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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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d’Adrien,
lorsqu’on imagina un pareil moyen de défense, ces postes furent couverts et
communiquèrent l’un à l’autre par un fort retranchement d’arbre et de
palissades. A des remparts si informes, l’empereur Probus substitua une
muraille de pierres, d’une grande hauteur, fortifiée par des tours placées à
des distances convenables. Elle commençait dans le voisinage de Neustadt et de
Ratisbonne sur le Danube ; elle s’étendait à travers des collines, des
vallées, des rivières et des marais, jusqu’à Wimpfen sur le Necker ; enfin
elle se terminait aux bords du Rhin, après un circuit de deux cents milles
environ [1051] .
Cette barrière importante unissant ainsi les deux grands fleuves qui
défendaient les provinces de l’Europe, il paraît qu’elle remplissait l’espace
vide par lequel les Barbares, et surtout les Allemands pouvaient pénétrer avec
le plus de facilité dans le centre de l’empire. Mais l’expérience de l’univers,
depuis la Chine jusque dans la Bretagne, prouve combien il est inutile de
fortifier une grande étendue de pays [1052] .
Un ennemi actif, libre de varier l’attaque et de choisir le moment favorable,
doit enfin découvrir quelque endroit faible où profiter d’un instant de
négligence. Les forces, aussi bien que l’attention de ceux qui défendent cette
chaîne de fortifications, se trouvent divisées ; et tels sont les effets
d’une terreur aveugle sur les troupes les plus fermes, qu’une ligne rompue en
un seul endroit est presque aussitôt abandonnée. Le sort qu’éprouva le mur de
Probus peut confirmer l’observation générale : il fut renversé par les
Allemands peu d’années après la mort de ce prince. Ses ruines éparses, que
l’admiration stupide attribue universellement à la puissance du démon, ne
servent maintenant qu’à exciter la surprise du paysan  de la Souabe.
    Parmi les conditions qu’imposa l’empereur aux nations
vaincues, une des plus utiles fut l’obligation de fournir à l’armée romaine
seize mille hommes, les plus braves et les plus robustes de leur jeunesse.
Probus les dispersa dans toutes les provinces, et distribua ce renfort
dangereux en petites bandes de cinquante ou soixante Germains chacune, parmi
les troupes nationales, observant judicieusement que les secours que la
république tirait des Barbares devaient être sentis, mais non pas aperçus [1053] . Ce secours
paraissait alors nécessaire : amollis par le luxe, les faibles habitants de
l’Italie et des provinces intérieures ne pouvaient supporter le poids des armes
; la nature donnait toujours aux peuples nés sur la frontière du Rhin et du
Danube, des âmes et des corps capables de résister aux fatigues des camps. Mais
une suite perpétuelle de guerres en avait insensiblement diminué le nombre. Les
mariages devenaient plus rares, l’agriculture était entièrement négligée : ces
causes, qui affectent les principes de la population, non seulement
détruisaient la force actuelle de ces contrées, elles étouffaient encore
l’espoir des générations futures. Le sage Probus conçut le projet grand et
utile de ranimer les frontières épuisées, en y introduisant de nouvelles
colonies de Barbares prisonniers ou fugitifs, auxquels il accorda des terres,
des troupeaux, les instruments propres à la culture, et tous les encouragements
capables de former une race de soldats pour le service de la république. Il
transporta un corps considérable de Vandales en Bretagne, selon toutes les
apparences, dans la province de Cambridge [1054] .
L’impossibilité de s’échapper accoutuma ces nouveaux habitants à leur
situation ; et dans les troupes qui, par la suite, déchirèrent le sein de
cette île, ils se montrèrent les plus zélés défenseurs de l’État [1055] . Un grand
nombre de Francs et de Gépides furent établis sur les rives du Rhin et du
Danube ; cent mille Bastarnes, chassés de leur patrie; acceptèrent avec
joie un établissement dans la Thrace : bientôt ils adoptèrent les sentiments et
les mœurs des sujets romains [1056] .
Mais les espérances de Probus furent souvent trompées : des Barbares inquiets,
élevés dans l’oisiveté, ne pouvaient se résoudre à mener une vie, sédentaire ;
leurs bras se refusaient aux travaux lents de l’agriculture ; ils conservaient
pour l’indépendance un amour indomptable. Cet esprit de liberté luttant sans
cesse contre le despotisme, les précipita dans des révoltés également fatales

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