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Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Titel: Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Émile Bréhier
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définition aux Catégories d’Aristote : Manegold lui-même, admettant la parenté de certaines doctrines philosophiques avec la foi, acceptait la division plotinienne des vertus en politiques, purifiantes et purifiées qu’il trouvait chez Macrobe. Il y a donc p.557 au total, au XI e siècle, une véritable incapacité et de se passer de la philosophie profane et de déterminer les limites de son usage.
     
    IV. — SAINT ANSELME
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    C’est ce qui fait le grand intérêt de la pensée de saint Anselme d’Aoste (1033-1109) qui, reprenant la tradition augustinienne, s’efforça, dans l’enseignement dont il fut après Lanfranc à qui il succéda, l’inspirateur à l’abbaye du Bec, avant de devenir en 1093 archevêque de Cantorbery, d’instituer un équilibre plus stable entre la foi et la raison. La pensée d’Anselme est fort claire : les Écritures et l’Église imposent à notre foi des dogmes, comme ceux de l’existence de Dieu et de l’incarnation ; l’homme ne peut y accéder que par l’autorité, et la raison ne peut nous y conduire. Mais quand la foi existe, l’homme a par surcroît une tendance à penser les dogmes, à en chercher les motifs. Comme le dit Isaïe (7, 9), « si vous ne croyez pas. vous ne comprendrez pas ». Mais d’autre part, notre foi cherche à comprendre ( fides quaerens intellectum ) : l’intelligence que nous pouvons ainsi acquérir des dogmes en procédant par le raisonnement est comme un intermédiaire entre la foi pure et la vision directe que les élus auront de la réalité divine. L’attitude de saint Anselme est elle-même intermédiaire entre un fidéisme qui se refuse à tout exercice normal de la raison, et un mysticisme qui introduit dès cette vie la vision béatifique.
    Il est clair que saint Anselme, par la force de son génie et par sa méditation des œuvres de saint Augustin, retrouve ici quelque chose de la dialectique platonicienne : le mouvement qui mène de la foi à l’intelligence et de l’intelligence à la vision est bien parent de cette dialectique (p. 113) qui mène de la croyance à la réflexion discursive et de celle-ci à l’intuition intellectuelle ; seulement la croyance est devenue la foi, c’est-à-dire une vertu théologale qui ne vient en l’homme que par la grâce de Dieu, p.558 et un ensemble de dogmes d’où dépend le salut de l’homme ; de plus, l’intuition intellectuelle est devenue la vision béatifique, qui est accordée aux élus par la grâce de Dieu. L’homme est incapable et de prendre l’initiative et d’atteindre la fin : l’ intellectus reçoit du dehors, de la foi, ce qu’il a à comprendre. Mais à part ce donné, il n’exige autre chose que la subtilité dialectique qu’Anselme s’efforçait de faire acquérir à ses élèves par des exercices tels que ceux du De Grammatico  ; mais, séparé de la foi, le raisonnement le plus probant n’atteint pas la certitude ; il dit seulement « ce qui me paraît ».
    Il faut ajouter que l’œuvre de saint Anselme est dominée par un souci pratique, qui convient au prince de l’Église ; en montrant par des raisonnements la nécessité de l’incarnation par exemple, il veut répondre aux objections des infidèles qui disent que la foi chrétienne répugne à la raison. De là la forme particulière de ses œuvres, qu’il a bien indiquée lui-même au début du Monologium  : rien de ce qu’il dit ne doit être fondé sur l’autorité de l’Écriture ; il faut écrire en style clair, n’employer que des arguments vulgaires, s’en tenir à une discussion simple, où tout est fondé sur « la nécessité de la raison et la clarté de la vérité ». C’était s’affranchir entièrement des habitudes littéraires de l’époque et de la servitude de commenter l’Écriture. Et l’on voit par là que, avec quelque précaution qu’il faille prendre le « rationalisme » de saint Anselme, il n’en est pas moins vrai qu’il s’est efforcé de voir ce que la raison pouvait produire par ses propres forces.
    Bien entendu sur des matières purement théologiques. Le Monologium et le Prosologium , écrits dans cet ordre de 1070 à 1078, traitent, l’un de la nature de Dieu, l’autre de son existence ; le De Veritate , qui est postérieur, a pour sujet l’unité radicale de toutes les vérités en Dieu ; le Cur Deus Homo , achevé en 1098, parle des motifs de l’incarnation. Il s’agit de montrer que la raison peut avoir un bon

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