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Hiéroglyphes

Titel: Hiéroglyphes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: William Dietrich
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était cassé, ainsi que les
pattes de deux de nos chevaux. Les cavaliers qui escortaient l’autre
voiture avaient mis pied à terre et se précipitaient,
pistolet au poing, pour achever les bêtes blessées et
dételer les autres. La femme qui vociférait, les traits
convulsés, par la fenêtre de son carrosse, était
richement vêtue, à la mode de Paris. Son arrogance était
évidente, mais je ne la reconnus pas tout de suite. J’étais
un Américain illégalement présent sur le sol
français, avec une accusation de meurtre résiduelle sur
le dos, et qui n’avait même pas respecté la
quarantaine imposée aux voyageurs en provenance d’Orient.
Pas plus que Bonaparte, mais beaucoup plus susceptible d’avoir
des ennuis, même si les torts étaient plutôt de
l’autre côté. Être dans son droit ne nous
servirait sûrement pas à grand-chose dans les
circonstances présentes.
    « Mon
affaire, insistait la virago, est d’une importance cruciale
pour l’État ! Dégagez vos chevaux des
miens !
    —  Mais
c’est vous qui vous êtes lancés devant nous !
repartit Astiza, avec son accent plus évident que jamais. Vous
êtes aussi grossière que totalement incompétente ! »
    Je
la poussai du coude.
    « Doucement.
Regarde les soldats de son escorte. »
    Trop
tard.
    « C’est
vous qui êtes aussi impertinente que malavisée !
fulminait la femme. Vous savez qui je suis ? Je pourrais vous
faire arrêter ! »
    Je
m’avançai avec le souci de prévenir une bataille
de dames et faire une promesse fallacieuse de dédommagement
ultérieur, n’importe quoi pour nous débarrasser
de cette haridelle. Les gitans avaient intelligemment disparu entre
les arbres. Deux coups de pistolet mirent fin aux hennissements
plaintifs des chevaux blessés, puis les cavaliers nous firent
face, la main sur le pommeau de leur sabre.
    J’essayai
de déployer tout mon charme et tout mon sens de la diplomatie.
    « Pour
l’amour du ciel, madame, c’est un simple accident. Nous
avons souffert plus que vous qui allez pouvoir repartir d’ici
quelques minutes. Où courez-vous donc ?
    —  Vers
mon mari, si je peux le trouver. Oh, quel désastre ! On a
pris le mauvais tournant, et je l’ai perdu sur la grand-route.
Et maintenant ses frères vont le revoir les premiers et lui
raconter des mensonges sur mon compte. Si vous m’avez trop
retardée, vous en répondrez devant la justice ! »
    Je
pensais que la guillotine avait calmé cette sorte
d’outrecuidance fréquente chez les aristocrates, mais
apparemment elle en avait épargné quelques-uns. Et
quelques-unes.
    « Il
fallait absolument que je le voie. Mais il nous a croisés et
nous avons essayé de rebrousser chemin. Entretemps, il sera
rentré à la maison, et mon absence lui fera penser au
pire !
    —  Quel
genre de pire ?
    —  Que
je lui suis infidèle ! »
    Et,
là-dessus, elle éclata en sanglots, sincèrement
bouleversée.
    Je
la reconnaissais enfin, cette femme célèbre dans les
milieux sociaux parisiens dont je ne fréquentais que la
périphérie. Cette femme n’était rien de
moins que Joséphine, l’épouse de Napoléon !
Que faisait-elle sur cette route à la nuit tombante ? Et,
bien sûr, ses larmes me touchaient. Je ne manque pas de
galanterie, et voir pleurer une femme désarmera n’importe
quel gentleman.
    « C’est
M me  Bonaparte,
chuchotai-je à Astiza. Quand il l’a crue adultère,
à la veille de la bataille des Pyramides, il est presque
devenu fou.
    —  C’est
pourquoi elle est effrayée ? »
    Après
un court instant de réflexion, Astiza s’approcha de
l’autre voiture.
    « Madame,
nous connaissons votre époux.
    —  Quoi ? »
    Je
me rendais compte, après coup, qu’elle était de
petite taille, mince, et portant bien la toilette, ni laide ni
particulièrement belle, mais avec un joli teint clair, le nez
droit, les lèvres pleines, de grands yeux noirs, et, même
au fond de sa détresse, intelligents. Plus des cheveux bruns
et des oreilles finement ciselées. Mais avoir pleuré ne
l’avait pas embellie.
    « Comment
pourriez-vous le connaître ?
    —  Nous
avons servi sous les ordres de Bonaparte en Égypte. Nous nous
hâtions nous-mêmes pour l’avertir d’un
terrible danger.
    —  Vous
l’avez donc rencontré ! Quel danger ? Un
attentat ?
    —  L’un
de ses familiers, Alessandro Silano, s’apprête à
le trahir.
    —  Le
comte Silano ? Il est rentré de là-bas avec mon
mari. Un confident et un

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