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Herge fils de Tintin

Herge fils de Tintin

Titel: Herge fils de Tintin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Benoit Peeters
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pour les
autres »…
    Quant à l’histoire que publie Hergé pendant les dix
premières semaines, à raison de deux planches chaque
fois, elle n’est pas faite pour relever le niveau de l’hebdomadaire. L’Extraordinaire Aventure de Flup, Nénesse, Poussette et Cochonnet est en réalité on ne peut plus banale. Le
texte, dû à un rédacteur sportif du journal du nom deDesmedt (qui pour l’occasion signait Smettini), est d’une
niaiserie absolue et le scénario, racontant la grotesque
odyssée de trois enfants et de leur cochon gonflable au
milieu des négrillons, est d’une désespérante platitude. Et
les dessins d’Hergé, du reste non signés, sont aussi maladroits que bâclés. Dans les premières pages, il y a bien
quelques phylactères et Hergé semble se rapprocher de la
bande dessinée au sens moderne du terme ; mais très vite,
il renonce à ce nouveau mode de narration et se borne à
illustrer le texte.
    Par rapport à Totor , cette histoire constitue une régression. Loin de n’être qu’accidentel, ce recul qualitatif est,
me semble-t-il, éminemment révélateur. Il montre en
effet que le talent d’Hergé est d’abord celui d’un narrateur
et que ses qualités graphiques elles-mêmes sont directement liées à l’intérêt qu’il porte au scénario. Jamais il ne
pourra se contenter de mettre en images les idées d’un
autre ou animer des personnages qui ne lui appartiennent
pas.
    La médiocrité des premiers numéros du Petit Vingtième est, à vrai dire, aisément explicable. Lorsqu’il se trouve
propulsé à la tête du supplément, le jeune Hergé ne dispose guère de moyens. Sans collaborateurs et sans argent,
il a dû en quelques jours improviser un semblant de
journal. Si au moins il avait le temps de se consacrer
complètement à ce nouveau projet. Mais il n’en est pas
question : il lui faut encore dessiner, à un rythme presque
infernal, pour Le Vingtième Siècle et son supplément littéraire, illustrer des livres, donner de temps à autre un
dessin au Boy-Scout belge ou concevoir une publicité.
    Pourtant, l’abbé insiste : Hergé est capable de mieux.
Qu’il crée donc sa propre histoire ! Dans l’hebdomadaire
satirique Le Sifflet du 30 décembre 1928, le dessinateur
vient justement de publier deux planches de bande dessinée avec « ballons ». Elles ont frappé Wallez, qui les
trouve plus vivantes que celles du Petit Vingtième . L’une
des pages met en scène un « petit enfant sage » et son
chien blanc. Le gag est d’un goût douteux, mais la formule est séduisante. Pourquoi Hergé ne reprendrait-il pas
ces deux personnages comme protagonistes d’une nouvelle histoire, dont il écrirait seul le scénario 7  ?
    ----
    1  Éric Gilles, « Entretien avec René Verhaegen », Les Amis de Hergé ,
n o 11, juin 1990, p. 30.
    2  Philippe Goddin, Hergé, chronologie d’une œuvre , Moulinsart,
2000, tome I, p. 147.
    3  « Hergé à Radio-Bruxelles », 4 mars 1942. Transcription publiée
dans Les Amis de Hergé , n o  6, décembre 1987, p. 15.
    4  Témoignage de Germaine Kieckens à l’auteur, 1988.
    5  Didier Pasamonik, « Hergé : une ligne claire », De Georges Remi à
Hergé , Bruxelles, Institut Saint-Boniface, 1984.
    6  Henri Roanne, entretien inédit avec Hergé, 1974.
    7  « La Noël du petit enfant sage », chaînon manquant entre Totor
et Tintin, a été retrouvée par Huibrecht Van Opstal à la bibliothèque
de Louvain-la-Neuve. Cette planche (publiée dans Hergé, chronologie
d’une œuvre , Moulinsart, 2000, tome I, p. 216) permet de mieux
comprendre cette phrase un peu énigmatique que me disait Germaine
Kieckens, en 1988 : « Tintin est né grâce à l’abbé Wallez ; c’est
Georges qui l’a inventé, mais c’est l’abbé qui en a eu l’idée. »

 
    2
     
    La naissance de Tintin
     
    Hergé n’a pas le temps de se poser de questions. La
nouvelle série est déjà annoncée. Il choisit le premier nom
qui lui passe par la tête : Tintin, sans se souvenir que Benjamin Rabier l’a déjà utilisé. Et pour le petit chien blanc,
Milou lui semble parfait.
    S’il y a un modèle pour Tintin, Hergé n’est pas allé le
chercher bien loin. Son frère Paul a seize ans, et ses gestes,
ses talents de mime fascinent le dessinateur depuis
longtemps :
J’ai eu comme compagnon de jeu, dans mon enfance, un
frère de cinq ans plus jeune que moi. Je l’ai beaucoup
observé, il m’amusait, il me passionnait […].

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