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Hiéroglyphes

Titel: Hiéroglyphes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: William Dietrich
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le Corse avait
débarqué dans son île natale, puis traversé
la mer à destination de la métropole, et que nous
n’avions plus aucune chance de le rattraper.
    N’eût
été la présence de Silano, j’aurais été
heureux de l’oublier. Mon devoir n’était pas
d’entraver les ambitions de généraux éblouis
par leur propre gloire, mais j’avais un compte à régler
avec M. le comte. Le livre était dangereux, dans ses
mains, et potentiellement utile, dans les nôtres. Combien de
lignes avait-il déjà lues ? Combien pourrions-nous
en lire, avec la clef d’Astiza ?
    Même
si la longueur du voyage avait été fastidieuse, nous en
avions bien profité d’une autre manière. La
première fois où Astiza et moi pouvions respirer
ensemble. Nous avions partagé des campagnes militaires, des
chasses au trésor et de périlleuses évasions.
Là, nous partagions la cabine d’un lieutenant, sous les
yeux d’officiers solitaires, jaloux de notre intimité,
et nous avions le temps de refaire connaissance à loisir,
comme un homme et une femme. Assez de temps, en d’autres
termes, pour effrayer un mâle jamais totalement converti à
la vie conjugale.
    Ce
qui n’était pas mon cas. Nous avions été
des partenaires pour l’aventure et aussi des amants. À
présent, nous étions en outre des amis. Le repos et la
bonne nourriture lui allaient bien, sa peau recouvrait sa splendeur
et ses cheveux leur éclat. J’aimais l’admirer, en
lisant dans notre cabine ou bien en contemplant la mer, accoudé
près d’elle au plat-bord du bastingage. J’aimais
la façon dont ses robes moulaient son corps et dont ses
cheveux volaient dans la brise. J’aimais encore plus, sans
doute, la regarder se déshabiller, mais toutes nos épreuves
l’avaient désabusée, et sa beauté semblait
douce-amère. Nous faisions l’amour dans notre cadre
exigu, parfois avec fougue et parfois plus doucement, soucieux de ne
pas faire trop de bruit dans ce royaume flottant aux minces cloisons.
J’étais transporté. Emerveillé que moi,
l’opportuniste américain sans véritable croyance,
et elle, la mystique égyptienne convaincue, puissions ainsi
nous entendre. Et pourtant nous étions si complémentaires,
toujours à prévenir nos penchants réciproques.
Je commençais à rêver d’une future vie
paisible à deux. Et je me surprenais à souhaiter de ne
jamais arriver en France et d’oublier Bonaparte.
    Mais,
parfois, elle portait sur moi un regard troublé par tout ce
qu’elle voyait de maléfique, dans le passé et
dans l’avenir. C’était alors que j’avais
peur de la perdre à nouveau. Le destin la réclamait
autant que moi.
    « Pensons-y,
Ethan. Napoléon avec le pouvoir de Moïse ? La France
avec le savoir secret des chevaliers du Temple ? Silano immortel
maîtrisant chaque année d’autres arcanes et
rassemblant toujours plus de partisans zélés ?
Notre tâche ne sera terminée que lorsque nous aurons
repris ce livre. »
    C’est
dans cet esprit que nous débarquâmes en France. Pas à
Toulon, impossible. Astiza conféra avec notre capitaine
anglais, étudia les cartes et choisit une obscure calanque
inhabitée, sinon par un troupeau de chèvres. Comment
connaissait-elle si bien la côte française ? On
nous déposa, à la rame, sur une petite plage de galets
où on nous laissa seuls par une nuit sans lune. Plus tard, on
perçut un coup de sifflet et Astiza alluma une chandelle dont
elle protégea la lueur à l’aide de sa cape.
    « Alors,
le bateleur est revenu, dit une voix familière sortie des
broussailles. Celui qui a touché le bateleur, au tarot, le
père de toute pensée, le démiurge de la
civilisation, bénédiction et malédiction des
rois. »
    Des
hommes se matérialisèrent, en bottes et grand chapeau,
ceinture de toile aux couleurs vives et couteau sur la hanche.
    Leur
chef s’inclina.
    « Bienvenue
à votre retour chez les Roms », articula Stéphane
le gitan.
    *
* *
    Le
groupe me surprit agréablement. Ces gitans ou ces bohémiens,
comme certains Européens les appelaient parfois, nomades
incorrigibles dont l’origine se perdait dans la nuit des temps,
selon certaines opinions répandues, je les avais déjà
croisés lorsque mon ami Talma et moi-même avions fui
Paris pour rejoindre Napoléon. Après que Najac et ses
gibiers de potence nous eurent agressés, à Toulon, je
m’étais réfugié dans les bois où
j’étais tombé sur Stéphane et sa tribu.
J’y avais également rencontré pour

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