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Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Titel: Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Émile Bréhier
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aristotélisme, comme premiers moteurs d ’ une sphère céleste, les égaux de Dieu même.
    On sait déjà comment l ’ école franciscaine, suivant non seulement Avicébron, mais Hugues de Saint-Victor, avait résolu la question  : ces substances séparées ne sont pas des formes pures, mais elles sont composées de matière et de forme : partout où il y a indétermination, partout où il y a pluralité et finité, il y a matière  ; c ’ est ainsi qu ’ il y a une matière commune à toute substance qui, selon qu ’ elle est déterminée par telle forme ou telle autre, devient esprit ou corps  ; et la multiplicité des intelligences prouve qu ’ elles ont un fond commun déterminé par des formes diverses.
    Mais saint Thomas nie complètement cette composition hylémorphique des substances spirituelles. Un de ses arguments atteint la conception générale qu ’ Avicébron se fait de la matière et de son rapport à la forme. Chez lui, la génération consiste en ce que la forme s ’ ajoute à la matière comme un accident à une substance  ; dès lors, il n ’ y a aucune véritable génération ni aucune véritable unité dans l ’ être composé ainsi produit  ; il est une simple somme ou addition. Mais si, avec  Aristote , p.674 l ’ on conçoit la matière comme un être en puissance (marbre) qui devient être en acte (statue) à la suite de mouvements ou d ’ altérations diverses, on comprendra comment la composition hylémorphique ne peut appartenir qu ’ au corps. Que, au contraire, les intelligences soient des formes pures et sans matière, c ’ est ce que prouvent les caractères de la connaissance intellectuelle, telle que l ’ a décrite Aristote  ; en effet, selon lui, dans l ’ acte de comprendre, l ’ intelligence est identique à l ’ intelligible qu ’ elle comprend  : or l ’ intelligible n ’ est nullement reçu dans l ’ intelligence comme une forme dans une matière  [845] . Reçue dans une matière, une forme se divise  ; elle s ’ individualise en se liant à des accidents  ; elle exclut la présence de la forme contraire  ; elle s ’ introduit dans la matière par suite d ’ un mouvement. Objet de l ’ intellect, la forme est au contraire simple et indivisible, universelle et libre d ’ accidents, mieux connue grâce à la présence de son contraire, d ’ autant mieux comprise que l ’ intelligence est moins mobile.
    Mais si les intelligences séparées sont de pures formes, comment éviter les inconvénients de la thèse  ? C ’ est qu ’ un être peut être une pure forme sans pour cela égaler la simplicité de Dieu. Nous savons déjà qu ’ il y a en toute créature un mode de composition bien différent de celui de la forme et de la matière, celui de l ’ essence et de l ’ être, deux termes qui, en Dieu seul, sont identiques. Au contraire dans toute chose créée il faut distinguer l ’ essence ou substance, c ’ est-à-dire ce qu ’ est cette chose ( quod est ), et son être même, ou ce par quoi elle mérite le nom d ’ être ( quo est ), ou si l ’ on aime mieux, sa puissance et son acte. C ’ est cette distinction qui, importée dans l ’ aristotélisme, servira, comme chez Albert le Grand, à séparer l ’ ange de Dieu  : distinction qui n’est que l ’ énoncé abstrait de ce que l ’ on veut prouver  ; car dire que l ’ ange est une créature, dire que son essence n ’ a pas d ’ elle-même la puissance d ’ être, p.675 dire que ce qu ’ il est est distinct de ce par quoi il est, ce sont formules identiques. Cette composition, pourtant, n ’ en fait pas un véritable individu, puisque, on le verra, l ’ individualité n ’ appartient qu ’ à une forme engagée dans la matière  ; les anges, pures formes, diffèrent entre eux comme des espèces et non comme des individus, et c ’ est la conséquence même que tirait Aristote  [846] .
    La troisième difficulté est dans le rapport particulier que l ’ aristotélisme affirme entre l ’ âme et le corps  : « L ’ individualité de l ’â me, dit un interprète récent, doit être expliquée de manière à sauvegarder à la fois son immortalité personnelle et sa fonction de forme substantielle  » [847] .
    Voilà bien, en effet, le problème  : pour saint Thomas, qui suit Aristote, l ’ âme est la forme du corps organisé  ; l ’ âme et le corps ne sont pas deux substances indépendantes  ; mais de l ’ union des deux se forme l ’ homme,

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