Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Helvétie

Helvétie

Titel: Helvétie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
Vom Netzwerk:
Élise Ruty envoya une servante prévenir son amie Charlotte qu’Axel était chez elle et rentrerait après avoir goûté. La femme du notaire, que le récit, par ses filles, de la baignade accidentelle amusa, eut cependant un frisson rétrospectif en réalisant que l’abordage raté eût pu déboucher sur une tragédie. Entendant le petit Métaz éternuer, elle se réjouit à la pensée que l’accident n’aurait pour conséquence qu’un rhume.
     
    Tandis que les enfants croquaient des salées, ces galettes à la crème dont tous étaient friands, et vidaient un bol de lait chaud aromatisé à la cannelle, Charles Ruty entreprit d’achever l’histoire du vainqueur de Trafalgar.
     
    – Comme le dit Axel, Nelson a battu la flotte française, c’est vrai, mais il y a laissé sa vie. Pendant la bataille, alors qu’il se trouvait sur le pont de son navire, le Victory , en français la Victoire , une balle lui a brisé l’épine dorsale. Un quart d’heure plus tard, il était mort.
     
    – Comment c’est quand on est mort ? demanda Axel.
     
    – On est froid et tout pâle, dit Nadette.
     
    – Et aussi, on bouge plus, compléta Nadine.
     
    – Alors, on s’ennuie ! Je veux pas être mort. C’est pas amusant ! dit, d’un ton péremptoire, le petit garçon.
     
    – Si tu t’avais noyé, t’aurais été mort pourtant, expliqua Nadette.
     
    – Être mort, ça dure longtemps ? s’enquit Axel.
     
    – Ça dure jusqu’à qu’on y pense plus, assura Nadine avec autorité.
     
    1 Un petit verre.
     
    2 Debout, dressée.
     
    3 Se percher.
     
    4 Dans le canton de Vaud : serrure.
     
    5 Le Véritable Messager boiteux de Berne et de Vevey , almanach romand, année 1806.
     
    6 Ce bas-relief, taillé dans le marbre blanc de Carrare, représente la mort de Desaix à Marengo. Tombé de son cheval, le général expire dans les bras du général Lebrun, son aide de camp. Napoléon devait se faire présenter ce monument achevé, à Paris, en janvier 1806. L’énorme et pesant bas-relief allait ensuite être transporté au prix de grandes difficultés.
     
    7 Ces instruments sont conservés et visibles au musée de l’hospice.
     
    8 Petit canot de service, à rames, souvent remorqué par les grandes barques du Léman.
     
    9 Vent soufflant sur le Léman de la Savoie vers la côte suisse.
     

7.
     
    Pour son cinquième anniversaire, Axel obtint enfin la culotte de peau à l’anglaise qu’il convoitait depuis des mois, surtout depuis que le fils du boulanger en portait une. Un tel achat supposait un déplacement à Lausanne, car seul le culottier Jacques Brüger, installé au Petit-Saint-Jean, était capable de fournir un vêtement de cette qualité. Dès que la route fut praticable – l’hiver avait été rude et la côte nord du Léman longtemps enneigée – les Métaz se rendirent en famille chez Mathilde Rudmeyer. Guillaume profitait du voyage pour essayer d’obtenir, par l’intermédiaire d’un ingénieur français des Ponts et Chaussées qui avait participé à la construction de la route du Simplon, le contrat de transport jusqu’à l’hospice du Grand-Saint-Bernard des panneaux de marbre sculpté destinés au mausolée du général Desaix. Le sculpteur, Jean-Baptiste Moitte, et un architecte étaient attendus à Lausanne.
     
    Durant tout le trajet, entre Vevey et Lausanne, Axel, le nez collé à la vitre du coupé, ne cessa de poser des questions, sur les villages traversés, les maisons entrevues, le pourquoi des montées et des descentes, les changements d’allure des chevaux… et cent autres, qui prenaient parfois au dépourvu son père et sa mère.
     
    Au plaisir du dépaysement s’ajoutait pour l’enfant la perspective de revoir sa grand-tante, M lle  Rudmeyer. La vieille demoiselle offrait toujours cadeaux et papillotes. Axel était aussi très curieux de découvrir la maison de la rue de Bourg, dont sa mère disait qu’elle était un véritable musée. Réclamant une définition du mot musée à ses parents, Axel en reçut deux.
     
    – C’est un endroit où sont rassemblés de jolis objets ayant une histoire et beaucoup de valeur, des tableaux et des meubles anciens, proposa Charlotte.
     
    – C’est un endroit où les gens mettent les choses qui ne servent plus à rien, au lieu de les jeter, grogna Guillaume.
     
    Il tenait les collections de boîtes à mouches, d’éventails, les bibelots d’ivoire, les biscuits de Sèvres et les porcelaines de Saxe

Weitere Kostenlose Bücher