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Histoire De France 1724-1759 Volume 18

Histoire De France 1724-1759 Volume 18

Titel: Histoire De France 1724-1759 Volume 18 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Michelet
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taire. De deux cents voix, on n'en eut que quarante, et le chancelier proclama ces quarante pour majorité.
    Peu après, en septembre, le Roi plus bas encore,tombe. C'est la personne royale qui maintenant est avilie.
    Ce Roi, jolie figure de fille (insensible, glacée), était moins scandaleux alors. Cinq ans durant il fut un mari régulier, froidement régulier, sans pitié de la reine. Toujours, toujours enceinte. Au 30 août 1730, après deux grossesses en vingt mois, elle gisait. Et le Roi était seul. De là plusieurs intrigues. La vieille madame la Duchesse eût voulu faire sauter Fleury et remonter son fils, M. le Duc, en fournissant sa bru au Roi.
    Mais Fleury s'en doutait. Il soupçonnait moins l'autre intrigue. Son ministre de confiance, Chauvelin, homme à projets hardis, eût voulu nous tirer du néant, faire du Richelieu contre l'Autriche et l'Angleterre. En dessous il créait un parti de la guerre que Villars en dessus prêchait ouvertement. Ce sournois Chauvelin ( Grisenoire , comme on l'appelait) imagina d'escamoter le Roi par l'influence des petits camarades, que l'on nommait les Marmousets . Comme neveu de l'ami de Fleury, du cardinal Rohan, le petit Gesvres, peu suspect, restait là à tisser ses jolis ouvrages de femme où le Roi s'amusait ( Villars ), et très-volontiers il tissa le filet pour prendre Fleury. Un mémoire fin, adroit, respectueux (terrible contre lui) est dans les mains de Gesvres, qui le cache pour donner envie. Le Roi l'entrevoit, le lui prend. Il voit, non sans terreur, «que Fleury, par son imprudence, mène les choses à la guerre civile.» Il en est si frappé qu'il copie le mémoire. Seulement au coucher il l'oublie dans ses poches, où Bachelier le trouve. Il le porte à Fleury.
    Deux choses étaient dans cette affaire, l'une fort légitime, que le Roi voulût s'éclairer,—l'autre obscure, assez triste, que le Roi, à vingt ans, subît de nouveau l'influence d'amis déjà notés et punis pour leurs mœurs. Fleury le prit par là. Le Roi fut atterré. Après avoir menti, nié, Fleury le menaçant, lâchement il livra Gesvres, il trahit Épernon, signa leur exil pour deux ans. Sa peine, à lui, fut qu'il perdit les clefs de son appartement. Fleury lui change ses serrures et fait faire d'autres clefs qu'il donne à ses petits espions. L'espion ordinaire Bachelier est solennellement récompensé. Tout en restant valet de chambre, gardien du Roi, il devint un seigneur, intendant de Marly, de Trianon, etc. Le Roi ne souffla mot, vécut aussi bien avec lui.
    Villars fut étonné (1731) de voir tombé si bas, si ennuyé, si faible , ce jeune homme de vingt et un ans. Fleury, à soixante-quinze, par contraste, sort des habitudes qu'il eut toujours. On se presse chez lui, chez son valet Barjac qui distribue les places, qui fait des fermiers généraux. La cour entière, le soir, s'étouffe au coucher de Fleury. Le voilà roi, ce semble. Notre drapeau, du blanc, passe au noir. La soutane devient le drapeau de la France.
    Et qu'en dit l'Europe? Elle en rit. Notre amie l'Angleterre ne nous consulte plus. Elle nous laisse là seuls, s'arrange avec l'Autriche.
    «Faible gouvernement, mais modéré et doux .» Erreur. Sous lui s'aggrave la terreur protestante; le clergé veut que sous le mot relaps on atteigne, on englobe un peuple tout entier, désormais passible demort; et toujours dans l'angoisse, voyant sa mort, sa vie, dans les mains des curés (1730, Lemontey, II, 152). Ce doux gouvernement a détruit la Sorbonne (en enlevant quarante-huit docteurs), a détruit Sainte-Barbe, a étouffé la presse qui, depuis les rigueurs de 1728, ne souffle plus. Du plus haut au plus bas, on tient tout, rien ne peut percer. On a parfaitement étoupé jusqu'aux fentes par où pourrait venir un son, une lueur. Sécurité parfaite.
    Mais juste en ce moment, du plus loin, du plus bas, part un cruel coup de sifflet!
    La France a des moments bien dangereux où le rire lui échappe. On l'a vu en Révolution. La mère de Dieu fit crouler Robespierre. Et soixante ans avant, la Cadière blesse à mort la puissance ecclésiastique.
    Aux miracles des jansénistes, les jésuites avaient répondu: «Ce ne sont pas de vrais miracles. On n'en fait qu'avec la doctrine. On en fera... Espérez, attendez.»
    Il s'en fit. De Toulon, d'Aix, de la bruyante Provence, aux rieurs de Paris une nouvelle arrive. C'est un miracle... des Jésuites (août 1731, Barbier , II, 179, 192).
    Miracle! un vieux jésuite, disciplinant

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