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Grands Zhéros de L'Histoire de France

Grands Zhéros de L'Histoire de France

Titel: Grands Zhéros de L'Histoire de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Clémentine Portier-Kaltenbach
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yeux de la postérité peut s’avérer une simple affaire de « timing ».
    Prenons l’exemple du marquis de La Fayette, le plus célèbre engagé volontaire français dans la guerre d’indépendance américaine. Major général à vingt ans, aimé comme un fils par George Washington, il se couvre de gloire aux États-Unis et devient en France une véritable idole. Il sera le héros du premier 14 Juillet de notre histoire, célébré au Champ-de-Mars lors de la fête de la Fédération, le 14 juillet 1790. Les Parisiens l’idolâtraient littéralement, le considérant comme « le fils aîné de la Liberté ». Mais cette popularité acquise trop jeune lui faisait perdre le sens des réalités. Très infatué de sa personne, il écrivait : « Ma situation est bien extraordinaire ; le peuple, dans le délire de son enthousiasme, ne peut être modéré que par moi. Quarante mille âmes s’assemblent, je parais, et un mot de moi les disperse. » En toute simplicité ! Revers de cette popularité, selon Guy Chaussinand-Nogaret (23) : « Les uns le prennent pour un dictateur en puissance, les autres pour un clown. Mirabeau le surnomme Gilles César. » (Car son nom est Gilbert Motier, marquis de La Fayette.)
    Très doué pour mener des hommes sur un champ de bataille aux États-Unis, La Fayette le sera cependant beaucoup moins pour la politique, puisque à la suite de son aventure américaine il ne connaîtra plus que des échecs. En 1830, porté par la foule, il aurait pu proclamer la République, dont Chateaubriand écrivit cruellement qu’il « rêvassait », mais il se montra trop timoré et apporta son soutien au futur Louis-Philippe. Il aurait voulu jouer les personnages irremplaçables mais, comme Soubise, il avait atteint son seuil de Peters.
    Cela étant, la postérité ne lui en a en aucun cas tenu rigueur, puisqu’elle n’a conservé de lui que l’image du héros de la guerre d’Indépendance. Aux États-Unis, plus de quarante villes portent son nom. Lui-même fut enterré au cimetière de Picpus, à Paris, sous quelques pelletées de terre américaine, ainsi qu’il en avait exprimé le souhait. Au sein de ce petit cimetière très confidentiel, où reposent les victimes des journées révolutionnaires de juillet 1793, la tombe de La Fayette fut le seul emplacement de Paris où le Stars and Stripes ne cessa jamais de flotter, y compris durant l’Occupation. Depuis lors, jamais un président des États-Unis ne vient en voyage officiel en France sans aller s’y recueillir. La Fayette est donc l’exemple typique de ces héros de jeunesse qui se reposent sur leurs lauriers la plus grande partie de leur existence, mais dont la postérité ne retient que le meilleur.
     
    Exemple d’une autre nature, avec cette fois, celui du zhéro auquel l’histoire a donné l’opportunité de se racheter. En octobre 1805, le général en chef de l’armée russe, Koutousov, doit opérer sa jonction avec le général Mack, de l’armée autrichienne. Les deux généraux ont convenu d’un jour précis pour leur rendez-vous. Koutousov et son armée doivent encore traverser la Moravie, mais ils sont dans les temps pour parvenir au jour dit à Ulm, où les attend Mack. Léger hic, si les Russes arrivent bien au jour et à l’heure dans leur calendrier, qui est un calendrier julien, les Autrichiens, eux, les attendent le même jour mais dans leur calendrier grégorien ! Ni Mack ni Koutousov n’ont pensé un instant que leurs « agendas » n’étaient pas les mêmes ! Cette bourde monumentale va contribuer à la défaite du général Mack, lequel, privé du soutien des troupes russes, rend les armes à l’empereur Napoléon le 20 octobre 1805. Le Bulletin de la Grande Armée qualifie la victoire d’Ulm d’une des plus belles journées de l’histoire de France. Pour Napoléon, c’est une victoire stratégique extraordinaire, la bataille n’ayant même pas eu lieu. S’adressant à ses soldats, il dira : « Soldats de la Grande Armée, je vous ai annoncé une grande bataille. Mais grâce aux mauvaises combinaisons de l’ennemi, j’ai pu obtenir les mêmes succès sans courir aucun risque. » Cette victoire va donner un avantage décisif à Napoléon à deux semaines de la bataille d’Austerlitz. Au soir de la reddition d’Ulm, Koutousov peut légitimement passer pour un magistral zhéro pointé. Mack aussi d’ailleurs ! Par la suite, Koutousov sera tenu pour responsable de la défaite d’Austerlitz et privé

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