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Helvétie

Helvétie

Titel: Helvétie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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de l’estime générale. Installée à l’hôtel Dejean à Sécheron, près de Genève, elle allait de réception en réception et excursionnait, suivie par sa petite cour qui s’efforçait de la distraire et de lui faire oublier la grande humiliation qu’elle avait subie. Jean-Marie-Jules Pictet, notable genevois, avait donné une splendide fête en l’honneur de l’ex-impératrice à la villa Diodati, une des plus belles demeures de Cologny.
     
    Partie de Genève le 13 septembre, Joséphine avait entrepris, avec un convoi de calèches et de landaus, le tour du Léman. Commençant par la rive sud, elle avait visité successivement Thonon, Évian, Meillerie, Saint-Gingolph, le Bouveret. La caravane s’était aventurée jusqu’à Saint-Maurice, pour franchir le Rhône avant de faire étape à Bex, à l’auberge de l’Union. La station thermale, située à quatre cent vingt mètres d’altitude, au pied des Alpes vaudoises et face aux dents du Midi, se proclamait la plus élégante du pays de Vaud. Les sources salines, mais plus encore le climat doux et sédatif, passaient pour salutaires aux nerveux et insomniaques.
     
    Après une brillante soirée et une nuit paisible, l’impératrice avait amorcé par Villeneuve son retour à Genève via Lausanne, en suivant la rive nord du lac. Elle sortait du sombre cachot de Bonivard à Chillon quand les dames de Vevey, qui l’attendaient sur l’esplanade, devant l’église Saint-Martin, virent arriver le landau impérial. L’arrêt fut bref et M me  Métaz trouva Joséphine moins belle qu’elle n’imaginait, surtout outrageusement maquillée. Comme les quelques privilégiées admises à la présentation, Charlotte débita son compliment, ajoutant que Sa Majesté « était un exemple pour toutes les femmes » et qu’elle-même, notamment, lui devait beaucoup.
     
    Comme l’impératrice souriait, appréciant ce compliment moins mièvre que tous ceux qu’on lui décernait d’ordinaire, Charlotte avait ajouté, dans une révérence, en pensant à Blaise, qu’elle devait retrouver deux jours plus tard : « Je vous dois encore plus que vous ne pouvez imaginer, Majesté. »
     
    Le bruit ayant couru que Joséphine avait été invitée à Coppet par M me  de Staël, Charlotte osa demander à une personne de la suite si Sa Majesté répondrait à cette invitation. La dame eut un instant d’hésitation, puis, ayant remarqué combien l’impératrice avait goûté les propos de la Veveysanne, elle se résolut à parler :
     
    – Je ne puis que vous confier, madame, ce qu’a dit Sa Majesté répondant à sa lectrice, M me  d’Avrillon, qui lui posait ce matin la même question : « Je connais trop M me  de Staël, pour risquer une pareille entrevue. Dans le premier ouvrage qu’elle publiera, elle ne manquerait pas de rapporter notre entretien et me ferait dire des choses auxquelles je n’ai jamais songé 7 . » L’impératrice, voyez-vous, ne veut surtout pas déplaire à l’empereur, qui reste très bon pour elle, conclut la dame avant de monter en voiture.
     
    En quittant Vevey, l’impératrice se rendit à Lausanne, où elle arriva vers trois heures de l’après-midi. Elle s’installa pour deux nuits à l’auberge du Lion d’or, 20, rue de Bourg, à deux pas de chez Mathilde Rudmeyer. Comme sa nièce, Mathilde fut présentée à Joséphine, qui reçut le lendemain une autre habitante de la rue de Bourg, connue de M lle  Rudmeyer, la grande-duchesse Julienne-Féodorovna de Saxe-Cobourg, épouse du grand-duc Constantin, frère du tsar Alexandre. Cette belle femme de vingt-neuf ans, gracieuse et pleine d’esprit, vivait séparée de son époux et passait son temps à voyager. La tante de Charlotte la trouvait un peu mélancolique, mais d’une grande noblesse de caractère et d’un commerce charmant.
     
    Ce court séjour à Lausanne de l’impératrice, que devait rejoindre sa fille, Hortense, ex-reine de Hollande, arrangeait bien Fontsalte et sa maîtresse. Guillaume, très fier que sa femme eût été présentée à la première épouse de Napoléon, ne put qu’approuver le même soir le départ de Charlotte pour Lausanne. Quant à Blaise, ayant reçu les consignes de Ribeyre, pressé de rentrer à Paris, il s’était installé au moulin, où il se sentait chez lui. Trévotte, dans tous les secrets du général, s’occupait de l’intendance, bouchonnait les chevaux, astiquait la berline, cassait du bois, faisait le ménage et

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