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Helvétie

Helvétie

Titel: Helvétie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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Finances, avait prêtée à Louis XVI, avec intérêt annuel de cent mille livres ! Jusqu’en 1792, cet intérêt fut régulièrement versé, mais la dette ne fut pas reconnue par les gouvernements qui se sont succédé depuis la Révolution. M me  de Staël, grande patriote, dites-vous, ne manque pas une occasion de rappeler ce que la France lui doit, intérêt et capital ! Pourquoi voulez-vous que les finances publiques honorent les dettes privées d’un roi défunt ! En prêtant au taux de six pour cent, M. Necker, que l’on disait banquier avisé, prit un risque de banquier ! »
     
    Un peu déçue de découvrir que Germaine de Staël avait une propension à s’amouracher d’hommes jeunes, qui s’esquivaient bientôt, rassasiés de discours sentencieux, de bavardages philosophiques, de poses admirables, d’envolées mystiques et, pendant les entractes, d’étreintes brûlantes, M me  Métaz regretta encore plus que cette amoureuse à l’esprit orné pût, à l’occasion, faire preuve de sens pratique. Suivant la suggestion de Fontsalte, elle se tint désormais à l’écart de Coppet.
     
    Le dernier séjour de Blaise avait été, de toutes les rencontres des amants, la plus harmonieuse, la plus confiante, la plus heureuse. Dorette n’oublierait jamais l’émotion, la joie et la fougue de Blaise quand il s’était éveillé près d’elle au moulin de la Vuachère, un matin d’août. Pendant trois jours, ils n’avaient fait que s’aimer et échanger des confidences et des idées. Charlotte ne s’était absentée qu’une heure, pour prévenir Mathilde qu’elle différait son départ pour Vevey. Cette précaution s’était, a posteriori , révélée utile car M. Métaz, rentrant de Genève et traversant Lausanne, avait choisi de s’arrêter un instant chez la tante de sa femme. Alarmée, Mathilde Rudmeyer s’était tenue hors de vue de son neveu, tandis que la domestique, dûment chapitrée, avait répondu avec naturel : « Ces dames sont allées visiter des amies, à Fribourg. On ne sait quand elles reviendront. »
     
    La fable admise sans soupçon, Guillaume avait poursuivi sa route vers Vevey, où Charlotte n’était arrivée que deux jours plus tard, avec les derniers ragots fribourgeois collectés, à titre d’alibi, par Mathilde dans les salons de Lausanne !
     
    En quittant le moulin, Fontsalte avait laissé à Dorette son portrait, ou plutôt son profil, réalisé par Chrétien au physionotrace 1 , et c’était maintenant un grand plaisir pour elle de le contempler quand elle était seule. Elle ne courait pas grand risque, même si son mari trouvait cette image d’un homme qu’il ne connaissait pas. Guillaume, confiant de nature, dénué de jalousie, était aussi d’une parfaite discrétion et ne se serait jamais permis d’ouvrir un tiroir dans la chambre de sa femme. Eût-il découvert le physionotrace qu’elle eût inventé une histoire. Comme il s’agissait d’un profil, l’artiste n’avait pu mettre en évidence le regard vairon de Blaise.
     
    Flora ne manquait pas de faire remarquer à Charlotte qu’elle commettait de plus en plus d’imprudences, mentait maintenant avec un aplomb déconcertant et que les séjours au moulin de la Vuachère, si rares et si espacés qu’ils fussent, constituaient un risque considérable de scandale. Depuis que Charlotte avait emmené son amie visiter ce qu’elle nommait son refuge contre le spleen, Flora ne cessait de la mettre en garde.
     
    – Imagine qu’un beau matin Guillaume, qui est toujours par monts et par vaux, se rende au Petit-Ouchy, te rencontre et te suive ? Tu vois sa surprise en découvrant que sa femme entretient un réduit galant au bord d’une rivière ! Car il n’a plus rien d’un moulin, ton moulin ! Les tentures de velours cramoisi, les tapis orientaux, les guéridons, les vases, les lampes, ces draps de fil brodés, cette lingerie fine empilée dans l’armoire, ces déshabillés et ces chemises impudiques que je ne t’ai jamais vus ici m’ont plutôt fait penser à une maison de cocotte !
     
    – Bravo ! Ce que tu es drôle ! Ce sera le Moulin de la cocotte ! dit, ce jour-là, Charlotte.
     
    La seule pensée de posséder un abri secret pour son amour défendu, un décor douillet, un peu extravagant, où elle devenait une autre femme, la réjouissait autant que les souvenirs tendres et voluptueux protégés des curiosités malignes, de la souillure des préjugés et de la

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