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Haute-Ville, Basse-Ville

Titel: Haute-Ville, Basse-Ville Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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et la sueur mouillait son front. Il se laissa enduire d'iode, demeura passif au moment où le praticien entoura sa poitrine d'un large pansement.
    Les soins dispensés, le médecin se sentit autorisé à satisfaire sa curiosité.
    —    Des rasoirs utilisés dans de simples bagarres, on ne voit jamais cela. Que vous est-il arrivé ?
    —    Je rentrais dans l'édifice quand un inconnu s'est approché de moi. Je me suis retrouvé dans cet état.
    —    Il ne vous a rien dit ? Il ne vous a pas volé ?
    —    Non, pas un mot, pas de vol.
    Le blessé n'allait pas lui raconter toute l'affaire. Demain, l'incident alimenterait les conversations dans Grande Allée.
    —    Vous avez été attaqué comme cela, sans raison, par un maniaque ?
    Le médecin semblait profondément sceptique.
    —    Je ne vois pas d'autres explications. A moins que ce soit une erreur sur la personne.
    —    Il faudra aller à la police. Quelqu'un doit arrêter ce fou furieux au plus vite.
    Le praticien rangeait ses instruments et les rouleaux de bandage dans son sac. Il ajouta :
    —    Je vais vous laisser une petite solution à base d'opium. Sans cela, vous ne fermerez pas l'œil de la nuit. Mettez quelques gouttes dans un verre d'eau, en respectant la posologie sur la bouteille. Je vous enverrai ma facture.
    —    Prenez une carte sur mon bureau, en sortant, pour avoir mon nom et mon adresse.
    Renaud amorça le geste de lui tendre la main. Il s'arrêta en constatant qu'elle était pleine de sang. Le médecin trouva le chemin de la sortie tout seul. Le blessé demeura un long moment immobile, toujours assis sur le couvercle de la toilette. Quand la douleur devint plus supportable, il se leva pour se débarbouiller. Il trouva dans l'entrée l'enveloppe remise par son agresseur. Elle ne portait aucun nom de destinataire. A l'intérieur se trouvait un simple petit rectangle en carton noir : la couverture de l'un des carnets de Gagnon.
    Philippe-Auguste Descôteaux avait espéré ne plus entendre parler de l'affaire Blanche Girard après l'épisode de Robert Jones et du journal The Spike. Ce petit bandit avait imaginé faire un peu d'argent en utilisant des rumeurs: il lui avait réglé son compte sans difficulté. Thomas Lavigerie, quant à lui, criait toujours au loup. L'avocat conservateur avait dénoncé tellement de scandales imaginaires qu'il ne soulevait plus d'intérêt. La politique se faisait maintenant avec la radio, la presse quotidienne et même le cinéma, grâce aux petits films d'actualité avant les longs-métrages. Les accusations brumeuses du haut d'une tribune ne faisaient plus recette.
    Puis Daniel Ryan s'était pointé chez lui ce samedi soir, sans s'être annoncé. La nouvelle que Renaud Daigle avait rencontré l'épouse du policier Gagnon le laissa interloqué.
    —    Sous un faux prétexte, il l'a amenée à lui remettre des carnets relatifs à cette malheureuse affaire.
    La mine désespérée du policier lui fit saisir le sérieux de la situation.
    —    De quels carnets parlez-vous ?
    —    Le lieutenant prenait des notes au fur et à mesure, en menant ses enquêtes. Il utilisait de petits carnets pour cela. Certains se trouvaient encore à son appartement.
    —    Vous ne les aviez pas détruits ?
    Le reproche teintait la voix de Descôteaux. Ryan jouait avec son képi et regardait le plancher. Cela ne servirait à rien de le traiter d'imbécile. Ils étaient devenus des complices, liés de façon plus -indissoluble que s'ils avaient été les meilleurs amis du monde.
    —    Ce sont des documents dangereux ?
    —    Toute la visite à Château-Richer s'y trouvait décrite. Dans les grandes lignes bien sûr, les éléments dont il tenait à se rappeler. Mais je les ai récupérés !
    Le policier avait ajouté cela avec l'espoir de faire oublier sa négligence.
    —    Vous les lui avez demandés, et il vous les a remis ?
    —    Non.
    Il eut un long moment d'hésitation, puis il expliqua :
    —    Je me suis rendu moi-même à son appartement, en compagnie d'un petit voyou qui me doit quelques services. Il était absent. Le concierge nous a laissés monter quand nous nous sommes présentés comme des policiers. Nous sommes entrés dans son appartement pour reprendre ces notes. Je les ai détruites. L'avocat a tout juste eu le temps de prendre connaissance de leur contenu.
    —    Vous me dites être entré chez lui illégalement. Pire encore, vous avez

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