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Helvétie

Helvétie

Titel: Helvétie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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moyenne, conclut M lle  Rudmeyer en riant.
     
    Celle qui soignait aussi bien son corps que sa mise se savait encore très présentable et aimait qu’on le lui rappelât. Elle posa sur la joue de sa compagne un gros baiser. Chez Chapuis, quand Charlotte voulut payer ses gants, Mathilde proposa à sa nièce d’en choisir deux autres paires et fit mettre le tout sur son compte.
     

    Au printemps 1806, les Vaudois, échaudés comme tous les Suisses par les conflits nés de la troisième coalition, n’osaient croire la paix établie de façon durable. L’entrée des Français à Vienne, l’éclatante victoire d’Austerlitz, les traités signés à Schönbrunn et Presbourg en décembre 1805 étaient, certes, de nature à calmer les ardeurs belliqueuses des Autrichiens et des Prussiens, mais, à l’abri sur leur île indemne, les Anglais nourrissaient de rancœurs accumulées leur haine revancharde.
     
    Ils avaient battu la flotte franco-espagnole à Trafalgar, mais avaient perdu Nelson ; ils avaient fomenté une coalition, mais elle aboutissait au démantèlement de l’empire de François II ; ils avaient cru étouffer l’idée d’une Europe bonapartiste, et Joseph Bonaparte était roi de Naples et de Sicile ; Louis Bonaparte, roi de Hollande ; Élisa, la sœur aînée de Napoléon, princesse de Lucques et de Piombino ; sa deuxième sœur, Pauline, princesse Borghèse et duchesse de Guastalla ; la troisième, Caroline, épouse de Joachim Murat, grand-duc de Berg et de Clèves. Pour compléter cette mainmise familiale sur le continent, Eugène de Beauharnais, beau-fils de l’usurpateur et déjà vice-roi d’Italie, venait d’épouser la princesse Augusta de Bavière, tandis que Stéphanie, nièce de l’impératrice Joséphine, devenait, par mariage, grande-duchesse de Bade !
     
    Tout cela, l’homme fort du gouvernement britannique, Charles-James Fox, l’avait bien compris, ne visait qu’à remplacer par une confédération européenne la ligue germanique, constituée en l’an 800 quand Charlemagne avait reçu la couronne impériale des mains du pape Léon III.
     
    On disait à Londres que cette désastreuse période, principalement la défaite d’Austerlitz, avait fait une autre victime, William Pitt, « l’âme des coalitions anti-françaises ». Le Premier ministre, podagre et atteint d’un mal héréditaire, était mort désespéré le 23 janvier 1806, après avoir dit à l’un de ses collaborateurs, en désignant la carte d’Europe épinglée au mur dans sa villa Le Boulingrin, à Putney : « Roulez cette carte, on n’en aura plus besoin d’ici dix ans 3  ! »
     
    – Puisse-t-il avoir vu juste ! dit Guillaume Métaz, à qui un négociant du Tessin, de passage à Vevey, citait ce mot de la fin du grand Anglais, un soir d’été 1806.
     
    Car plus l’année avançait et plus on avait de raisons de douter de la solidité de la paix. Napoléon I er affichait cependant une grande assurance et la Gazette de Lausanne , reproduisant un texte du journal français le Moniteur , rapportait les propos que l’empereur avait tenus lors de l’ouverture solennelle du Corps législatif : « Mes armées n’ont cessé de vaincre que lorsque je leur ai donné l’ordre de ne plus combattre. Mes ennemis ont été humiliés et confondus. »
     
    – C’est un homme qui a conscience de son génie, commenta Guillaume.
     
    – C’est un homme grisé par le succès et qui ne compte pas les charniers que remplissent ses victoires. Dieu lui en demandera raison, s’écria Flora.
     
    En Suisse, les cantons étaient contraints, par le traité de capitulation signé le 27 septembre 1803 entre la Confédération et la France, de fournir aux armées impériales seize mille hommes, soit quatre régiments, dits « capitulés », de quatre mille soldats. Les familles d’un pays réputé neutre avaient donc des raisons bien humaines de redouter la guerre. Déjà, lors des conflits de 1805, les soldats suisses, fidèles à la tradition, s’étaient illustrés en Vénétie, dans les combats contre les Autrichiens, mais on trouvait dans la plupart des cantons que cette démonstration du premier régiment « capitulé » suffisait à la gloire helvétique ! Seuls les Vaudois ne marquaient nulle réticence à s’enrôler sous les aigles napoléoniennes. Leur attitude servait la cause de toute la Confédération puisque Napoléon venait de ramener de seize mille à douze mille le

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