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Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Titel: Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Émile Bréhier
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or, sur son objet propre, chaque sensation dit la vérité complète ; la vision ne se trompe pas sur le blanc ; l’erreur ne commence que si elle affirme que ce blanc est tel ou tel objet. De ces qualités sensibles, les diverses espèces de sensations donnent une connaissance intégrale : nulles qualités sensibles en effet que celles qui agissent par contact, comme les qualités tactiles ou les goûts, et celles qui agissent à travers un milieu aérien ou liquide, comme les couleurs, les sons ou les odeurs ( De l’Ame, III , 1 ) .
    Sous un autre aspect, cette connaissance sensible est orientée vers la connaissance intellectuelle, puisqu’elle appréhende les choses sans leur matière ; « ce n’est pas la pierre elle-même qui est dans l’âme » lorsqu’on la perçoit, c’en est seulement la forme [335] ; bien que cantonnée dans la connaissance des choses particulières, la sensation les sépare donc de leur matière. De plus, la multiplicité des cinq sens a sa raison en ce qu’elle facilite la connaissance des qualités communes à tous les sensibles, telles que le mouvement, la grandeur ou le nombre ; la perception de ces propriétés communes ne serait pas possible avec un seul sens, parce qu’elle ne se dégagerait pas du sensible propre [336] . Enfin, cette multiplicité suppose comme un centre commun, capable d’appréhender et de discerner toutes les qualités ; sans quoi les sensations de chaque sens en nous seraient isolées p.235 les unes des autres comme celles d’autant de personnes étrangères l’une à l’autre ; or, ce centre commun peut saisir les ressemblances et lesdifférences et, en général, toutes sortes de rapports entre les sensibles [337].
    La pensée au sens le plus large contient tous les actes de connaître indépendants de l’influence actuelle du sensible, c’est-à-dire aussi bien les images de la mémoire que les opinions et les jugements de la science [338]. Aristote reconnaît aux deux bouts de l’échelle de la connaissance une intuition qui ne peut être que véridique : en bas l’intuition du sensible propre par la sensation, en haut l’intuition intellectuelle des essences indivisibles [339] : entre les deux s’étend tout le reste, c’est-à-dire tout ce qui est susceptible d’être vrai ou faux, c’est-à-dire encore toute proposition qui affirme une relation d’un attribut à un sujet comme passée, présente ou future. De ces facultés intermédiaires Aristote ne fait pas une étude bien systématique. Il semble bien qu’il considère chacune d’entre elles à trois points de vue différents, en elle-même, dans sa relation à la faculté inférieure et à la faculté supérieure. Ainsi la représentation ou image (φαντασία) : en elle-même, elle est tout ce qui apparaît à l’âme en dehors de la sensation ; elle est généralement fausse, sans correspondant dans le réel ; mais elle ne s’affirme pas comme vraie, car elle n’est pas, comme l’opinion, accompagnée de croyance [340] : ainsi le soleil nous paraît avoir un pied de diamètre ; mais nous savons qu’il est plus grand que la terre. Dans son rapport avec la sensation, elle est l’image d’une chose sensible passée, une sorte de peinture qui vient de ce que l’objet sensible a laissé son empreinte comme un cachet sur de la cire ; cette image est le souvenir de l’objet et il n’y a mémoire que là où il y a image ; on ne se souvient donc pas, contrairement à ce qu’a dit Platon, de vérités purement intellectuelles, on les contemple à nouveau, p.236 chaque fois qu’on y pense [341]. Enfin, dans son rapport avec l’intelligence, l’image est la condition de la pensée ; « il n’y a pas de pensée sans image », parce que l’image est la matière dans laquelle l’intelligence contemple l’universel ; le géomètre, pour démontrer les propriétés du triangle, doit tracer un triangle de dimensions définies ; mais il ne pense pas à ces dimensions [342].
    Les traités d’Aristote ne manquent pas d’indications éparses sur des faits intellectuels plus complexes, tels que la réminiscence ou le jugement ; la réminiscence est comme l’orientation de l’âme à la recherche d’un souvenir ; elle part de l’état actuel et par une série d’autres états liés au premier soit parce qu’ils leur sont semblables, soit parce qu’ils leur sont contraires, soit parce qu’ils en ont été voisins, elle arrive au

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