Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain
),
principe de mouvement et de vie dont la nature nous est inconnue. Comment
eût-il pu, d’après cela, regarder le logos comme une substance douée d’une
existence indépendante ? Ailleurs il- l’explique par ces deux mots επιστημη , science , et διανοια , intelligence ,
qui désignent des attributs de la Divinité. ( Sophist ., tome II, page
299.) Enfin il résulte de plusieurs passages, entre autres du Philor .,
tome IV, page 247-248, que Platon n’a jamais prêté aux mots noûs , logos ,
que l’un de ces deux sens le résultat de l’action de la Divinité, c’est-à-dire
l’ordre, l’ensemble des lois qui gouvernent le monde ; et c’est ici l’ âme
raisonnable du monde ( λογιστιxη
ψυχη ), ou la cause même du résultat ; c’est-à-dire
l’intelligence divine. Quand il sépare Dieu, le type idéal du monde, et la
matière, c’est pour expliquer comment, dans son système, Dieu a procédé lors de
la création pour unir le principe d’ordre qu’il avait en lui, sa propre
intelligence, le logos, au principe de mouvement, à l’ âme irraisonnable , alogos psuchè , qui était dans la matière, quand il parle de la place
qu’occupe le monde idéal ( τοπος
νοητος ), c’est pour désigner l’entendement
divin qui en est la cause.
Enfin, on ne trouve nulle part dans ses écrits une
véritable personnification des êtres prétendus dont on a dit qu’il formait une
Trinité ; et si cette personnification existait elle s’appliquerait également à
plusieurs autres idées, dont on pourrait former plusieurs Trinités différentes.
Du reste, cette erreur dans laquelle sont tombés la
plupart des interprètes de Platon, tant anciens que modernes, était assez
naturelle. Outre les piéges que leur tendait son style figuré, outre la
nécessité d’embrasser en entier le système de osés idées, et de ne pas
expliquer les passages isolément, la nature même de sa doctrine pouvait y
conduire. Lorsque Platon parut l’incertitude des connaissances humaines et les
tromperies continuelles des sens étaient reconnues, et donnaient lieu à un
scepticisme, général. Socrate avait voulu mettre la morale à l’abri de ce
scepticisme ; Platon tenta d’en sauver la métaphysique en cherchant dans
l’entendement humain la source de la certitude que les sens ne peuvent fournir.
Il inventa le système des idées innées, dont l’ensemble formait, selon lui, le
monde idéal, et affirma que ces idées étaient les véritables attributs attachés
non seulement à nos représentations des objets, mais encore à la nature des
objets eux-mêmes ; nature que nous pouvions connaître d’après elles. Il donnait
donc à ces idées une existence positive comme attributs ; ses commentateurs
pouvaient aisément leur donner une existence réelle comme substances d’autant
que les termes dont il se servait pour les désigner, αυτο
το xαλον, αύτο το
αγαθον ( la beauté elle-même, la bonté
elle-même ), se prêtaient à cette substantialisation ( hypostasis .)
( Note de l’Editeur .)
[2315] Brucker., Hist. philosoph ., tome I, page
1349-1357. L’école d’Alexandrie est célébrée par Strabon (XVII) et par Ammien
XXII, 6).
[2316] Josèphe, Antiquités , ; VII, c. 1, 3 ; Basnage, Hist. des Juifs , VII, c. 7.
[2317] Relativement à l’origine de la philosophie juive,
voyez Eusèbe, Prœparat. evangel ., 8, 9, 10. Philon prétend que les
Thérapeutes étudiaient la philosophie, et Brucker a prouvé ( Hist. Philosoph .,
t. II, p. 787) qu’ils donnaient la préférence à celle de Platon.
[2318] Voyez Calmet, Dissertations sur la Bible , t.
II, p. 277. Plusieurs des pères de l’Église ont reçu le Livre de la Sagesse de
Salomon comme un ouvragé de ce monarque ; et, quoique rejeté par les
protestants, faute d’un original hébreu, il a obtenu, avec le reste de la Vulgate ,
la sanction du concile de Trente.
[2319] La philosophie de Platon n’était pas la seule source
de celle qu’on professait à l’école d’Alexandrie. Cette ville, où se réunirent
des lettrés grecs, juifs, égyptiens fut le théâtre d’un bizarre amalgame des
systèmes de ces trois peuples les Grecs y apportèrent un platonisme déjà altéré
; les juifs, qui avaient pris à Babylone un grand nombre d’idées orientales, et
dont les opinions théologiques ou philosophiques avaient subi de grands
changements par ces communications, s’efforcèrent de concilier le
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