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Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Titel: Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Émile Bréhier
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correspond la vision d ’ un univers qui est, à chaque moment, nécessaire et parfait, et dont les événements ne font que manifester une réalité toujours égale. Il suffit que la volonté se détende pour que l ’ inquiétude naisse  ; la destinée n ’ est pas accomplie à chaque moment, mais s ’ accomplit peu à peu, graduellement, au cours du temps. Avec cette conception de la destinée, la vision de l ’ univers se transforme, son unité se rompt  ; à l ’ interdépendance des êtres se substitue la hiérarchie des formes de l ’ être, de la plus parfaite à la mains parfaite, à travers lesquelles passe l ’ âme montant d ’ une région moins parfaite à une région plus pure  ; ce sont tous les mythes sur l ’ âme qui renaissent, et l ’ univers, destiné à leur servir de théâtre, n ’ a plus d ’ autre rôle.
    Le platonisme n ’ est donc plus un humanisme, c ’ est-à-dire une vision de l ’ univers où l ’ homme et l ’ action humaine Se déroulant en un milieu social humain forment le centre des préoccupations  ; le Dieu des Stoïciens avait avec l ’ homme un lien particulier, et l ’ homme avec toute sa nature était pour eux un but de l ’ univers. Bien différente est une vision des choses, où l ’ ordre universel, le monde a une valeur en lui-même et non parce qu ’ il est au service des êtres raisonnables  ; l ’ homme, comme tel, perd sa prééminence qui passe à la pure intelligence en laquelle il essaye de se transformer, c ’ est-à-dire à l ’ intelligence qui contemple l ’ ordre universel. L ’ homme raisonnable est, à certains égards, inférieur aux animaux et aux plantes. «  Qu ’ on ne s ’ étonne pas, dit Plutarque, ’ si les bêtes sans raison suivent la nature mieux que les êtres raisonnables  ; à ce point de vue, les animaux sont même inférieurs aux plantes, à qui la nature n ’ a donné ni représentation ni penchant capables d ’ une déviation contre nature  [630] .  »
     
    IX. — PHILON D ’ ALEXANDRIE
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    p.438 Des formules nettes de ce nouveau platonisme se trouvent déjà chez Philon d ’ Alexandrie (40 av. à 40 ap. J.-C.). C ’ était un membre influent de la communauté juive riche et florissante et, vers la fin de sa vie, il fit partie de l ’ ambassade qui alla porter à Caligula les doléances des juifs de la ville contre le gouverneur romain d ’ Égypte  ; dans cette communauté, la culture grecque est depuis longtemps chez elle  ; on n ’ y lit plus la Bible que dans la traduction grecque, et les jeunes gens de famille y apprennent toutes les sciences et la philosophie grecque. La lecture et le commentaire de la Bible restent pourtant, comme dans tout le monde juif, le centre de la spéculation  ; mais on explique la Bible, comme les Grecs expliquaient depuis longtemps Homère, par la méthode allégorique  ; tout, dès lors, devient dans la Bible l ’ histoire d ’ une âme qui se rapproche ou s ’ éloigne de Dieu en se rapprochant ou en s ’ éloignant du corps. Tout le premier chapitre de la Genèse , par exemple, raconte selon ces interprètes l ’ histoire d ’ une intelligence purifiée, créée par Dieu et résidant au milieu de vertus  ; puis Dieu façonne, à l ’ imitation de celle-là, une intelligence plus terrestre (Adam), à qui il donne comme secours et soutien nécessaire la sensation (Ève) ; par l ’ intermédiaire de cette sensation, l ’ intelligence se laisse entraîner et dépraver par le plaisir (le serpent)  ; tout le reste de la Genèse est l ’ histoire des diverses manières dont l ’ homme redevient un esprit pur, et les patriarches notamment signifient les trois modes possibles de ce retour, par l ’ exercice ascétique (Jacob), par l ’ enseignement (Abraham), ou, par une grâce spontanée et naturelle (Isaac). A la faveur de cette méthode, Philon fait entrer dans son commentaire tous les thèmes philosophiques de son temps  ; et son œuvre, considérable, est un véritable musée, où l ’ on trouve pêle-mêle discours de consolation, diatribes, p.439 ques t ions à la stoïcienne (si le sage peut s ’ enivrer), fragments de leçons dialectiques ou physiques.
    De cet amalgame il se dégage pourtant quelques idées  : l ’ essentielle est celle d ’ un Dieu transcendant qui ne touche le monde que par des intermédiaires, et que l ’ âme n ’ atteint aussi que par des intermédiaires. L ’ intermédiaire, chez Philon, se caractérise

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