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Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Titel: Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Émile Bréhier
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diffusion dans les milieux littéraires et philosophiques des idées du Phèdre et du Banquet sur l ’ amour : l ’ amour platonique (ε̉ρως) est fort différent de l ’ amour de Dieu ( caritas ) que l ’ Évangile met au sommet des vertus  ; celui-ci, qu ’ il soit considéré par les thomistes comme foncièrement p.753 identique à l ’ amour de soi ou par les Victorins et les Franciscains comme amour pur et désintéressé, libre de toute attache avec les impulsions naturelles, est en tout cas une fin  [886] ; l ’ amour platonique, fils de la Ressource et de la Pauvreté, est toujours déficient, désir qui n ’ est jamais satisfait et qui manque toujours de la beauté dont il est en quête, inquiétude sans repos. Cette doctrine du Banquet se trouve en des ouvrages très répandus vers le milieu du XV I e siècle  ; Balthazar Castiglione, dans le Parfait Courtisan (1540), décrit tout le progrès par lequel l ’ amour monte des beautés inférieures aux supérieures. Mais surtout Léon l ’ Hébreu, en ses Dialoghi di Am ore (1535) soutient que l ’ amour et le désir coïncident souvent, que l ’ amour s ’ exprime déjà dans le monde sublunaire par le désir de génération, quoiqu ’ il ne soit qu ’ une image affaiblie de l ’ amour qui règne dans le monde des intelligences  [887] . Pontus de Tyard, qui traduit Léon l ’ Hébreu en français, fait en même temps connaître dans le Solitaire premier (1552) la théorie de la folie amoureuse du Phèdre , où la folie de l ’ amour, c ’ est-à-dire «  le fervent désir que l ’ âme a de jouir de la divine et éternelle beauté » est mise en parallèle avec l ’ inspiration prophétique et l ’ inspiration poétique  ; et Ronsard, en ses Odes (I, X), suit Pontus de Tyard et déclare que «  les vers viennent de Dieu, non de l ’ humaine puissance  » . L ’ amour devient ainsi non plus le but d ’ une vie supérieure, mais son point de départ et son moteur  [888] .
     
    V. — LES PADOUANS   : POMPONAZZI
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    L ’ université de Padoue, qui depuis 1405 dépendait de la sérénissime république de Venise, qui y nommait et y congédiait les maîtres sans intervention du pouvoir religieux, resta, p.754 au X V e et au XV I e siècle, un centre de liberté  ; l ’ Inquisition même et plus tard les Jésuites qui y fondèrent un collège voyaient leur puissance annulée par le Sénat vénitien  : l ’É tat laïque se faisait ici le protecteur des philosophes  [889] .
    Le plus célèbre de ses maîtres fut Pomponazzi (1462-1525), qui se pose la question suivante  : à supposer que nous ne possédions aucune révélation divine, quelle idée devons-nous nous faire de l ’ homme et de sa place dans l ’ univers  ? Question à laquelle il trouvait une réponse chez Aristote et ses commentateurs. En son De immortalitate animae (1516) non seulement il démontre que l ’ âme intellectuelle, inséparable de l ’ âme sensitive (puisqu ’ elle ne peut penser sans images) doit être mortelle comme le corps, mais il en tire les conséquences pratiques (chap. XIII à XVI)  : l ’ homme, qui n ’ a aucune fin surnaturelle, doit prendre comme fin l ’ humanité même et ses devoirs quotidiens  ; il doit trouver dans l ’ amour de la vertu et la honte du mal un suffisant motif d ’ action  ; il doit savoir que c ’ est «  le législateur qui, connaissant le penchant de l ’ homme au mal et ayant égard au bien commun, a décidé que l ’ âme était immortelle, non par souci de la vérité, mais de l ’ honnêteté, et pour amener les hommes à la vertu.  »
    Voilà ce que nous ne trouvions pas chez Siger de Brabant : une conception positive de la vie humaine sans référence à la destinée surnaturelle  : on en voit tout de suite l ’ accent stoïcien. Or c ’ est la même inspiration stoïcienne que nous trouvons dans le De Fato, libero arbitrio et de praedestinatione , écrits en 1520  : ce qu ’ il y attaque surtout, c ’ est la prétendue conciliation que l ’ on a tenté d ’ établir entre libre arbitre, destin et providence  : « Si l ’ on pose la providence, l ’ on pose le destin et l ’ on détruit le libre arbitre  ; si l ’ on pose le libre arbitre, on détruit la providence et le destin.  » En cette affirmation de l ’ identité de la providence et du destin, on reconnaît l ’ esprit p.755 stoïcien  ; et c ’ est encore toute la théodicée stoïcienne (qui est

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