Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle

Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle

Titel: Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marc Ferro
Vom Netzwerk:
s’il est l’idole des pieds-noirs, il est l’antéchrist pour les parlementaires. Toute l’opération du 13 mai a consisté à amener l’armée — ce qui fera peur à Paris — à appeler de Gaulle puisque au Parlement on veut ignorer son existence. Le rôle de coordination que Soustelle joue à Alger, Michel Debré le joue à Paris où, à la chute du gouvernement Gaillard, René Coty a nommé Pierre Pflimlin. Les activistes font appel à Lacoste pour qu’il refuse d’obéir, mais Lacoste se dérobe. Alors, Alger se mobilise, et les activistes poussent les militaires à se montrer : Massu, puis Salan, qui finit par crier « vive de Gaulle ».
    Les Treize Complots du 13 mai avaient abouti au rappel de De Gaulle ; les dirigeants algérois, sauf Serigny, y étaient pour peu : mais, sans les pieds-noirs mobilisés, y aurait-il eu un coup d’État ?
----
    1 .
Ce qui est défini par le FLN comme le début de l’insurrection, le 2 novembre 1954, fut, en vérité, une série d’attentats, une dizaine. A cette date, le terme de fellaghas était encore réservé aux insurgés de Tunisie.

CHAPITRE VIII
Le levain, les leviers
----
    « Nous étions devenus des étrangers dans notre propre pays », cette formule, l’Histoire l’a rencontrée plusieurs fois, terme pour terme. Elle fut dite par Gandhi d’abord, puis par Pham Quynh, un des conseillers de Bao-Dai, en 1945, lorsque les Japonais notifient qu’ils se sont substitués à l’administration française. Elle fut prononcée aussi par des Arabes d’Algérie, vers 1952 : comme les Vietnamiens, ils ne bénéficiaient plus des libertés fondamentales. On l’a entendue également chez les Mexicains-Américains du Nouveau-Mexique, de l’Arizona, etc., traités en étrangers immigrés par Washington, alors qu’ils sont chez eux de chaque côté de la frontière instituée en 1848 quand les Yankees annexèrent les trois ex-provinces mexicaines. On l’entend aujourd’hui en Amérique centrale.
    Une des situations les plus typiques était sans doute celle des habitants de l’Inde, que l’administration anglaise dissocia peu à peu de leur mode d’organisation.
    Dans le monde de la caste, où, à travers un réseau de relations d’extension variable, le statut des personnes importe plus que leurs fonctions dans le cadre d’un territoire défini, le rôle des monarques et des hiérarchies d’État ne se situe pas dans le même rapport qu’en Occident. Il n’y a pas de relation fonctionnelle entre le politique et le social. De sorte que les petites entités territoriales peuvent être enfermées dans le système des castes, le monarque aussi bien que la communauté villageoise. Jacques Pouchepadass a bien montré que les Anglais, en attribuant aux dynastes le titre de zamindars, chargés de percevoir des rentes à reverser en partie augouvernement colonial, ont fait de ces zamindars des propriétaires au sens occidental du terme, greffant ces règles de droit privé occidental sur les usages des Indiens. Les zamindars n’en ont pas moins continué à lever des redevances coutumières, perpétuant la relation d’autorité qui préexistait à l’arrivée des Anglais. Certaines des pratiques sociales traditionnelles n’en devenaient pas moins « illégales », relevant du Criminal Castes and Tribes Act , ce qui dessaisissait les individus de leur identité sociale réelle (cf. ici ).
    On retrouve un dessaisissement aussi violent en Afrique noire, où les colonisations anglaise et française ont substitué leur mode d’organisation, libéral et étatique, à des systèmes dits « englobants » (J.-L. Amselle), où le pouvoir « politique » n’est pas non plus la garantie d’unité de toute la société.
    La présence étrangère est encore plus violemment ressentie dans les colonies dites de peuplement, où l’installation massive de métropolitains renforce l’impression de dépendance, même si, dans l’espace français, la politique officielle se dit assimilatrice. Certes, plus d’une fois, notamment sous Napoléon III, l’empereur « arabophile », l’armée et la métropole ont pu aider les indigènes d’Algérie à se défendre contre les excès des colons ; l’idée d’un royaume arabe impliquait la sauvegarde d’un certain nombre d’institutions et coutumes d’origine berbère ou islamique. Mais les intérêts économiques ont eu le dernier mot, plus ou moins associés à l’idée que les populations

Weitere Kostenlose Bücher