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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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fierté. Les Aries (c’est ainsi qu’ils sont décrits dans le style
énergique de Tacite) s’étudient à augmenter leur férocité naturelle par les
secours de l’art et du stratagème. Ils noircissent leurs boucliers, leurs
corps, leurs visages, et choisissent la nuit la plus sombre pour attaquer
l’ennemi. La surprise, l’horreur des ténèbres, le seul aspect de cette armée
épouvantable, qui semble sortir des enfers [1045] , glacent
d’effroi les coeurs les plus intrépides ; car, dans un combat, les yeux sont
toujours vaincus les premiers [1046] .
Cependant les armes et la discipline des Romains détruisirent facilement ces
horribles fantômes. Les Lygiens furent taillés en pièces dans une action
générale ; et Senno, le plus renommé de leurs chefs, tomba entre les mains
dd Probus. Ce prudent empereur, ne voulant pas réduire au désespoir de si
braves ennemis, leur accorda une capitulation honorable, et leur permit de
retourner en sûreté dans leur patrie. Mais  les pertes qu’ils avaient essuyés
dans la marche, dans la bataille, et celles qu’ils essuyèrent dans la retraite,
anéantirent la nation. L’histoire de la Germanie ou de l’empire ne répète plus
même le nom des Lygiens. Ces victoires, qui furent le salut de la Gaule,
coûtèrent, dit-on, aux ennemis quatre cent mille hommes ; entreprise
pénible pour les Romains, et dispendieuse pour l’empereur, qui payait une pièce
d’or chaque tête de Barbare [1047] .
Cependant, comme la réputation des guerriers est fondée sur la destruction du
genre humain, nous pouvons naturellement soupçonner que le nombre des morts fut
exagéré par l’avarice des soldats, et que la vanité prodigue du prince ne se
mit pas en peine d’en faire une recherche bien exacte.
    Depuis l’expédition de Maximin, les généraux romains
s’étaient bornés à une guerre défensive contre les nations germaniques qui
pressaient continuellement les frontières de l’empire. Probus, plus
entreprenant, résolut de profiter de ses victoires. Intimement persuadé que les
Barbares ne consentiraient jamais à la paix tant que leur pays ne souffrirait
pas des calamités de la guerre, il passa le Rhin, et fit briller ses aigles
invincibles sur les rives de l’Elbe et du Necker. Sa présence étonna la
Germanie épuisée par les mauvais succès de la dernière migration. Neuf des
princes les plus considérables du pays se rendirent à son camp, et se
prosternèrent à ses pieds ; ils reçurent humblement les conditions qu’il
lui plut de dicter. Le vainqueur exigeait qu’on lui remît exactement les
dépouilles et les prisonniers enlevés aux provinces. Il obligea leurs propres
magistrats à sévir contre ceux qui retiendraient quelque partie du butin. Un
tribut considérable, consistant en blé, en troupeaux et en chevaux, les seules
richesses des Barbares, fût destiné à l’entretien des garnisons établies sur
les limites de leur territoire. Probus avait même conçu le dessein de forcer
les Germains à quitter l’usage des armes. Il voulait les engager à confier
leurs différends à la justice de Rome, et leur sûreté à sa puissance. Ce plan,
magnifique aurait exigé la résidence constante d’un gouverneur impérial,
soutenu d’une armée nombreuse : aussi Probus jugea-t-il à propos de différer
l’exécution d’un si grand projet, dont l’avantage était réellement plus
spécieux que solide [1048] .
Que la Germanie eut été réduite en province avec des frais et des peines
immenses, les Romains n’auraient eu qu’une frontière plus étendue à défendre
contre les Scythes, Barbares plus redoutables par leur courage et par leur activité.
    Au lieu de réduire au rang de sujets les belliqueux de la
Germanie, Probus se borna au soin plus modeste d’élever un rempart contre leurs
incursions. Le pays qui forme maintenant le cercle de Souabe, était devenu
désert du temps d’Auguste par l’émigration de ses anciens habitants [1049]  ; la
fertilité du sol attira bientôt une nouvelle colonie des provinces de la Gaule.
Des bandes d’aventuriers, d’un caractère vagabond et sans fortune, s’emparèrent
de cette contrée, dont les États voisins se disputaient la possession ; et
ils reconnurent la majesté de l’empire en lui payant le dixième de leurs
revenus [1050] .
Pour protéger ces nouveaux sujets, les Romains construisirent des postes qu’ils
distribuèrent par degrés, depuis le Rhin jusqu’au Danube. Vers le règne

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