Histoire de la Révolution française depuis 1789 jusqu'en 1814
Boissy-d’Anglas, Borne, Bourdon de l’Oise, Cadroy, Couchery, Delahaye, Delarue, Doumère, Dumolard, Duplantier, Gibert Desmolières, Henry-Larivière, Imbert-Colomés, Camille Jordan, Jourdan (des Bouches-du-Rhône), Gall, La Carrière, Lemarchand-Gomicourt, Lemérer, Mersan, Madier, Maillard, Noailles, André, Mac-Cartin, Pavie, Pastoret, Pichegru, Polissard, Praire-Montaud, Quatremère-Quincy, Saladin, Siméon, Vauvilliers, Vienot-Vaublanc, Villaret-Joyeuse, Willot. Du conseil des anciens : Barbé-Marbois, Dumas, Ferraud-Vaillant, Lafond-Ladebat, Laumont, Muraire, Murinais, Paradis, Portalis, Rovère, Tronçon-Ducoudray. Du directoire : Carnot, Barthélemy. On y condamna en outre : l’abbé Brothier, La Villeheurnois, Dunan ; l’ex-ministre de la police, Cochon ; l’ex-employé de la police, Dossonville ; les généraux Miranda, Morgan ; le journaliste Suard, l’ex-conventionel Mailhe, et le commandant Ramel. Quelques proscrits parvinrent à se soustraire au décret d’exil : Carnot fut de ce nombre. La plupart des condamnés furent transportés à Cayenne ; mais un grand nombre ne quitta pas l’île de Rhé.
Le directoire étendit beaucoup cet acte d’ostracisme. Les auteurs de trente-cinq journaux furent compris dans la déportation. Il voulut atteindre à-la-fois les ennemis de la république dans les conseils, dans les journaux, dans les assemblées électorales, dans les départements ; en un mot, partout où ils s’étaient introduits. Les élections de quarante-huit départements furent cassées ; les lois en faveur des prêtres et des émigrés furent rapportées, et bientôt la disparition de tous ceux qui avaient dominé dans les départements, depuis le 9 thermidor, releva le parti républicain abattu. Le coup d’état de fructidor ne fut point purement central, comme la victoire de vendémiaire ; il ruina le parti royaliste, qui n’avait été que repoussé par la défaite précédente. Mais, en remplaçant de nouveau le gouvernement légal par la dictature, il rendit nécessaire une autre révolution, dont il sera parlé plus tard.
On peut dire qu’au 18 fructidor an V, il fallait que le directoire triomphât de la contre-révolution, en décimant les conseils ; ou que les conseils triomphassent de la république, en renversant le directoire. La question ainsi posée, il reste à savoir, 1° si le directoire pouvait vaincre autrement que par un coup d’état ; 2° s’il n’a pas abusé de sa victoire.
Le gouvernement n’avait pas la faculté de dissoudre les conseils. Au sortir d’une révolution, qui avait eu pour but d’établir le droit extrême, on n’avait pas pu donner à une autorité secondaire le contrôle de la souveraineté du peuple, et subordonner, dans certains cas, la législature au directoire. Cette concession d’une politique expérimentale n’existant point, quel moyen restait-il au directoire pour chasser l’ennemi du cœur de l’état ? Ne pouvant plus défendre la révolution en vertu de la loi, il n’avait pas d’autre ressource que la dictature : mais, en y recourant, il manqua aux conditions de son existence ; et, tout en sauvant la révolution, il se perdit bientôt lui-même.
Quant à sa victoire, il l’entacha de violence, en voulant la rendre trop complète. La déportation fut étendue à trop de victimes ; les petites passions d’hommes se mêlèrent à la défense de la cause, et le directoire ne montra point cette parcimonie d’arbitraire, qui est la seule justice des coups d’état. Il aurait dû, pour atteindre son but, n’exiler que les chefs conspirateurs ; mais il est rare qu’un parti n’abuse pas de la dictature, et qu’en ayant la force en main il ne croie pas aux dangers de l’indulgence.
Les conseils de l’an V furent pour la république ce qu’avait été l’assemblée législative pour la monarchie, si ce n’est que les Girondins de la royauté n’ayant pas, comme les autres, un peuple derrière eux, et le directoire ayant une armée républicaine, le 18 fructidor se fit au détriment de la contre-révolution, au lieu de s’exécuter pour elle. Cette défaite fut la quatrième du parti royaliste : deux eurent lieu pour le déposséder du pouvoir, celles du 14Juillet et du 10 août ; deux pour l’empêcher de le reprendre, celles du 13 vendémiaire et du 18 fructidor. Cette répétition de tentatives impuissantes et de revers prolongés ne contribua
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