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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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idées
vagues et peu exactes ne conviennent pas à un historien moderne : guidé par des
connaissances plus sûres, il est en état de présenter à ses lecteurs un tableau
mieux proportionné, en leur faisant observer que l’empire avait plus de deux
mille milles de large depuis le mur d’Antonin et les limites septentrionales de
la Dacie jusqu’au mont Atlas et jusqu’au tropique du Cancer, et qu’il
s’étendait en longueur dans un espace de plus de trois mille milles depuis
l’Euphrate jusqu’à l’Océan occidental. Il était situé dans les plus beaux lieux
de la zone tempérée, entre le 24 e et le 56 e degré de
latitude nord. Enfin, on évaluait sur l’étendue, à peu prés à six cent mille
milles carrés, dont la plais grande partie consistait en terres fertiles et
très bien cultivées [104] .

Chapitre II
De l’union et de la prospérité intérieure de l’empire romain dans le siècle des
Antonins.
    CE n’est pas seulement par l’étendue et par la rapidité des
conquêtes que nous devons juger de la grandeur de Rome. Le souverain des
déserts de la Russie donne des lois à une partie du globe bien plus considérable.
Sept ans après son départ de Macédoine, Alexandre avait érigé des trophées sur
les rives de l’Hyphase [105] .
En moins d’un siècle l’invincible Zingis et les princes mongols, ses
descendants, étendirent leurs cruelles dévastations à leur empire passager
depuis la mer de la Chine jusqu’aux confins de l’Égypte et de l’Allemagne [106] . Mais le solide
édifice de la puissance romaine avait été l’ouvrage de la sagesse de plusieurs
siècles. Les contrées soumises à Trajan et aux Antonins s’étaient étroitement
unies entre elles par les lois et embellies par les ans. Il pouvait arriver
qu’elles eussent à souffrir occasionnellement de quelques abus du pouvoir
confié aux délégués du souverain ; mais, en général, le principe du
gouvernement était sage, simple, et établi pour le bonheur des peuples. Les
habitants des provinces exerçaient paisiblement le culte de leurs ancêtres, et,
confondus avec les conquérants, ils jouissaient des mêmes avantages, et
parcouraient d’un pas égal la carrière des honneurs.
    I . La politique du sénat et des souverains de Rome
fut heureusement secondée, dans tout ce qui concernait la religion, par les
lumières de quelques-uns de leurs sujets, et par la superstition aveugle des
autres. Les différents cultes admis dans l’empire étaient considérés par le peuple
comme également vrais, par le philosophe comme également faux, et par le
magistrat comme également utiles. Ainsi la tolérance entretenait une indulgence
réciproque et même une pieuse concorde.
    La superstition du peuple n’était ni irritée par l’aigreur
théologique, ni renfermée dans les chaînes d’un système spéculatif. Fidèlement
attaché aux cérémonies de son pays, le polythéiste recevait avec une foi
implicite les différentes religions de la terre [107] . La crainte, la
connaissance, la curiosité, un songe, un présage, un accident extraordinaire,
un voyage entrepris dans des régions éloignées, étaient autant de causes, qui
l’engageaient perpétuellement à multiplier les articles de sa foi, et à
augmenter le nombre de ses dieux tutélaires. Le frêle tissu de la mythologie
païenne était composé d’une foule de matériaux différents, à la vérité, mais
non mal assortis. Dès qu’il était reconnu que les héros et les sages dont la
vie ou la mort avait été utile à leur patrie, étaient revêtus une puissance
immortelle, on ne pouvait se dispenser d’avouer qu’ils méritaient, sinon des
adorations, du moins la vénération du genre humain. Les divinités d’un millier
de bocages, d’un millier de sources jouissaient en paix de leur influence
locale ; et lorsque le Romain conjurait la colère du Tibre, il ne pouvait
mépriser l’habitant de l’Égypte enrichissant de ses offrandes la bienfaisante
divinité du Nil. Les puissances visibles de la nature, les planètes et les
éléments, étaient les mêmes dans tout l’univers : les gouverneurs invisibles du
monde moral ne pouvaient être représentés que par des fictions et des
allégories entièrement semblables. Toutes les vertus, tous les vices, devinrent
autant de divinités. Chaque art, chaque profession, reconnut parmi les
habitants du ciel un protecteur dont les attributs dans les siècles et les
contrées les plus éloignées,

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