Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Titel: Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Émile Bréhier
Vom Netzwerk:
(Mélissos est le général samien qui mit à mal la flotte de Périclès en 440) [106] il n’a dû connaître la doctrine éléate qu’après la philosophie ionienne. Ainsi s’expliquerait que, s’il donne au réel les propriétés de la sphère parménidienne, unité, éternité, continuité et plénitude, il garde quelque chose du ionisme en la faisant infinie en grandeur. De plus, il insiste avec beaucoup de force sur l’insuffisance de la connaissance sensible ; si, en effet, nous affirmons avec vérité qu’une chose est chaude, il faudra taxer d’erreur la sensation qui nous montre une chose chaude devenant froide, c’est-à-dire toutes les observations sur lesquelles se fondait l’image du changement dans la physique ionienne [107].
     
    VI. — EMPÉDOCLE d’AGRIGENTE
    @
    Malgré l’attitude hostile de Parménide, la spéculation physique reprend avec vigueur au milieu du V e siècle ; c’est l’époque d’Empédocle d’Agrigente, d’Anaxagore de Clazomènes, des jeunes pythagoriciens, et à la fin du siècle, du grand Démocrite d’Abdère.
    Mais un trait entièrement nouveau est commun à toutes ces doctrines : il n’y a pas de transformation, de naissance véritable [108], car rien ne vient de rien ; il y a seulement des combinaisons diverses d’un nombre immense de très petits corpuscules, dont chacun est immuable et doué de propriétés tout à fait permanentes. Autant de manières d’imaginer ces corpuscules et les modes de leur union et de leur séparation, autant de cosmologies différentes.
    En un poème chargé d’images, Empédocle expose la doctrine des quatre, éléments ou plutôt « racines » des choses : le feu, p.68 l’air, l’eau et la terre ; ils sont au monde comme les couleurs dont se sert le peintre ou comme l’eau et la farine avec laquelle on fait la pâte ; tout vient de leur réunion, de leur séparation, de leurs divers dosages ; mais nul d’entre eux n’est premier ; également éternels, ils ne proviennent pas l’un de l’autre [109]. Cette doctrine reconnaît pour la première fois l’existence et l’indépendance de l’air atmosphérique. Empédocle prouve cette existence par l’expérience d’une clepsydre que l’on plonge dans l’eau en bouchant l’orifice supérieur avec le doigt ; l’air contenu dans l’appareil résiste à l’entrée de l’eau par les orifices inférieurs [110]. Tout changement a lieu soit par combinaison, soit par dissociation des éléments : donc deux puissances actives, l’une qui les réunit quand ils sont séparés, c’est l’Amitié, l’autre qui les sépare quand ils sont réunis, c’est la Haine. L’Amitié et la Haine acquièrent alternativement la prépondérance l’une sur l’autre : si nous partons de l’état où tout est uni par l’Amitié, du sphaeros (analogue à la sphère de Parménide), la Haine s’introduit peu à peu, chasse graduellement l’Amitié jusqu’à ce que les choses soient dans l’état de complète séparation, où l’Amitié a complètement disparu ; puis, par un mouvement inverse, l’Amitié rentrant graduellement dans le monde en fait sortir la Haine et ramène au sphaeros d’où l’on était parti. Il y a donc, éternellement alternants, deux cours du monde inverses l’un de l’autre : celui qui va du mélange à la dispersion, celui qui va de la dispersion au mélange, ordre inéluctable, parce que la Haine et l’Amitié se sont engagées par serment à se céder alternativement la prépondérance [111]. Notre monde actuel [112] est celui où la Haine progresse ; du sphaeros se sont séparés d’abord l’air qui l’entoure comme une atmosphère, puis le feu, qui s’est porté à la plus grande hauteur, puis la terre, et de la terre a jailli l’eau ; dans un des hémisphères célestes le feu est prépondérant et p.69 il produit la lumière du jour ; dans l’hémisphère nocturne, il n’y a au milieu d’une masse d’air obscur que des traces de feu [113]. Le soleil et la lune ne sont pas au reste des masses ignées. Empédocle sait que la lune ne fait que refléter la lumière du soleil et il connaît la véritable cause des éclipses et la nature de la nuit qui n’est que l’ombre de la terre ; la lune, masse d’air condensée, renvoie la lumière comme les miroirs de verre qui commencent à se répandre en Grèce au V e siècle [114]. Empédocle applique, d’une manière d’ailleurs obscure, cette théorie

Weitere Kostenlose Bücher