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Histoire de la Révolution française depuis 1789 jusqu'en 1814

Titel: Histoire de la Révolution française depuis 1789 jusqu'en 1814 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: François-Auguste-Marie-Alexis Mignet
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et de la patrie, de ne pas se montrer ennemis du peuple. Les officiers et les soldats jurèrent tous de ne pas faire usage de leurs armes, s’ils n’étaient point attaqués. Thuriot monta ensuite sur les tours, et de là il aperçut une multitude immense qui accourait de toutes parts, et le faubourg Saint-Antoine qui s’avançait en masse. Déjà au-dehors on était inquiet de ne pas le voir revenir, et on le demandait à grands cris. Pour rassurer le peuple, il se montra sur le rebord de la forteresse, et des applaudissements partirent du jardin de l’Arsenal. Il descendit, rejoignit les siens, leur fit part du résultat de sa mission, et se rendit ensuite au comité.
    Mais la multitude impatiente demandait la reddition de la forteresse. De temps en temps on entendait s’élever du milieu d’elle ces paroles   : Nous voulons la Bastille   ! nous voulons la Bastille   ! Tout d’uncoup deux hommes sortent de la foule, s’élancent sur un corps-de-garde, et frappent à coups de hache les chaînes du grand pont. Les soldats leur crient de se retirer, et les menacent de faire feu. Mais ils continuent à frapper, ils brisent les chaînes, abaissent le pont et s’y précipitent avec la foule. Ils avancent vers le second pont pour l’abattre de même. La garnison fait sur eux une décharge de mousqueterie, et les disperse. Ils n’en reviennent pas moins à l’attaque, et pendant plusieurs heures tous leurs efforts se dirigent contre le second pont, dont l’approche est défendue par le feu continuel de la place. Le peuple, furieux de cette résistance opiniâtre, veut briser les portes à coups de hache, et mettre le feu au corps-de-garde. La garnison fait alors une décharge à mitraille, meurtrière pour les assiégeants, et qui leur tue ou blesse beaucoup de monde. Ils n’en deviennent que plus ardents. Ils avaient à leur tête des hommes qui, tels que Élie et Hulin, étaient d’une bravoure et d’une audace extraordinaires, et ils continuèrent le siège avec acharnement.
    Le comité de l’Hôtel-de-Ville était dans la plus grande anxiété. Le siège de la Bastille lui paraissait une entreprise téméraire. Il recevait coup sur coup la nouvelle des désastres survenus au pied de la forteresse. Il était entre le danger des troupes si elles étaient victorieuses, et celui de la multitude qui lui demandait des munitions pour continuer le siège. Comme il ne pouvait pas en donner parce qu’il en manquait, on criait à la trahison. Il avait envoyé deux députations pour suspendre les hostilités et inviter le gouverneur à confier la garde de la place à des citoyens   ; mais au milieu du tumulte, des cris, de la décharge de la mousqueterie, elles n’avaient pas pu se faire entendre. Il en envoie une troisième avec un tambour et un drapeau pour être plus facilement reconnue, mais elle n’est pas plus heureuse. Des deux côtés on ne veut rien entendre. Malgré ses tentatives et son activité, l’assemblée de l’Hôtel-de-Ville était exposée aux soupçons des siens. Le prévôt des marchands excitait surtout la plus grande défiance. – Il nous a, disait l’un, déjà donné plusieurs fois le change dans cette journée. – Il parle, disait un autre, d’ouvrir une tranchée, et il ne cherche qu’à gagner du temps pour nous faire perdre le nôtre. – Camarades, s’écria alors un vieillard, que faisons-nous avec ces traîtres   ? marchez, suivez-moi, sous deux heures la Bastille sera prise.
    Il y avait plus de quatre heures qu’elle était assiégée, lorsque les gardes-françaises survinrent avec du canon. Leur arrivée fit changer le combat de face. La garnison elle-même pressa le gouverneur de se rendre. Le malheureux Delaunay, craignant le sort qui l’attendait, voulut alors faire sauter la forteresse, et s’ensevelir sous ses débris et sous ceux du faubourg. Il s’avança en désespéré, avec une mèche allumée à la main, vers les poudres. La garnison l’arrêta elle-même, arbora pavillon blanc sur la plate-forme, et renversa ses fusils, canons en bas, en signe de paix. Mais les assaillants combattaient et s’avançaient toujours en criant, Abaissez les ponts   ! À travers les créneaux un officier suisse demanda à capituler et à sortir avec les honneurs de la guerre. – Non, non, s’écria la foule   ! – Le même officier proposa de mettre bas les armes, si on leur promettait la vie sauve. – Abaissez le pont, lui répondirent les plus avancés des

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