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Helvétie

Helvétie

Titel: Helvétie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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corrosion du temps par les vieux murs du moulin.
     

    Cette année-là, l’hiver fut favorable aux amants, car Blaise de Fontsalte fit deux brèves apparitions à Lausanne. La première justifiée par les soucis que donnaient à l’administration impériale les contrebandiers opérant du Tessin au Valais, la seconde à l’occasion de la destitution du préfet du départe ment du Léman, M. de Barante, dont la mansuétude à l’égard de M me  de Staël avait fini par lasser l’empereur. Le nouveau préfet, M. Capelle, promettait d’être plus attentif aux conciliabules et agissements des gens de Coppet.
     
    Lors de cette dernière visite, quelques jours avant Noël, Blaise annonça à Charlotte que Napoléon venait de répudier Joséphine, qui ne pouvait lui donner d’enfants. M me  Métaz trouva la chose désolante. Quand son amant l’eut informée que l’empereur allait épouser la fille de François I er d’Autriche, l’archiduchesse Marie-Louise, elle se plut à imaginer que cette union scellerait la paix.
     
    La nouvelle officielle de la dissolution du mariage religieux de l’empereur, rapportée par les journaux de Lausanne à la fin du mois de janvier 1810, fournit aux huguenots de stricte obédience, comme Blanchod, et aux athées, comme Chantenoz, de quoi dauber sur l’hypocrisie des papistes.
     
    – On dit que la pauvre Joséphine était dans l’impossibilité d’avoir des enfants parce qu’elle avait dans le ventre quelque chose de détraqué, dit Charlotte, compatissante.
     
    – Bonaparte a mis longtemps à s’en apercevoir, ironisa Blanchod.
     
    – Elle a cependant eu deux enfants de son premier mariage avec M. de Beauharnais, le guillotiné : le prince Eugène, présentement vice-roi d’Italie, et cette Hortense, épouse malheureuse, à ce qu’on dit, de Louis Bonaparte, roi de Hollande par la grâce de son frère !
     
    – Alors, c’est peut-être Napoléon qui ne peut pas…
     
    – L’avenir nous le dira, mon bon Simon. Il faut bien qu’un empire héréditaire ait un héritier ! Mais je trouve assez cocasse qu’on demande à Marie-Louise d’Autriche, nièce de Marie-Antoinette et de Louis XVI, l’éminent service d’assurer la descendance de celui qui, bien servi par les guillotineurs de 93, occupe aujourd’hui ce qu’il faut bien appeler le trône de France ! La carmagnole républicaine est oubliée, Paris va se remettre au menuet ! Ces Français m’étonneront toujours ! lança Martin en riant.
     
    – Le Corse me dégoûte plus que jamais et cette Marie-Louise n’a pas d’honneur, pour entrer dans le lit du sanguinaire…, grogna Flora.
     
    – Il n’est pas question de cela ! Ce mariage est… comment dire… diplomatique, fabriqué, calculé, de nature à élever l’empereur des Français au rang des grandes familles régnantes, voilà, assena Charlotte d’un ton catégorique.
     
    – Savez-vous, mes amis, que ma femme a la tête politique ! Où vas-tu chercher ça, cocolette ? fit Guillaume, à la fois admiratif et taquin.
     
    – C’est facile à comprendre, non ! dit vivement Flora, volant au secours de son amie.
     
    M lle  Baldini savait par qui et comment était faite, de façon inavouable, la religion de Charlotte et craignait qu’elle n’en dît trop. Elle avait reconnu, dans les propos véhéments de M me  Métaz, les termes dont Fontsalte usait dans une récente lettre.
     
    Pendant une bonne quinzaine de jours, le mariage de l’empereur devint le principal sujet de conversation entre les dames de Vevey. Chacune y allait de son couplet sentimental à l’heure du thé chez Élise Ruty. Sans pouvoir dévoiler ses sources, que toutes ses amies croyaient lausannoises à cause des hautes relations de M lle  Rudmeyer, Charlotte, incorrigible, se tailla un joli succès, en répétant une fois de plus les informations données par Blaise dans sa dernière lettre. On apprit ainsi que la nouvelle impératrice parlait et écrivait italien, anglais, français et allemand. Qu’elle jouait convenablement de la harpe et, contrairement à ce que disaient certains, vouait une véritable affection à Napoléon. L’archiduchesse était reconnaissante à l’empereur d’avoir, lors du bombardement de la capitale autrichienne, en 1809, fait détourner les batteries françaises pour épargner le château où elle se trouvait alitée. Napoléon, ayant appris que la princesse, malade de la petite vérole, était contrainte

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