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Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Titel: Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Émile Bréhier
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possible, sur l ’ essence et l ’ être qu ’ elle introduit, est tout à fait étrangère à l ’ esprit d ’ Aristote, et c ’ est elle qui lui permet, comme nous allons voir, de conclure à une cause universelle. L ’ on ne peut en effet trouver chez Aristote l ’ origine du problème de la distinction entre l ’ être et l ’ essence. Sans doute Aristote recommande de rechercher si un être existe avant de rechercher sa quiddité  ; c ’ est que la quiddité d ’ un être qui n ’ existe point n ’ est rien  ; la quiddité du bouc-cerf n ’ est rien, si cet animal fantastique n ’ existe pas. Or la manière dont les Arabes, puis ensuite saint Thomas se posent la question des rapports de l ’ essence à l ’ être, loin d ’ être une suite ou une extension des indications d ’ Aristote, en prend juste le contre-pied : il ne s ’ agit pas de chercher si une chose existe avant de déterminer sa quiddité, mais, à l’ inverse, de savoir si la quiddité peut avoir un sens déterminé avant toute question sur l ’ existence, de savoir, pour employer la terminologie de saint Thomas, si l ’ essence est réellement différente de l ’ être. Or à cette p.672 question, bien abstraite et technique d ’ apparence, est sous-jacente une préoccupation théologique  : dire que l ’ être d ’ une chose est identique à son essence, c ’ est dire qu ’ elle existe par soi, qu ’ elle est nécessaire  : c ’ est lui donner un privilège qui n ’ appartient qu ’ à Dieu  : il appartient à toutes les autres natures d ’ être seulement possibles  ; leur être leur vient d ’ autre chose  ; l ’ essence elle-même n ’ est que possible et peut être pensée sans son être, sauf s ’ il s ’ agit de l ’ être unique dont l ’ essence est d ’ exister. Il n ’ est toutefois pas surajouté à l ’ essence comme un accident  ; il est plutôt l ’ accomplissement du pouvoir en quoi consiste l ’ essence. Il s ’ agit donc bien d ’ affirmer entre l ’ essence et l ’ existence un abîme béant dont la négation rendrait Dieu inutile : esprit bien opposé à celui d ’ Aristote à qui Averroès a été plus fidèle lorsqu ’ il a dit qu ’ il n ’ y avait entre l ’ essence et l ’ existence qu ’ une différence de raison  : on peut toujours, dit-il, penser l ’ essence sans la concevoir existante  ; mais une essence qui n ’ existerait pas effectivement est chose tout à fait imaginaire. En posant inversement comme seul nécessaire l ’ être dont l ’ essence est d ’ être, on met à la racine des choses la forme la plus universelle qui soit, forme dont toutes les choses qui posséderont l ’ être ne seront que participations et effets.
    La quatrième voie aboutit au même résultat  : en effet il est de règle que chaque chose agisse et produise son effet selon ce qu ’ elle est en acte  ; or la quatrième voie nous amène à un être qui, étant l ’ être en acte, doit être universellement pour toutes les autres choses la cause de leur être. Enfin la cinquième voie nous conduit à exiger une cause qui est différente des causes naturelles particulières.
    On voit par quel détour le Dieu créateur et transcendant a pris la place du premier moteur, sur l ’ injonction d ’ une foi qui exigeait de la raison qu ’ elle trouvât des preuves.
    Si oiseuse que paraisse la question à un lecteur moderne, la théorie des anges se trouvait être une des pierres d ’ achoppement les plus graves pour l ’ aristotélisme thomiste. Pour p.673 saisir le sens de cette question, il faut se rappeler que la preuve du premier moteur que donnait Aristote à la fin de la Physique conduisait assez naturellement à une multiplicité de moteurs immobiles, à autant d ’ intelligences motrices qu ’ il y avait dans son système astronomique de sphères, puisque chacune de ces sphères est supposée animée d ’ un mouvement propre et distinct. Le rapport qui peut exister entre ces intelligences motrices est d ’ ailleurs laissé dans l ’ ombre par Aristote, et son système est aussi viable, qu ’ on le conçoive comme un monothéisme où toutes les intelligences dépendent d ’ une seule, ou comme un polythéisme où elles agissent de concert, mais indépendamment. Quoi qu ’ il en soit, les intelligences séparées, que Denys l ’ Aréopagite, suivant une tradition déjà ancienne, assimilait aux anges de la hiérarchie céleste, étaient dans l ’

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