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Histoire de la Révolution française depuis 1789 jusqu'en 1814

Titel: Histoire de la Révolution française depuis 1789 jusqu'en 1814 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: François-Auguste-Marie-Alexis Mignet
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pendant la nuit, et qu’une autre viendrait la relever de grand matin. Pour épargner la fatigue d’une présidence continuelle au vénérable archevêque de Vienne, on nomma un vice-président qui devait le suppléer dans ces moments extraordinaires. Le choix tomba sur Lafayette, qui tint la séance de nuit. Elle se passa sans délibération, les députés étant sur leurs sièges, silencieux, mais calmes et sereins. C’est par ces motions, par ces regrets publics, par ces arrêtés, par cet enthousiasme unanime, par cette raison soutenue, par cette conduite inébranlable, que l’assemblée s’élevait de plus en plus à la hauteur de ses dangers et de sa mission.
    À Paris l’insurrection prit le 13 un caractère plus régulier   : dès le matin le peuple se présenta à l’Hôtel-de-Ville   ; on sonna le tocsin de la maison commune et celui de toutes les églises   ; des tambours parcoururent les rues en convoquant les citoyens. On se rassembla sur les places publiques   ; des troupes se formèrent sous le nom de volontaires du Palais-Royal, volontaires des Tuileries, de la Bazoche, de l’Arquebuse. Les districts se réunirent   ; chacun d’eux vota deux cents hommes pour sa défense. Il ne manquait que des armes   ; on en chercha partout où l’on espéra pouvoir en trouver   ; on s’empara de celles qui se trouvaient chez les armuriers et les fournisseurs, en leur expédiant des reçus. On vint en demander à l’Hôtel-de-Ville   : les électeurs toujours assemblés répondirent vainement qu’ils n’en avaient point   ; on en voulait à toute force. Les électeurs mandèrent alors le chef de la ville, M. de Flesselles   ; prévôt des marchands, qui seul connaissait l’état militaire de la capitale, et dont l’autorité populaire pouvait être d’un grand secours dans de si difficiles conjonctures. Il arriva au milieu des applaudissements de la multitude   : Mes amis, dit-il , je suis votre père, vous serez contents. Un comité permanent se forma à l’Hôtel-de-Ville pour prendre des mesures touchant le salut commun.
    Vers le même temps on vint annoncer que la maison des lazaristes qui contenait beaucoup de grains avait été dévastée, qu’on avait forcé le Garde-Meuble pour y prendre de vieilles armes, et que les boutiques des armuriers étaient pillées. On craignit les plus grands excès de la part de la multitude   ; elle était déchaînée, et il paraissait difficile de maîtriser sa fougue. Mais elle était dans un moment d’enthousiasme et de désintéressement. Elle désarma elle-même les gens suspects   ; le blé trouvé chez les lazaristes fut porté à la halle   ; on ne pilla aucune maison   ; les voitures, les chariots, remplis de provisions, de meubles, de vaisselle, arrêtés aux portes de la ville, furent conduits à la place de Grève devenue un vaste entrepôt   ; la foule s’y amoncelait d’un moment à l’autre en faisant toujours entendre le même cri   : Des armes   ! Il était alors près d’une heure   ; le prévôt des marchands annonça l’arrivée prochaine de douze mille fusils de la manufacture de Charleville, qui seraient bientôt suivis de trente mille autres.
    Cette assurance apaisa pour quelque temps le peuple, et le comité se livra avec un peu plus de calme à l’organisation de la milice bourgeoise. En moins de quatre heures le plan fut rédigé, discuté, adopté, imprimé et affiché. On décida que la garde parisienne serait portée jusqu’à nouvel ordre à quarante-huit mille hommes. Tous les citoyens furent invités à se faire inscrire pour en faire partie   ; chaque district eut son bataillon, chaque bataillon ses chefs   ; on offrit le commandement de cette armée bourgeoise au duc d’Aumont, qui demanda vingt-quatre heures pour se décider. En attendant, le marquis de la Salle fut nommé commandant en second. La cocarde verte fut ensuite remplacée par la cocarde rouge et bleue qui étaient les couleurs de la ville. Tout cela fut le travail de quelques heures. Les districts apportaient leur adhésion aux mesures que le comité permanent venait de prendre. Les clercs du Châtelet, ceux du Palais, les élèves en chirurgie, les soldats du guet, et, ce qui valait mieux encore, les gardes-françaises, offraient leurs services à l’assemblée   ; des patrouilles commençaient à se former et à parcourir les rues. Mais le peuple attendait impatiemment l’effet des promesses du prévôt des marchands   ; les

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