Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique
Hiérarchie ecclésiastique , qui étudient toute la série des créatures capables de recevoir la révélation divine p.519 depuis les plus hautes, le premier ordre d’anges qui touche Dieu sans intermédiaire, jusqu’à la plus basse, le fidèle baptisé, chaque être étant considéré comme recevant la révélation du terme supérieur et la donnant au terme inférieur. En second lieu les ouvrages Des noms divins 2 et de la Théologie mystique formaient, avec deux autres ouvrages perdus, les Esquisses théologiques et la Théologie symbolique , un cours complet de théologie dont le plan est donné au chapitre III de la Théologie mystique . Les trois premiers ouvrages, Esquisses , Noms et Théologie symbolique comprenaient la théologie positive, étudiant successivement dans les Esquisses la Trinité qui est au-dessus du monde intelligible, dans les Noms , les dénominations de Dieu empruntées à l’ordre des intelligibles : bien, être, vie, intelligence, etc., dans la Théologie symbolique , les attributions de Dieu qui sont empruntées au monde sensible, colère, jalousie, serment, etc. Le dernier ouvrage, la Théologie mystique , contient la théologie négative et montre, en suivant l’ordre inverse de la théologie positive, qu’aucune dénomination, empruntée au sensible ou à l’intelligible, ne convient à Dieu.
Denys ne définit nulle part sa situation par rapport au néoplatonisme païen ; dans ses lettres, on le voit se refuser à toute polémique avec les païens ; d’autre part, il nous fait connaître l’opinion d’un « sophiste païen », Apollophane, au sujet de ses écrits : « Ce sophiste, dit-il, m’injurie et m’appelle parricide, parce que j’utilise d’une façon impie les Grecs contre les Grecs [740]. » Le voilà donc nettement accusé, du côté païen, de se servir du néoplatonisme au profit du christianisme ; et, de fait, bien qu’il se vente de tirer toute sa « philosophie » ou « théosophie » de l’Écriture [741], il est vrai que sa pensée est toute imprégnée des idées de Proclus, particulièrement sous les trois aspects suivants :
Dieu, étant la cause de tout, contient tout, à la manière dont la cause contient l’effet, c’est-à-dire qu’on peut attribuer à p.520 Dieu tous les noms de créatures, Vie, Sagesse, etc., à condition de prendre ces noms au sens de Cause de vie, Cause de sagesse, etc. ; et c’est le principe de la théologie positive ; mais Dieu étant cause de tout sans être rien de ce dont il est cause, il faut lui enlever toutes ces attributions, et c’est le principe de la théologie négative, qui est supérieure à la positive. En second lieu, dans les Noms divins , il suit pour examiner les dénominations de Dieu, l’ordre des hypostases que les néoplatoniciens admettent à partir de Jamblique, c’est-à-dire le Bien, puis la triade Être, Vie, Intelligence, allant ainsi de l’abstrait au concret ; et il explique exactement comme Proclus, comment, bien que l’Être soit supérieur à l’Intelligence, les êtres intelligents sont supérieurs aux êtres purs [742]. C’est encore pour des raisons semblables à celles de Proclus, raisons qui remontent finalement au Parménide, qu’il admet le principe suivant, essentiel dans sa théologie : bien que l’effet soit semblable à la cause, la cause n’est pas pour autant semblable à l’effet.
Et pourtant on trouve des traits qui distinguent profondément sa doctrine de celle de Proclus. En premier lieu, l’ordre des noms divins ou hypostases ne représente nullement en Dieu un ordre de génération, comme si sa Vie procédait de son Être, et son Intelligence de sa Vie ; tout est identique en Dieu : aussi Denys ne fait-il aucune tentative pour donner les raisons de cet ordre. De plus, et c’est là une conséquence, Dieu comme Trinité, comme Père, Fils et Esprit, dont il parle dans les Esquisses , est au-dessus des noms divins. Enfin, du côté des choses, Denys a renoncé à toute déduction véritable : les trois triades d’anges de la Hiérarchie ne sont pas liées l’une à l’autre par des considérations rationnelles, pas plus que le terme d’une triade n’est lié aux deux autres ; ce sont les cadres numériques du néoplatonisme sans le contenu.
Il faudrait se garder, malgré l’apparence, d’attribuer ces p.521 modifications importantes à l’influence de l’orthodoxie chrétienne, qui repousse effectivement la
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