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Histoire de la Bretagne ancienne et moderne

Histoire de la Bretagne ancienne et moderne

Titel: Histoire de la Bretagne ancienne et moderne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles Barthélémy (de Paris)
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grand nombre de gens
armés, entrèrent une nuit par cette poterne, et montèrent à la
chambre où La Trémoille était couché. Un écuyer de la maison du
connétable se jeta alors sur lui, et lui enfonça sa dague dans le
ventre ; mais comme la dague était fort courte et que La
Trémoille était très-gras, il n’en fut pas dangereusement blessé.
On ne voulut point le tuer ; on se contenta de le prendre et
de le mener à Montrésor, château appartenant au sire de Büeil, l’un
des conjurés.
    Charles VII, informé de cette violence,
craignit que ce ne fût une conspiration contre sa personne ;
mais les amis de Richemont rassurèrent le roi, en lui protestant
qu’il n’y avait aucun d’eux qui ne fût prêt à répandre son sang
pour lui. Ce prince parut dans la suite se mettre peu en peine de
ce qui était arrivé à La Trémoille ; car, dans l’assemblée des
états qui quelque temps après fut tenue à Tours, il déclara par la
bouche de son chancelier qu’il approuvait ce que les seigneurs amis
du connétable avaient fait. Le comte du Maine succéda à La
Trémoille, qui fut ensuite mis en liberté par de Büeil, pour la
somme de six mille écus d’or qu’il lui paya. Richemont, n’ayant
plus rien à craindre du puissant favori qui l’opprimait, exerça
librement les fonctions de sa charge. Il alla saluer le roi, qui le
reçut très-bien, et l’envoya en Champagne faire la guerre aux
Anglais. Cependant les députés du roi de France, du roi
d’Angleterre et du duc de Bourgogne s’assemblèrent à Arras (1435)
pour y traiter de la paix. Ceux du duc de Bourgogne firent des
demandes excessives ; mais l’intérêt qu’on avait à le séparer
des Anglais les fit accepter. À l’égard des Anglais, on ne put
s’entendre avec eux, et on continua de part et d’autre à se faire
vivement la guerre. Le connétable y acquit beaucoup de gloire, et,
aidé de plusieurs seigneurs et chevaliers bretons, il battit
souvent l’ennemi.
    Il ne se passa plus rien de mémorable sous le
règne de Jean V que le supplice du fameux maréchal de Raiz, de
la maison de Laval, un des plus grands seigneurs de la Bretagne et
de la France, que ni son nom, ni son rang, ni ses richesses, ni
celles de sa famille, ne purent sauver du dernier supplice. Le
célèbre procès du maréchal de Raiz est un monument remarquable de
l’esprit et des mœurs d’un siècle où s’alliaient étrangement la
bravoure et la faiblesse, les honneurs et le crime, la superstition
et l’incrédulité, la richesse, la puissance et l’abjection.
    Gilles de Laval, baron de Raiz, avait épousé,
jeune encore, Catherine de Thouars, dame de Tiffauges, Ponsauges,
Savenay, etc. Son père, en mourant, lui avait laissé une des plus
importantes seigneuries de la Bretagne, et sa mère, Marie de Craon,
un nombre considérable de terres, places et châteaux dans le Maine,
l’Anjou et le Poitou. Ses revenus les plus ordinaires s’élevaient
au delà d’un million de rentes de nos jours. Il possédait de plus
quantité de droits éventuels qui lui rapportaient de temps à autre
des sommes immenses. Comme tous les gentilshommes, il embrassa la
carrière des armes, se distingua par sa valeur, rendit d’éminents
services à Charles VII en lui menant de nombreuses compagnies
d’hommes d’armes levées de ses deniers, et le bâton de maréchal de
France fut la juste récompense de tout son dévouement. Une opinion
exagérée de sa haute position l’égara, et il crut devoir en relever
l’éclat en se donnant deux cents gardes du corps à cheval, qui
l’escortaient en toute circonstance. En un mot, sa prodigalité
devint extrême et atteignit à la folie. Ses revenus furent bientôt
loin de suffire à ses dépenses. Il se jeta alors dans la voie
ruineuse et déshonorante des emprunts, paya des intérêts
exorbitants ; puis il vendit des droits, des rentes et des
terres à vil prix.
    Reconnaissant enfin l’insuffisance de ses
revenus et des ressources que lui procuraient les usuriers pour
subvenir à ses magnificences et à ses largesses, Gilles de Raiz
crut devoir s’adresser à Dieu, qui, selon sa folle vanité,
respectait trop la maison de Rohan et de Laval pour lui rien
refuser. Mais Dieu n’ayant pas écouté les vœux impies du maréchal,
cet insensé résolut d’obtenir par d’autres voies la puissance et
les trésors qu’il ambitionnait. Il se jeta à corps perdu dans les
pratiques ruineuses de l’alchimie, dans les expériences

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