossbach. Tout Paris rit à ses dépens et s’égosille en chantant une ritournelle attribuée sans certitude à Voltaire, chanson intitulée Les Reproches de la Tulipe à Madame de Pompadour , dans laquelle il reproche à la favorite du roi de s’être entremise pour que soit placé un incompétent notoire à la tête de l’armée française :
     
    « Quand vous nommez pour la guerre,
    Certain général Barbichou,
    Il est normal que le militaire,
    Vienne un peu vous chercher des poux.
    […] Je l’aimais bien mon capitaine,
    Il est tombé percé de coups ;
    C’était un bon gars de Touraine,
    Il ne rira plus avec nous comprenez-vous ?
    Tous ces amis, chère Marquise,
    Seraient aujourd’hui parmi nous,
    Si vous n’aviez nommé Soubise,
    Cet incapable ! Ce filou ! »
     
    Dans la même veine, un poème va populariser l’image de Soubise cherchant désespérément son armée :
     
    « Soubise dit, la lanterne à la main,
    J’ai beau chercher, où diable est mon armée ?
    Elle était là pourtant, hier matin.
    Me l’a-t-on prise, ou l’aurais-je égarée ?
    Ah ! je perds tout, je suis un étourdi.
    Que vois-je ciel ! Que mon âme est ravie !
    Prodige heureux, la voilà ! La voilà !
    Eh ventrebleu ! Qu’est-ce donc que cela ?
    Je me trompais, c’est l’armée ennemie. »
     
    L’armée prend très mal la défaite de Soubise ; le général Dumouriez s’en fait le porte-parole en écrivant dans sa Galerie des aristocrates militaires et mémoires secrets ces mots sans pitié : « Conseillé par des fous, servi par des poltrons, Louis XV a reçu les plus sanglants affronts. Le prince de Soubise était le plus riche seigneur de France. Ce général est un fléau national, rien ne le rebute ; il a beau être déshonoré et flétri par les chansons, les brocards et les malédictions, il a une ambition constante et inaltérable ; les injures et les plaisanteries ont été poussées jusqu’à l’indécence, on en a fait un gros recueil, intitulé La Soubisade . »
     
    Alors que la France entière se rit de lui et le traite de « fléau national », Louis XV lui reste attaché indéfectiblement. Non seulement il ne prend aucune sanction après Rossbach contre son « ami de cœur », ainsi que l’on surnomme Soubise à la Cour, mais il le nomme ministre d’État en remplacement du ministre de la Guerre, lui alloue une pension considérable de cinquante mille livres, lui affecte un magnifique appartement de fonction à l’Arsenal et le décore du cordon bleu, distinction qui, compte tenu de l’amour de Soubise pour la cuisine, était peut-être de toutes les gratifications obtenues la seule qui fût vraiment méritée ! Mieux encore, Soubise est fait maréchal de France en 1758 et Louis XV lui confie une nouvelle armée pour lui permettre de faire oublier Rossbach. Il y parviendra d’ailleurs plus ou moins la dernière année de sa carrière militaire, en 1762, en faisant suivre sa défaite de Wilhelmstalh par sa victoire de Nauheim. Après quoi, ayant bien mérité ou démérité de la patrie, il put se contenter d’être ce qu’il aurait probablement toujours voulu, un courtisan voluptueux, mélomane passionné et gastronome.
    Léger, libertin, accumulant les aventures féminines, n’hésitant pas à s’afficher à cinquante-neuf, ans avec une demoiselle Zacharie âgée de quinze, Soubise fut cependant d’une loyauté et d’une fidélité inaltérables envers le roi. À la mort de Louis XV, le 10 mai 1774, il fut le seul de tous les courtisans à accompagner jusqu’à Saint-Denis la dépouille mortelle de son ami. Sur le parcours du convoi, ce ne furent que cris de joie, danses et rires de la foule, car le roi avait cessé depuis bien longtemps d’être le Bien-Aimé.
    Tout compte fait, Soubise est entré dans l’histoire aussi bien pour s’être ridiculisé sur le terrain militaire que pour s’être illustré sur celui de la bonne chère et de l’art de vivre. D’un point de vue français, cela ne vaut-il pas tous les exploits guerriers ? Dans une époque où il n’eût pas été contraint à devenir soldat, il eût sans nul doute préféré au sombre éclat des batteries de canons, le rutilement cuivré d’une batterie de cuisine. Mais allez faire comprendre ça à des Prussiens !
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    Comme on a pu en juger avec Soubise, devenir un zhéro plutôt qu’un héros aux

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