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Haute-Ville, Basse-Ville

Titel: Haute-Ville, Basse-Ville Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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vieux.
    Le contrebandier s'arrêta, puis reprit cette fois avec véhémence :
    —    Oh ! Mais n'essayez pas de me relier à cette histoire ! Je n'ai aucune idée de ce qui a pu lui arriver.
    —    Vraiment ? On m'a pourtant dit que vous aviez une certaine expérience du viol. Certains présentent cela comme une espèce de tradition familiale, en quelque sorte. Blanche était aussi mêlée à cette tradition, en tant que victime. L'une des victimes.
    —    Qui a dit ça ? tonna-t-il.
    Le témoin s'empressa d'enchaîner tout de suite, sur un ton plus mesuré :
    —    Ce sont des commérages. La ville est pleine de commères. Des racontars, ce ne sont pas des preuves.
    —    Et maintenant, Blanche ne témoignera plus contre vous, n'est-ce pas, si nous allons devant un tribunal ?
    Ovide secoua la tête, puis déclara encore :
    —    Je n'ai rien à voir là-dedans. J'ai passé la semaine à me soigner ici.
    —    Et vos frères, où se trouvaient-ils ?
    —    Ils ont été absents toute une semaine. Ils ne sont revenus que jeudi dernier. Ils étaient... partis faire des livraisons, précisa l'homme après une hésitation.
    Il ajouta à la suite d'une pause, amusé par la formule :
    —    Us étaient en voyage d'affaires, en quelque sorte.
    —    Ils ont des témoins de cela ?
    —    Il faudra le leur demander. Mais ils ont sûrement vu leurs clients.
    Son interlocuteur affichait une parfaite assurance. Ses paroles seraient confirmées, il n'en doutait pas.
    —    Qu'est-ce que vous faites, au juste, comme travail ? insista l'enquêteur.
    —    Nous avons un camion, vous l'avez vu dehors. Nous faisons des livraisons, je viens de vous le dire.
    —- Qu'est-ce que vous livrez ?
    —    N'importe quoi. Nous ne regardons pas dans les boîtes. Nous les prenons quelque part, nous les amenons à un autre endroit. C'est tout*
    Même sous la menace, celui-là ne déclarerait jamais autre chose. Bien plus, il clamerait ignorer le contenu des boîtes amoncelées autour de lui.
    —    Où sont vos frères ?
    —    Je ne sais pas. Sans doute en train de courir les filles en ville.
    —    Vous leur direz de passer me voir au poste de police demain matin. Sans faute, sinon nous viendrons les chercher.
    Heureux de quitter cet endroit infect, Gagnon tourna les talons et sortit, sans un mot de plus. Il entendit fermer les verrous dans son dos. Le policier prit une grande bouffée d'air frais, et décida de rentrer chez lui sans attendre. La journée avait été éprouvante.
    L'auto ronronnait comme un gros chat. Telle était du moins son impression. Renaud parcourait les rues de la Basse-Ville de Québec depuis un bon moment quand il se retrouva au coin des rues Dorchester et Desfossés. Il vit bien un attroupement de travailleurs avec des pancartes, de même que les voitures de police. Il continua son chemin jusqu'au moment où il se retrouva immobilisé entre deux groupes d'adversaires. Les écriteaux de ceux qui formaient un piquet devant la manufacture de chaussures Ludger Duchaîne lui firent comprendre l'essentiel du conflit: «Mort aux scabs», «Mort aux voleurs de jobs», et d'autres phrases du même genre.
    Le peloton des grévistes se massait devant l'entreprise. A la sortie du grand bâtiment en brique, le groupe des ouvriers embauchés pour les remplacer hésitait. Entre les deux, une douzaine de policiers tentaient d'empêcher un affrontement physique. Les manifestants vociféraient contre ceux qui occupaient leurs emplois. Leurs familles se trouvaient acculées à la famine ; Renaud reconnaissait le désespoir dans leurs voix. En face d'eux se tenait un groupe de prolétaires obligés de travailler pour assurer la subsistance des leurs.
    La jolie Chevrolet rouge se trouva immobilisée par les grévistes qui traversaient la rue pour aller défier les scabs. En plus des insultes, les protagonistes commencèrent à se lancer des pierres. Les policiers choisirent ce moment pour entrer en scène, une matraque à la main. Stupéfié, Renaud regardait l'affrontement devant lui. Il demeura impassible jusqu'au moment où une pierre, lancée par un travailleur, rebondit sur la chaussée pour venir frapper l'aile de sa magnifique petite voiture. Il eut l'impression de ressentir une douleur physique.
    —    Vous voulez porter plainte ? cria un policier en se précipitant vers le gréviste qui avait lancé la pierre.
    L'homme d'une quarantaine d'années fut

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