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Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle

Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle

Titel: Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marc Ferro
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leur apport à la prospérité du pays ne bénéficie pas de la reconnaissance des musulmans, c’est qu’il y a des meneurs qui les détournent d’une saine analyse de leur situation.
    Ils n’arrivent pas à comprendre la signification de cette phrase que me disait Ferhat Abbas : « Que m’importequ’on mette l’électricité dans ma maison, si ma maison n’est pas à moi. »
    En fait, depuis les élections « à la Naegelen », les colons croient toujours pouvoir truquer les élections. L’administration se prête à traiter en délinquants, « qui troublent l’ordre public », ceux qui dénoncent ces méthodes. Malgré la conscience du danger nationaliste qui se développe depuis 1952 et plus encore après 1954, un tabou interdit de parler publiquement du statut futur de l’Algérie.
    Quand l’insurrection se déclenche, en novembre 1954, les Européens d’Algérie veulent n’y voir qu’une série d’attentats terroristes, dont les auteurs « ne représentent rien »… Et, au vrai, à cette date, seule une infime minorité musulmane était prête à se rallier au FLN ou au MTLD, à passer à l’acte. Les élus musulmans étaient flottants. Mais les Européens ne voulurent pas voir cette chance, négocier la modification du statut de l’Algérie avec de vrais élus : ils considéraient que, étant donné leur situation minoritaire — un million d’Européens, 9 millions de musulmans, mais leur nombre ne cessait de croître —, accorder un statut d’égalité réelle aux Arabes revenait à leur abandonner le pays… « L’Arabe est un baiseur et la Mauresque une lapine », ajoutait Ferhat Abbas en riant. Mais les Européens ne riaient pas du tout.
    Quand la guerre gagna une partie du pays, les colons voulurent l’ignorer tout en faisant appel à la métropole… Le FLN avait entrepris cette guerre parce qu’il pensait qu’après Diên Biên Phu et les négociations commencées avec la Tunisie l’heure était propice et ne reviendrait plus (cf. ici et ici ).
    Le gouvernement Mendès France était alors pris entre les problèmes de la paix en Indochine, des négociations en Tunisie, le problème marocain. « Je ne connais pas le dossier algérien, je n’ai pas eu le temps de l’ouvrir », confiait Mendès France à Ferhat Abbas, venu l’en entretenir. « L’Algérie, ce n’est pas moi, voyez Mitterrand », confie-t-il à Roger Stéphane, un de ses amis personnels, cofondateur de L’Observateur . Confirmation : Pierre-René Wolf, directeur de Paris-Normandie , fait savoir à Marc Ferro, alors professeur au lycée d’Oran, que leprésident du Conseil manque d’informations sur l’Algérie : peut-il envoyer quelques analyses, à charge de les publier éventuellement dans le quotidien normand ? Dans les archives de Mendès France, Georgette Elgey a retrouvé le sous-dossier, « Notes Pelabon : Pourquoi l’Algérie est calme. Peut-elle le rester ? »… On y rappelle que les Algériens ne sont pas seulement des musulmans, mais aussi des Français, qu’ils ne sont plus du tout des colonisés, « […] ayant reçu la pleine citoyenneté française avec toutes les prérogatives qui y sont attachées » (sic) ; et, à l’automne 1954, Mendès France reçoit Ferhat Abbas, « chose que n’avait jamais faite aucun de mes prédécesseurs » (sic) . « Contrairement à ce qui a été dit, le calme règne en Algérie », déclare Mendès France ; il ne veut pas apparaître comme un « bradeur ». Et puis, dit-on, « il n’y a pas d’interlocuteur valable ».
    Grâce à Georges Dayan, François Mitterrand connaît mieux l’Algérie — ses notables européens essentiellement. Son but est d’obtenir l’application du Statut de 1947, ou, au moins, une limitation des fraudes qui ont abouti à ce que les Européens aient la haute main sur la quasi-totalité des élus musulmans. « Il faudrait dissoudre l’Assemblée algérienne », lui glisse-t-on… « Décidément extrémiste, Roger Stéphane », répond Mitterrand. Au directeur de la Sécurité générale en Algérie, Jean Vaujour, un métropolitain, Henri Borgeaud déclare : « La cuisine politique algérienne est faite dans une marmite algérienne, par des cuisiniers algériens. Entendez, bien sûr, européens d’Algérie. » « Des élections honnêtes ? » « Foutez-nous la paix, il n’y aura pas de problème politique si vous ne les créez pas », répond-on à Pierre Nicolaï,

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