Histoire de la Bretagne ancienne et moderne
étant mort quatre ans après,
Henri son frère eut comme lui le titre de duc de Bretagne.
Depuis 1532, la Bretagne, unie
indissolublement à la couronne de France, n’a eu ni ducs
particuliers, ni même aucun des enfants de nos rois qui aient porté
le titre de duc de Bretagne, excepté sur la fin du règne de
Louis XIV, où les deux fils aînés du duc de Bourgogne
portèrent successivement le titre de duc de Bretagne.
Partie 4
CHAPITRE XII
La Ligue en Bretagne.
(1576 – 1598)
Le calvinisme s’étant répandu en France sous
le règne de François I er , la Bretagne fut, de
toutes les provinces de ce royaume, celle où il fit le moins de
progrès. Lorsque la ligue eut été formée par les Guise en 1576, ce
pays fut encore assez tranquille pendant plusieurs années et ne
prit aucune part à la guerre civile. Mais, sous le règne de
Henri III, le duc de Mercœur en ayant été fait gouverneur le 5
septembre 1582, elle se vit agitée des plus grands troubles, et il
s’y passa des événements mémorables, dont peu d’historiens de
Bretagne ont parlé jusqu’ici.
Henri III, à son retour de Pologne, avait
épousé Louise de Lorraine, fille du comte de Vaudemont et sœur du
duc de Mercœur. Le roi prit dès lors le duc en amitié, et ne songea
qu’à l’élever ; il lui fit épouser Marie de Luxembourg,
duchesse de Penthièvre et vicomtesse de Martigue, d’une des plus
grandes maisons de l’Europe, et qui était d’ailleurs une très-riche
héritière. Il fit encore plus pour son beau-frère ; il ôta au
duc de Montpensier, prince de son sang, le gouvernement de la
Bretagne, dont son petit-fils le prince de Dombes avait la
survivance, pour le donner au duc de Mercœur, qui n’avait alors que
vingt-quatre ans, malgré les remontrances du chancelier de
Chiverni, qui représenta au roi que dans ces temps orageux c’était
agir contre les lois de la politique que de confier un gouvernement
de cette importance à un prince qui avait, du chef de sa femme, des
prétentions à la souveraineté de cette même province dont il le
rendait le maître ; mais la complaisance du roi pour sa femme
l’emporta sur les sages avis du chancelier.
Le duc d’Alençon, frère unique du roi, étant
mort en 1584, et Henri III, quoique marié depuis dix ans,
n’ayant point d’enfants, le duc de Mercœur regarda cet événement
comme très-favorable au dessein qu’il méditait. La vie que le roi
menait annonçait qu’elle ne serait pas longue, et la situation des
affaires faisait espérer aux princes lorrains, qui avaient causé
jusque alors tant de troubles dans l’État, qu’elles y seraient plus
brouillées que jamais, le roi de Navarre (depuis Henri IV)
étant engagé dans l’hérésie et regardé par eux comme incapable de
parvenir à la couronne.
Ces flatteuses espérances ne satisfirent point
l’ambitieuse impatience des Guise. En 1585, soutenus de la
puissance de Philippe II, roi d’Espagne, et d’un grand nombre
de factieux, ils formèrent une ligue, prirent les armes et se
saisirent de plusieurs places. Le roi, alarmé de leurs menaces et
de leurs progrès, dut faire un traité avec les chefs de la Ligue,
c’est-à-dire avec ses propres sujets. Il s’engagea à faire la
guerre aux calvinistes de son royaume, devenus d’ailleurs ses plus
dangereux ennemis, et à donner la conduite de cette guerre aux
Ligueurs. Il fut stipulé expressément que le roi leur livrerait des
places de sûreté. Le duc de Mercœur eut soin d’y mettre des
commandants tout dévoués à ses intérêts.
Bientôt le duc, excité par les autres princes
de sa maison, se mit en campagne et entra dans le Poitou avec des
troupes qu’il tira de son gouvernement, au nombre de quatre mille
cinq cents hommes d’infanterie, avec quelque cavalerie. Le monarque
indolent, qui n’avait consenti qu’à regret à la guerre contre les
protestants, avait retardé la marche de ses armées. Mercœur,
n’étant point soutenu comme il l’espérait, se vit tout d’un coup
sur les bras des forces très-supérieures aux siennes. Il jugea à
propos de se retirer à Fontenay pour y attendre l’armée du
roi ; mais cette ville ayant refusé de le recevoir, il fut
obligé de se loger dans le faubourg, où les habitants ne lui
fournirent que peu de vivres et où il se vit bientôt attaqué par le
prince de Condé, un des capitaines protestants. La nuit mit fin au
combat, sans aucun avantage de part ni d’autre. Le lendemain,
Mercœur se
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