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Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Titel: Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Émile Bréhier
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évidemment aux gnostiques, démontre par une argumentation de forme toute stoïcienne que la justice est identique à la bonté, passant par un raisonnement composé de l’amour de Dieu pour les hommes à sa justice. Quant aux deuxième et troisième livres, c’est une diatribe à la Musonius s’attachant à prescrire aux chrétiens une vie simple et modeste ; tout le stoïcisme mélangé de cynisme que nous connaissons passe là dans l’enseignement chrétien ; au paradoxe : « seul le sage est riche », il substitue seulement : « seul, le chrétien est riche ».
    S’agit-il même de la méthode dans la connaissance de Dieu, Clément n’hésite pas à emprunter tout ce qu’il en dit à l’enseignemnent pythagoricien ou platonicien d’alors, montrant par quelle suite d’abstractions on arrive à la connaissance de l’unité pure, ou encore employant au sujet de Dieu les formules mêmes que l’on trouve dans le manuel platonicien d’Albinus : « Dieu n’est ni genre, ni différence, ni espèce, ni individu, ni nombre, ni accident ni sujet ; il n’est pas un tout. » Enfin sa notion du Fils ou Logos n’est pas fort loin de celle du monde intelligible ; au Père, qui est indémontrable, s’oppose le Fils qui est sagesse, science, vérité comportant un développement. Car il est toutes choses ; il est le cercle de toutes les puissances tournant autour d’un centre unique [713] ».
    L’attitude d’Origène par rapport à l’hellénisme se marque nettement dans sa longue réponse au pamphlet de Celse contre les chrétiens. On sait l’objection de Celse, si grave pour un Hellène partisan d’un ordre éternel des choses contre l’événement de l’incarnation : « Si l’on change la moindre des chose d’ici-bas, tout sera bouleversé et disparaîtra », ou encore : « C’est donc après une éternité que Dieu a songé à juger les hommes et avant il ne s’en souciait pas [714]. » Or c’est précisément ce caractère mythologique ou, si l’on veut, historique du p.509 christianisme qu’Origène s’efforce d’atténuer dans sa réponse : « Le seul changement produit par la présence de Dieu, répond-il à la première objection, c’est un changement dans l’âme du croyant [715] », tendant ainsi à réduire l’incarnation à un événement intérieur, et présentant d’ailleurs plus loin la descente de Dieu comme « une manière de parler » (tropologie). A la seconde objection, il répond que Dieu « n’a jamais cessé de s’occuper du rachat des hommes ; à chaque génération, la sagesse de Dieu descend en des âmes saintes et des prophètes ». Et c’est d’une manière analogue qu’il répond ailleurs à l’objection que les Hellènes tiraient, contre la création du monde, de l’impossibilité d’admettre un dieu inactif : sans croire au retour éternel des Stoïciens, il estime que Dieu, avant ce monde, a créé d’autres mondes, admettant ainsi la conception cyclique du temps qui est la marque même de l’hellénisme [716]. Même tendance à l’hellénisme lorsqu’il considère les modifications du Verbe dans la création ou l’incarnation, non comme des changements du Verbe pris en lui-même, mais comme des apparences dues à la différence de capacité des êtres qui peuvent le recevoir [717].
    Néanmoins on voit le même Origène se méfier de l’hellénisme et surtout du platonisme. « Tous ceux qui reconnaissent une providence, dit-il, confessent un Dieu inengendré qui a tout créé ; que ce Dieu ait un fils, nous ne sommes pas seuls à le proclamer, bien que cela ne paraisse pas croyable aux philosophes grecs ou barbares ; et pourtant quelques-uns d’entre eux ont cette opinion, quand ils disent que tout a été créé par le Verbe et la Raison de Dieu. Mais nous, c’est selon la foi d’une doctrine divinement inspirée que nous y croyons... Quant au Saint-Esprit, nul n’en a eu le moindre soupçon que ceux qui connaissent la Loi et les prophètes, ou bien croient au Christ [718]. » On voit ici les limites exactes de l’hellénisme auquel la foi p.510 chrétienne vient se superposer sans le détruire. Mais à côté de vérités partielles, l’hellénisme contient aussi des erreurs soit sur la nature du monde, soit sur celle de l’âme. Le monde sensible n’est plus du tout, chez Origène, un ordre imitant un modèle intelligible : d’abord le monde des idées n’existe que dans la seule fantaisie de

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