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Histoire De France 1758-1789, Volume 19

Histoire De France 1758-1789, Volume 19

Titel: Histoire De France 1758-1789, Volume 19 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Michelet
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domestiques, le grand aumônier, le grand chambellan, le grand écuyer, le grand maître de sa maison, et soncapitaine des gardes!—Ajoutez quelques dignitaires, prélats, maréchaux, gouverneurs, chevaliers de Saint-Louis, quatre seigneurs titrés (en tout vingt et une personnes). Cela s'appelait Cour plénière . Louis XVI, en sa Cour plénière , renouvelait Charlemagne. Comme splendeur, comme costume, rien n'était plus éblouissant. Qui dit Cour plénière dit fête (selon tous les dictionnaires). La monarchie allait être une fête perpétuelle.
    Quel dommage que le roi, si gauche, soit peu propre à jouer Charlemagne ou Philippe-Auguste! Combien ce rôle irait mieux à ce prince de roman, au jeune et brillant Galaor, le cousin d'Amadis de Gaule! On donnait volontiers ce nom au charmant comte d'Artois. Son agréable figure, qu'une bouche toujours entr'ouverte faisait paraître un peu niaise, promettait déjà à la France le héros de l'émigration, le roi pour qui 1815 a trouvé le genre troubadour .
    La Sottise n'est que sotte, parfois modeste et prudente. Mais au delà, plus naïve s'étend largement la Bêtise. Elle parade, elle triomphe, fait la roue au soleil. C'est le caractère qui reluit dans la nouvelle institution. Elle est très-bien combinée pour détruire ce qui reste de la religion monarchique. Le roi était dans celle-ci un être à part que Dieu souffle et inspire (c'est ce que Louis XIV dit expressément à son petit-fils). Ici, derrière le roi, on voit, au lieu de Dieu, la valetaille qui remue le mannequin.
    Ce qui prouve que ces valets de Versailles travaillaient pour eux, c'est qu'ils se sont nommés à vie . Choisis irrévocablement, ils siégent dans leur dignitéaussi fermes que le roi. Ceci répond à la plainte qu'avait faite l'un d'eux (Besenval): «Qu'à Versailles, on n'est sûr de rien.»
    Une chose admirable encore, d'inimitable insolence, que Lamoignon certainement n'écrivit que sous la dictée de ces fous, ce fut l'étrange article: «Les Parlements ne jugent plus que les nobles et les prêtres . Les roturiers sont désormais jugés par de simples bailliages.»
    Cela fait deux nations. Hors des ordres privilégiés, la vie humaine est si peu comptée, que pour en décider, il suffit des juges inférieurs.
    Il va sans dire qu'après un tel outrage à la nation, les réformes de Lamoignon dans le droit criminel ne comptaient guère; quelque bonnes qu'elles fussent, personne n'y fit attention.
    Les Parlements étaient réduits à quelques membres. Le reste supprimé, ruiné, remboursé quand et comment? En rentes apparemment sur ce trésor insolvable, qui va suspendre ses payements.
    Ce que je crois de Brienne dans cette belle composition, c'est un article de ruse, d'une ruse maladroite, risible invention d'un cerveau faible, que la maladie affaiblit encore.
    Dans le cas de circonstances extraordinaires où nous serions obligés d'établir de nouveaux impôts (mot plaisant pour un homme, qui n'a pas cessé d'être dans cet état extraordinaire)... d'établir de nouveaux impôts avant les États généraux, l'enregistrement de ces impôts par la Cour plénière n'aura qu'un effet provisoire jusqu'aux États que nous convoquons.
    Ainsi le roi à volonté va créer de nouveaux impôts.Pour le faire avaler, on confirme l'espoir d'avoir les États généraux. Mais cela est trop fin. La Cour est indignée de ces ménagements de Brienne. Elle reprend la plume. «Eh! quoi, Sire? La Cour plénière alors ne fera que du provisoire? Comment! Votre Majesté se subordonne à ces États?...» La reine, ou le comte d'Artois, ajoutent fièrement une ligne qui anéantit tout le reste, ôte espoir, détruit les États, même avant qu'on les ait donnés, qui défie la nation, ferme solidement les bourses et rend la banqueroute sûre:
    Sur cette délibération des États, nous statuerons définitivement. Donc les États ne seront rien qu'une vaine cérémonie. On a soin ici de le dire, d'avertir la Nation.
    Cette pièce extraordinaire, éclose une fois de sa boule, courut partout secrètement. Plusieurs parlements de province la reçurent, protestèrent d'avance. Ici les pairs s'effrayèrent, et crurent, comme les magistrats, qu'autour de ce monde en délire, il fallait au plus tôt dresser des garde-fous. M. de La Rochefoucauld, admirateur et traducteur des constitutions américaines, fut probablement celui qui conseilla de faire une Déclaration des droits . Les pairs, unis au Parlement,

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