Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain
ses attaques. La trahison que ce malheureux prince avait
éprouvée, le disposait à douter de la sincérité de ses plus fidèles amis. Les
émissaires de Maximien persuadèrent facilement à Sévère qu’il se tramait un
complot pour livrer la ville ; et, dans la crainte qu’il avait de se voir
remis à la discrétion d’un vainqueur irrité, ils le déterminèrent à recevoir la
promesse d’une capitulation honorable. Il fut traité d’abord avec humanité et
avec respect. Maximien mena l’empereur captif à Rome et lui donna, l’assurance
la plus solennelle que sa vie était en sûreté, puisqu’il avait abandonné la
pourpre. Mais Sévère ne put obtenir qu’une mort douce et les honneurs funèbres
réservés aux empereurs. Lorsque la sentence lui fut signifiée, on le laissa
maître de la maniéré de l’exécuter. Il se fit ouvrir ses veines à l’exemple des
anciens [février 307] . Dès qu’il eut rendu les derniers soupirs [1253] , son corps fut
porté au tombeau qui avait été construit pour la famille de Gallien.
Quoique le caractère de Maxence et celui de Constantin
eussent très peu de rapport l’un avec l’autre, leur situation et leur intérêt
étaient les mêmes, et la prudence exigeait qu’ils réunissent leurs forces
contre l’ennemi commun. L’infatigable Maximien, quoique rang supérieur, et
malgré son âge avancé, passa les Alpes, sollicita une entrevue personnelle avec
le souverain de la Gaule, et lui offrit sa fille Fausta, qu’il’ avait amenée
avec lui, comme le gage de la nouvelle alliance. Le mariage fait célébré dans
la ville d’Arles avec une magnificence extraordinaire, et l’ancien collègue de
Dioclétien, ressaisissant tous les droits qu’il prétendait avoir à l’empire
d’Occident, conféra le titre d’Auguste à son gendre et à son allié [21 mars
307] . En recevant cette dignité des mains de son beau-père, Constantin
paraissait embrasser la cause de Rome et du sénat ; mais il ne s’exprima
que d’une manière équivoque, et les secours qu’il fournit furent lents et
incapables de faire pencher la balance. Il observait avec attention les
démarches des souverains de l’Italie et de l’empereur d’Orient, qui allaient
bientôt mesurer leurs forces, et il se préparait à consulter, dans la suite, sa
sûreté et son ambition [1254] .
Une guerre si importante exigeait la présence et les talents
de Galère. A la tête d’une armée formidable, rassemblée dans l’Illyrie et dans
les provinces orientales, il entra en Italie, résolu de venger la mort de
Sévère, et de châtier les Romains rebelles, ou, comme s’exprimait ce Barbare
furieux, avec le projet d’exterminer le sénat et de passer tout le peuple au
fil de l’épée. Mais l’habile Maximien avait formé un plan judicieux de défense.
Son rival trouva toutes les places fortifiées, inaccessibles et remplies
d’ennemis, et quoiqu’il eût pénétré jusqu’à Narrai, à soixante milles de Rome,
sa domination en Italie ne s’étendait pas au-delà des limites étroites de son
camp. A la vue des obstacles qui naissaient de toutes parts, le superbe Galère
daigna le premier parler de réconciliation. Il envoya deux de ses principaux
officiers aux souverains de Rome pour leur offrir une entrevue. Ces députés
assurèrent Maxence qu’il avait tout à espérer, d’un prince qui avait pour lui
les sentiments et la tendresse d’un père, et qu’il devait bien plus compter sur
sa générosité que sur les chances incertaines de la guerre [1255] . La proposition
de l’empereur d’Orient fut rejetée avec fermeté, et sa perfide amitié refusée
avec mépris. Il s’aperçu bientôt que s’il ne se déterminait à la retraite, il
avait tout lieu d’appréhender le sort de Sévère. Pour hâter sa ruine, les
Romains prodiguaient ces mêmes richesses qu’ils n’avaient pas voulu livrer à sa
tyrannique rapacité. Le nom de Maximien, la conduite populaire de son fils, des
sommes considérables distribuées en secret, et la promesse de récompenses
encore plus magnifiques, réprimèrent l’ardeur des légions d’Illyrie, et
corrompirent leur fidélité. Enfin, lorsque Galère donna le signal du départ, ce
ne fut qu’avec quelque peine qu’il put engager ses vétérans à ne pas déserter
un étendard qui les avait menés tant de fois à l’honneur et à la victoire. Un
auteur contemporain attribue le peu de succès de cette expédition à deux autres
causes : mais
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